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Liban - Décryptage

Lutte anticorruption : une volonté sérieuse, mais pas encore de résultats concrets

Avec le dossier des déplacés syriens, celui de la lutte contre la corruption constitue une des priorités de l’étape actuelle. Le président de la République, Michel Aoun, avait donné le ton lors de l’iftar annuel qu’il avait organisé en juin dernier au palais de Baabda. Entouré du président de la Chambre Nabih Berry et du Premier ministre Saad Hariri, M. Aoun avait alors déclaré que l’année suivante, à la même date, la lutte contre la corruption aurait commencé. De fait, depuis la formation du gouvernement qui se donne pour slogan « Au travail », les événements semblent se précipiter dans plusieurs directions. Des dossiers de corruption sont ouverts aux FSI (déjà près d’une vingtaine d’officiers font l’objet d’enquêtes précises), à la CNSS, au sein du corps judiciaire (certains auxiliaires de justice sont directement mis en cause) et en général dans plusieurs institutions étatiques. De même, la commission parlementaire des Finances enquête, sur l’impulsion de son président Ibrahim Kanaan, au sujet des embauches illégales de 4 695 personnes dans plusieurs ministères après l’adoption d’une loi interdisant les embauches dans le secteur public.

Mais ce qui a le plus attiré les médias, dans ce contexte, c’est sans doute la mise en cause de l’ancien Premier ministre Fouad Siniora. Tout a commencé lors de la conférence de presse au Parlement d’un député membre du bloc du Hezbollah, Hassan Fadlallah, qui a évoqué des foyers de corruption au sein de l’État libanais, abordant au passage la question des 11 milliards de dollars dépensés sans justificatifs, qui continuent d’empêcher la tenue de comptes publics clairs et transparents. En réalité, M. Fadlallah n’a pas cité nommément l’ancien Premier ministre Fouad Siniora. Malgré cela, ce dernier s’est senti visé et il a choisi de répondre dans une conférence de presse spectaculaire, entouré de nombreuses personnalités politiques du courant du Futur et surtout du 14 Mars.

À travers la présence de toutes ces personnalités, l’ancien Premier ministre a voulu montrer qu’il n’est pas seul et qu’il bénéficie d’un large soutien politique. Selon une source qui suit de près le dossier, l’ancien Premier ministre a décidé de faire front, sans même avoir été cité, pour couper justement court à toute intention de le convoquer devant la justice ou de le prendre à partie.

M. Siniora a donc adressé des messages dans plusieurs directions : il a tenté de redonner vie au mouvement du 14 Mars en invitant les principales figures de ce mouvement à sa conférence de presse. Il a aussi mobilisé le courant du Futur et même le mufti de la République qui a déclaré que « Siniora est une ligne rouge ». En même temps, il a nommément attaqué le directeur général du ministère des Finances, Alain Bifani. Il a donc ainsi voulu se protéger derrière une couverture politique élargie et une couverture confessionnelle, cherchant à mobiliser la communauté contre le Hezbollah qui s’érige en principal héros de la lutte contre la corruption. En même temps, il a mis le Premier ministre Saad Hariri au pied du mur en le poussant à prendre position en sa faveur, quitte à s’éloigner du chef de l’État qui a fait de la lutte contre la corruption une de ses grandes priorités après les élections législatives et la formation du nouveau gouvernement.

La riposte de l’ancien Premier ministre aurait dû en principe pousser les parties concernées à suspendre le processus au moins en ce qui concerne les fameux 11 milliards de dollars, pour diriger la lutte contre la corruption vers d’autres dossiers qui ne sont pas moins importants. Mais le problème est que le Trésor public ne peut pas fermer ses comptes, comme cela devrait être le cas dans le projet de loi sur le budget, tant que notamment ce trou de 11 milliards reste ouvert et inexpliqué. Chaque année au moment de l’élaboration du projet de loi sur le budget, la même question se pose et il est décidé de la renvoyer à l’année prochaine... Cette fois, dans le cadre de la lutte contre la corruption, le contexte aurait pu être favorable au règlement de cette question en suspens depuis des années.

