Craignant la "fin" de sa présidence, Donald Trump a essayé de limoger le procureur spécial dans l'affaire russe, Robert Mueller, dont le rapport d'enquête publié jeudi a pourtant fait exulter le locataire de la Maison Blanche.
Les révélations du document de plus de 400 pages, fruit de 22 mois d'investigations hors norme, ont mis Washington en ébullition, étant interprétées de façon très différente selon les bords politiques.
"Comme je l'ai toujours dit: il n'y a pas de collusion, pas d'entrave" à la justice, a tweeté le président républicain, désireux de refermer définitivement une saga qui empoisonne son mandat depuis deux ans.
Le procureur Mueller s'est pourtant gardé de conclusions aussi définitives dans son rapport largement expurgé d'informations considérées confidentielles, au grand dam des démocrates qui crient à la dissimulation. S'il a confirmé l'absence de preuves d'entente avec Moscou, M. Mueller a écrit ne pas être "en mesure" d'exonérer le président des soupçons d'entrave à la justice pesant sur lui. Dans son rapport, il a au contraire détaillé une série de pressions troublantes exercées par Donald Trump sur son enquête, à commencer par une tentative de le limoger, à laquelle se sont opposés les juristes de la Maison Blanche.
Le document révèle aussi que M. Trump s'est dit "foutu" en apprenant la nomination d'un procureur spécial en mai 2017. "Oh mon Dieu. C'est terrible. C'est la fin de ma présidence", aurait confié l'ex-magnat de l'immobilier.
Celui-ci a limogé le chef du FBI James Comey, alors en charge de l'enquête russe, et multiplié les déclarations menaçantes visant certains témoins, a relevé le procureur spécial, en réaffirmant le droit du Congrès de poursuivre un président en exercice.
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Le ministre de la Justice, Bill Barr, a redit ne pas avoir matière à poursuivre Donald Trump, faisant part lors d'une conférence de presse de certaines "désaccords" avec les théories juridiques développées par le procureur Mueller.
"Le président était frustré et en colère, sincèrement convaincu que cette enquête portait atteinte à sa présidence", a déclaré le ministre, semblant justifier les attaques du président contre les enquêteurs. "Pour autant, la Maison Blanche a pleinement coopéré avec l'enquête du procureur spécial" et le "président n'a pas agi pour (le) priver des documents et témoins nécessaires pour mener à bien son enquête", a-t-il poursuivi.
Dans la foulée, dans un tweet soigneusement préparé à l'avance, M. Trump a publié sur Twitter une affiche inspirée de "Game of Thrones", le montrant de dos sur fond d'un épais brouillard.
"Pour les rageux et les démocrates de la gauche radicale, c'est Game Over", était-il écrit, résumé de ce que M. Trump considère être une disculpation retentissante, au terme d'une "chasse aux sorcières" menée par ses ennemis politiques n'ayant pas digéré leur défaite dans les urnes en 2016.
Le milliardaire républicain avait dénoncé plus tôt "la plus grande arnaque politique de tous les temps", ainsi qu'un "harcèlement présidentiel".
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L'opposition a elle souligné les "différences frappantes" entre le rapport Mueller et la conclusion de Bill Barr, qu'ils accusent de "partialité".
Si Donald Trump espère pouvoir se tourner résolument vers sa campagne de réélection, les démocrates comptent user de tous les moyens en leur pouvoir, à commencer par le contrôle démocrate de la chambre basse du Congrès, pour relancer des poursuites. Ils ont d'ailleurs demandé jeudi au procureur Mueller de témoigner à la chambre des représentants d'ici le 23 mai. M. Barr a dit qu'il ne s'y opposerait pas.
Le procureur spécial Mueller a supervisé pendant 22 mois des investigations tentaculaires, ponctués par l'inculpation de 34 personnes russes et américaines, dont six proches collaborateurs du président Trump pour des malversations diverses. Cet homme méthodique et austère, qui s'est toujours tenu à l'écart du vacarme politique et médiatique, a continué à conserver le silence depuis qu'il a remis son rapport final.
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