Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Éclairage

Entre Washington et Téhéran, l’escalade, mais pas la guerre

Les États-Unis ont envoyé dimanche le porte-avions USS Abraham Lincoln et une force de bombardiers dans le golfe Arabique.

Le porte-avions USS Abraham Lincoln transitant par le détroit de Gibraltar, le 13 avril 2019. US Navy /Mass Communication Specialist 2nd Class Clint Davis/Handout via Reuters

Washington et Téhéran risquent-ils d’entrer prochainement dans un conflit ouvert au Moyen-Orient ? Face à la montée des tensions entre les deux pays, la question est sur toutes les lèvres. Cette crainte a été mise à nouveau sur la table ces derniers jours alors que les États-Unis ont envoyé dimanche le porte-avions USS Abraham Lincoln et une force de bombardiers dans le golfe Arabique. Une décision qui équivaut à « un message clair et sans équivoque au régime iranien : nous répondrons de manière implacable à toute attaque contre les intérêts des États-Unis ou de nos alliés », a indiqué dimanche le conseiller américain à la Sécurité nationale John Bolton. En ce sens, l’initiative est « une réponse à des indications et à des avertissements inquiétants qui ont engendré une escalade », a-t-il souligné, sans donner plus de précisions, dans un communiqué de huit lignes seulement. « Il n’est pas inhabituel que des navires américains effectuent une rotation dans le golfe Persique (Arabique) », tempère Ali Vaez, directeur du projet sur l’Iran à l’International Crisis Group, interrogé par L’Orient-Le Jour. Le rapport de force est complètement inégal compte tenu de la domination des Américains sur les voies maritimes dans la région du Golfe. « En fait, le USS Abraham Lincoln était en route vers la région, quelle que soit la déclaration faite par la Maison-Blanche. Ce qui est inhabituel est que John Bolton essaie d’exploiter un déploiement de routine d’un porte-avions américain pour envoyer un signal à l’Iran à un moment où les tensions montent », observe-t-il.Cette action permet aux États-Unis de tracer une ligne rouge supplémentaire pour dissuader le régime iranien d’entreprendre toute action contre les forces américaines présentes sur des bases dispersées à travers le Moyen-Orient. Pouvant être interprété comme un bombage de torse à l’égard de Téhéran, « les États-Unis ne cherchent pas la guerre avec le régime iranien, mais nous sommes totalement préparés à répondre à toute attaque, qu’elle soit menée par procuration, par le corps des gardiens de la révolution islamique ou par les forces régulières iraniennes », a tenu à insister John Bolton, faucon qui défend une ligne dure contre l’Iran depuis son arrivée au sein de l’administration de Donald Trump en 2018. Interrogé à ce sujet lors d’un déplacement, le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a également confirmé qu’ « il est tout à fait vrai que nous avons assisté à des actions d’escalade de la part des Iraniens », tout en restant vague, et en ajoutant qu’ils seraient « tenus responsables » en cas d’attaques contre les intérêts américains.

Malgré les déclarations des deux pays qui souhaitent éviter toute confrontation directe, « il y a tellement de frictions entre l’Iran et les États-Unis dans la région que, même par inadvertance, un affrontement pourrait avoir lieu », souligne Ali Vaez. « Le risque d’affrontement est extrêmement élevé » alors qu’il n’y a pas de canal de communication entre les deux pays ni de plan de sortie, ajoute-t-il. Les intérêts et les stratégies à ce sujet divergent également au sein même de la Maison-Blanche alors que les faucons, à l’instar de John Bolton, ne cachent pas leur souhait de voir une confrontation avec l’Iran. Le président américain Donald Trump semble toutefois peu enclin à engager les États-Unis dans une pareille opération militaire. Belliciste dans le verbe, il a fait part à plusieurs reprises de son souhait de désengager les États-Unis au Moyen-Orient.

Sur le plan extérieur, « les alliés des États-Unis, en particulier l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et Israël, ont tout intérêt à saisir l’occasion offerte par l’administration Trump d’affaiblir considérablement l’Iran », précise Ali Vaez. Du côté iranien, « des éléments appartenant aux gardiens de la révolution pensent qu’un affrontement militaire ne signifierait pas une invasion de l’Iran – ce qui est irréaliste. Cela pourrait potentiellement les aider à monopoliser le pouvoir et déterminer le destin de la République islamique à un moment critique où la succession du guide suprême se profile à l’horizon », indique le spécialiste.


