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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

Histoires d’amour, de séparation et de souffrance (26)

Nous avons vu dans la dernière rubrique que le garçon et la fille abordent différemment l’angoisse de la castration. Pour échapper à l’angoisse de la castration, la petite fille va essayer un court moment de croire en une mère non châtrée. Très vite, comme le petit garçon, elle va se rendre à l’évidence que, comme elle, sa mère aussi est châtrée. Séparation nette avec la mère, elle va alors la mépriser et se retourner vers le père comme nouvel objet d’amour.

C’est ainsi que l’angoisse de castration inaugure le refoulement des désirs incestueux, le complexe d’Œdipe chez le garçon, alors que la fille va être introduite au désir œdipien de son père par la castration et ce, jusqu’à l’adolescence. Cette différence est fondamentale pour la compréhension de ce qui distingue la sexualité masculine de la sexualité féminine. Toute sa vie, contrairement à l’homme, la femme reste ainsi « ouverte » à un désir incestueux pour le père qui est frappé du plus grand refoulement chez l’homme. Ce qui lui permettra, adulte, d’éprouver une « Jouissance Autre », différente et plus complète, que celle de l’homme.

Cette ouverture au désir du père amènera la fille à un autre changement : celui de la zone érogène. Le clitoris investi préalablement cédera progressivement la place à un investissement du vagin. À l’adolescence, la jeune fille s’apprête à accueillir le pénis dans son vagin. L’envie d’avoir un pénis comme celui du garçon cède la place au désir de jouir d’un pénis dans le coït.

Enfin, l’envie d’être mère chez la fille prend sa racine dans un déplacement entre l’envie du pénis et l’envie d’un enfant. Le renoncement aux sentiments œdipiens ne se fera donc jamais totalement chez la fille.

Avec l’introduction de l’Autre comme élément déterminant de l’évolution libidinale de l’enfant, l’apport de Jacques Lacan nous permet de mieux saisir la dialectique du désir à laquelle sont soumis le garçon et la fille pendant la phase phallique. Par ailleurs, la notion de phallus prend une importance décisive et se distingue radicalement de la notion de pénis, les deux ayant été employées de façon souvent indistincte chez Freud.

L’intérêt dont témoigne la mère pour le pénis du petit garçon se situe pour lui dans la suite logique de l’intérêt qu’elle témoignait pour ses excréments. Seulement ici, pendant la phase phallique, cet intérêt contraste avec le refus qu’elle lui oppose quant à son désir naissant pour elle. Selon l’expression de Lacan, « il est apprécié comme objet, mais déprécié comme désir », c’est-à-dire déprécié comme sujet. « Que veut-elle donc » se demande le petit garçon ? C’est là que le père est introduit comme celui qui possède ce que la mère veut, c’est-à-dire, non plus le pénis du petit garçon, mais le phallus.

Dans un premier temps, l’enfant, aussi bien la fille que le garçon, s’identifie à ce qui manque à la mère pour être comblée, le phallus. Il est le phallus. Le rapport imaginaire entre l’enfant et la mère se consolide par cette identification qui permet à l’enfant de croire être le phallus de la mère et à la mère de se croire dotée du phallus qui lui manque.

La castration, telle que Lacan l’introduit, ne porte pas seulement sur l’enfant comme Freud nous l’a montré. Elle porte aussi sur la mère, plus précisément sur le lien mère-enfant. L’interdit de l’inceste incarné par le père touche l’enfant à qui il interdit de posséder sa mère. Mais il touche également la mère à qui il interdit de réintégrer le produit de son ventre. C’est grâce à cette intervention du père que l’Autre maternel, c’est-à-dire la mère toute-puissante parce que dotée de son enfant-phallus, est châtrée de sa prétention à avoir le phallus et que l’enfant est châtré dans son désir de l’être. Ce renoncement mutuel permet à l’enfant de renoncer à être le phallus pour aborder la problématique de l’avoir. Différemment si c’est un garçon ou une fille, comme nous l’avons vu plus haut.

Ce passage de l’être à l’avoir est le temps le plus important de la dialectique œdipienne. Il implique le jeu des identifications par lequel le garçon renonce au désir de la mère (à son désir pour lui d’être son phallus et à son propre désir pour elle) en s’identifiant à son père, porteur de ce qui fait finalement désirer la mère. Le « déclin du complexe d’Œdipe » marque la fin des cinq à six premières années et met en sourdine les pulsions sexuelles de l’enfant qui ont connu leur apogée avec les désirs œdipiens.





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Tres interessant, il faut donner ce cours à tout les etudiants universitairs, mieux à tout ceux qui desirent avoir des enfants.

Eddy

10 h 09, le 23 mai 2019

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Commentaires (1)

  • Tres interessant, il faut donner ce cours à tout les etudiants universitairs, mieux à tout ceux qui desirent avoir des enfants.

    Eddy

    10 h 09, le 23 mai 2019

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