Le chef du PSP, Walid Joumblatt, qui a accordé en soirée un entretien à la chaîne du site électronique d’information Russia Today, à partir de sa résidence à Clemenceau, et le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, qui s’était exprimé un peu plus tôt au cours d’une cérémonie organisée à Meerab pour la commémoration du génocide arménien, se sont tous deux retrouvés hier autour d’une même idée, celle du péril auquel le Hezbollah et l’axe auquel il appartient exposent le Liban.
Mais Walid Joumblatt, rompant avec le discours officiel et se démarquant sensiblement du Hezbollah qu’il n’a donc pas ménagé, est allé plus loin en annonçant sans ambages que les fermes de Chebaa, dont l’appartenance est revendiquée par Beyrouth, ne sont pas libanaises et qu’elles sont « occupées » par le Liban. Il ne s’est pas empêché de souligner dans un tweet à quel point la « moumanaa » (l’axe de la résistance) porte préjudice au Liban, alors que dans son entretien à Russia Today, il s’est gardé de se montrer critique à l’égard de la formation de Hassan Nasrallah. « Il n’est pas surprenant qu’une décision ait été prise par une institution judiciaire (le Conseil d’État) pour détruire la nature dans la réserve des cèdres du Chouf et les terrains appartenant à Aïn Dara. Le pays entier est ouvert à tous vents pour servir les intérêts de la moumanaa. Cela commence au niveau des carrières et va crescendo », a-t-il déploré sur son compte Twitter, en réaction à la décision du Conseil d’État d’autoriser la construction d’une mégacimenterie à Aïn Dara, un projet qui serait donc soutenu par le Hezbollah, laisse entendre le chef du PSP. « Le fait même de mentionner l’accord de Baabda est devenu un crime », a encore écrit M. Joumblatt, avant de promettre de « persister dans la confrontation pacifique et civile contre le travestissement des vérités, pour un Liban meilleur ».
À Meerab, Samir Geagea soulignait que « la période critique que traverse le Liban commande une rupture avec la politique des axes et celle qui consiste à adopter des décisions unilatéralement, en faisant fi de l’unanimité gouvernementale ». « Le fait d’hypothéquer la décision stratégique de l’État conduira en définitive à sa perte », a-t-il averti, en affirmant que son parti « continuera de militer pour atteindre l’objectif qu’il s’est fixé : un État au vrai sens du terme, qui détient, seul, la décision de paix et de guerre ; une République forte grâce à sa bonne gouvernance et à la probité de ses dirigeants et qui sera au service de son peuple et non pas une République de pacotille qui cède son pouvoir de décision aux autres, rongée par la corruption et minée par l’échec ».
(Lire aussi : Joumblatt : Les contacts avec le Hezbollah n’ont jamais été rompus)
La délimitation des frontières
Dans l’interview à Russia Today, Walid Joumblatt s’est attardé sur la délimitation des frontières, avec la Syrie et avec Israël. Pour ce qui est de la Syrie, il a affirmé qu’après la libération du Liban-Sud, en l’an 2000, « des officiers libanais ont entrepris, en collaboration avec la Syrie, de modifier les cartes géographiques pour faire en sorte que les fermes de Chebaa et Wadi el-Assal (à la frontière avec le Golan) soient intégrés au territoire libanais, afin de garder le prétexte d’une terre occupée qu’il fallait libérer à tout prix ». « Les fermes de Chebaa ne sont pas libanaises. En théorie, c’est nous qui les occupons », a-t-il dit, avant d’expliquer qu’avec Israël, la problématique est différente.
Walid Joumblatt, qui a plaidé pour une délimitation des frontières avec l’État hébreu sous l’égide des Nations unies, s’est indirectement prononcé pour un recours à l’accord d’armistice de 1949 entre Beyrouth et Tel-Aviv, afin de pouvoir procéder au tracé des frontières sud et commencer les opérations de prospection gazière et pétrolière offshore. « Ma question est adressée aux juristes. Je ne sais pas s’il est possible de recourir à cet armistice pour entamer des discussions (avec Israël) au sujet des ressources pétrolières. Je n’ai pas de réponse à cette question, mais des juristes peuvent nous éclairer », a-t-il dit.
Il s’est déchaîné contre le président syrien, Bachar el-Assad, l’accusant d’être « un grand menteur », avant de révéler que ce dernier avait adressé en 2012 une lettre au Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, via un émissaire russe, pour le rassurer sur le fait qu’un mini-État alaouite en Syrie ne représentait pas un risque pour Israël.
Joumblatt : Le Hezbollah ne peut pas confisquer ma décision indéfiniment
commentaires (18)
On a demandé à un chameau : Pourquoi tu boites ? Il répond : Parce que j'ai mal à la lèvre. Pour l'ONU, les fermes de Chebaa (20km2) font partie du Golan. C'est la raison pour qu'Israël les avait occupées en 1967 au même titre que le Golan. Le Hezbollah iranien est le seul qui les "libanise" pour garder son arsenal. On ne parle que des fermes de Chebaa, personne ne parle des 1210km2 du Golan annexés par Israël depuis 1981. A ce rythme-là, bientôt Macao entrera dans la danse pour savoir à qui appartiennent les fermes de Chebaa : A la Syrie, au Liban, à la Palestine ou à Israël.
Un Libanais
12 h 57, le 27 avril 2019