(Lire aussi : Pétrole iranien : les alliés de Washington "mécontents", selon Téhéran)


« Mère de toutes les guerres »

La dernière décision américaine en date visant l’Iran s’ajoute à la longue liste de mesures prises par la Maison-Blanche depuis l’année dernière dans le but d’isoler Téhéran tant sur le plan économique que politique. Les déclarations de John Bolton sur l’objectif de l’envoi de l’USS Abraham Lincoln sont notamment intervenues presque un an jour pour jour après le retrait controversé des États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015 – qualifié de « pire accord jamais conclu » par le président américain. À cet égard, l’agence iranienne IRNA a indiqué hier que Téhéran doit annoncer aujourd’hui « sa décision de réduire ses engagements au regard de cet accord » en réponse au retrait unilatéral de Washington. Une façon de marquer le coup, un an après le retrait américain, pour faire pression sur les autres cosignataires de l’accord.

En plus des sanctions économiques imposées au cours de ces derniers mois à l’Iran, Washington a également mis un terme le mois dernier aux exemptions dont disposaient huit pays (la Chine, l’Inde, la Turquie, le Japon, la Corée du Sud, Taïwan, l’Italie et la Grèce) pour permettre l’achat de pétrole iranien, tout en contournant les mesures américaines. Resserrant un peu plus l’étau autour du régime, Washington avait placé les gardiens de la révolution et la force al-Qods, qui font partie intégrante des sphères du pouvoir iranien, sur sa liste noire des « organisations terroristes étrangères » quelques mois plus tôt. « Les Américains sont persuadés que leur politique de sanctions va mettre l’Iran à genoux », confiait à L’OLJ un diplomate occidental il y a quelques semaines.

Mettant en garde Washington de ne pas provoquer Téhéran, le président iranien, Hassan Rohani, avait déjà déclaré en juillet dernier qu’une confrontation entre les deux serait « la mère de toutes les guerres ». Ayant un budget s’élevant à 16 milliards de dollars alloué à sa défense en 2017, disposant de 425 000 soldats actifs et de quelque 125 000 membres des gardiens de la révolution, l’Iran est doté d’une forte capacité de nuisance. Un atout auquel s’ajoutent les liens entretenus par Téhéran avec différentes milices dans la région, telles que le Hezbollah au Liban et en Syrie, les houthis au Yémen ou encore le Hachd el-Chaabi en Irak. Toutefois, Téhéran ne dispose pas d’un contrôle total sur l’ensemble des acteurs non étatiques qui « pourraient décider par eux-mêmes de prendre des mesures qui pourraient revenir hanter leurs parrains et être utilisées comme justification pour entreprendre une action militaire » par les États-Unis, estime Ali Vaez.


Lire aussi

Zarif dénonce une "équipe des B" qui pousse Trump vers un conflit avec l'Iran

Le pétrole grimpe haut avec le durcissement des sanctions contre l’Iran

« Éteignez tout. Oubliez tout. Vous allez vivre une expérience iranienne »

Washington prêt à sanctionner ses alliés pour fermer le robinet du pétrole iranien

Téhéran appelle ses voisins à s'unir pour "refouler le sionisme"

Sanctions US contre un réseau libanais de blanchiment d'argent au profit du Hezbollah

Washington et Téhéran risquent-ils d’entrer prochainement dans un conflit ouvert au Moyen-Orient ? Face à la montée des tensions entre les deux pays, la question est sur toutes les lèvres. Cette crainte a été mise à nouveau sur la table ces derniers jours alors que les États-Unis ont envoyé dimanche le porte-avions USS Abraham Lincoln et une force de bombardiers dans le golfe...

commentaires (2)

ON N,EN EST PAS TRES LOIN. LE BRUIT DE BOTTES RESONNE DEJA. CE N,EST PAS POUR AUJOURD,HUI MAIS CA PEUT ETRE POUR DEMAIN ! A MOINS D,UN CHANGEMENT D,ATTITUDE DE L,UN OU L,AUTRE PROTAGONISTE.

LA LIBRE EXPRESSION

07 h 12, le 08 mai 2019

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • ON N,EN EST PAS TRES LOIN. LE BRUIT DE BOTTES RESONNE DEJA. CE N,EST PAS POUR AUJOURD,HUI MAIS CA PEUT ETRE POUR DEMAIN ! A MOINS D,UN CHANGEMENT D,ATTITUDE DE L,UN OU L,AUTRE PROTAGONISTE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 12, le 08 mai 2019

  • Comme un parfum de 2003...

    Jean abou Fayez

    02 h 11, le 08 mai 2019

Retour en haut