Après la conférence de presse de Siniora, deux développements se sont produits. D’abord, le député Hassan Fadlallah s’est étonné de la riposte de l’ancien Premier ministre en rappelant qu’à aucun moment le nom de celui-ci n’a été cité. Ensuite, le directeur général du ministère des Finances a tenu une conférence de presse, la première du genre, pour répondre aux accusations directes portées par Siniora contre lui. Par sa tenue même, cette conférence de presse a constitué un événement. De plus, le directeur général a répondu aux accusations dans les grandes lignes en évoquant les documents financiers dissimulés, détruits ou jetés derrière les meubles et laissés à la pourriture. Mais surtout, il a annoncé être en possession de documents prouvant ses dires. L’affaire a donc pris une nouvelle tournure, alors que le Premier ministre Saad Hariri a répété hier à partir du palais de Baabda qu’il s’est entendu avec le chef de l’État et le président de la Chambre pour lever la couverture politique sur toute personne impliquée dans la corruption. En principe donc, ce dossier et d’autres ne devraient pas être fermés sans avoir été traités. Il n’est pas dit qu’une personne précise sera mise en cause, mais pour fermer ses comptes et passer à l’examen du budget 2019, le ministère des Finances doit régler l’affaire des 11 milliards de dollars. Sinon, il faudra, une fois de plus, trouver des formules vagues et procéder à un nouveau report. En attendant les développements de ce dossier particulier, de nombreux autres sont ouverts et les organismes de surveillance travaillent désormais à plein temps pour débusquer la corruption et le gaspillage sous toutes leurs formes. S’agit-il d’une tendance provisoire et éphémère ou bien d’une politique sur le long terme ? Aujourd’hui, beaucoup de Libanais restent sceptiques et attendent des résultats concrets...

Avec le dossier des déplacés syriens, celui de la lutte contre la corruption constitue une des priorités de l’étape actuelle. Le président de la République, Michel Aoun, avait donné le ton lors de l’iftar annuel qu’il avait organisé en juin dernier au palais de Baabda. Entouré du président de la Chambre Nabih Berry et du Premier ministre Saad Hariri, M. Aoun avait alors déclaré...

commentaires (8)

Chère Scarlett Qui se sent morveux se mouche .

Hitti arlette

16 h 46, le 13 mars 2019

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Commentaires (8)

  • Chère Scarlett Qui se sent morveux se mouche .

    Hitti arlette

    16 h 46, le 13 mars 2019

  • bof madame votre parti pris est devenue lassant et il est tres facile de déconstruire votre argumentaire … comment cela peut etre sérieux quand la partie qui accuse est elle meme sous le coup de plusieurs procès et accusation a l'exterieur mais SURTOUT FAIT L'OBJET DE DOUTES CONCERNANT LE PORT ET L'AEROPORT MAIS PAR DELA CELA COMMENT FAIRE CONFIANCE QUAND C'EST JUSTEMENT UN PARTI ADVERSAIRE A L'AUTRE l'ACCUSE DE CORRUPTION TOUTEFOIS LES GENS SAVENT QUE CE PARTI LA FAISAIT PARTI DU PARLEMENT DEPUIS 93 !?!?!

    Bery tus

    15 h 18, le 13 mars 2019

  • J'ai assisté en Afrique du Sud, un jour, dans un zoo rempli de babouins , le dresseur de ces babouins rentrer dans la cage et foncer sur celui qui semblait être le chef pour lui donner une correction parce qu'il faisait la forte tête. Scène incroyable ou le dresseur ou dompteur asséne des baffes à ce récalcitrant, devant toute la horde, ressortir devant les autres singes applatis, leur ayant montré qui était le vrai chef et qu'il fallait lui obéir à lui plutôt qu'à celui qui voulait jouer au caïd. Il est certain et utopique de croire que la corruption sera résolue et éradiquée sans qu'on ne casse des oeufs , il y aura des boucs émissaires des injustices etc... comme partout dans le monde , mais il faut bien commencer par quelqu'un. Les autres en tireront les leçons.

    FRIK-A-FRAK

    14 h 56, le 13 mars 2019

  • IL Y A DEUX SORTES DE CORRUPTIONS : - LA CORRUPTION DIRECTE ET QUE SONT LES TRAFICS DE TOUTES SORTES. - LA CORRUPTION INDIRECTE ET QUE SONT LES COMMISSIONS SUR LES PROJETS ET LES COMBINES DE TOUTES SORTES. LA PREMIERE EST LA PIRE. MAIS TOUTES DEUX GONFLENT ENORMEMENT LA DETTE ETATIQUE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 46, le 13 mars 2019

  • Pour que la lutte contre la corruption au Liban ait une chance de mettre fin à l’impunité des leaders politiques il faut commencer par pointer du doigt la responsabilité des quatre présidents de la République de la Chambre du Gouvernement et du Hezbollah (le plus puissant des quatre) ou de leurs proches (monsieur gendre)

    Tabet Ibrahim

    07 h 47, le 13 mars 2019

  • Bien des têtes vont tomber , la machine déclenchée n'a pas de marche arrière .

    Chucri Abboud

    07 h 28, le 13 mars 2019

  • Les résultats concrets sont déjà palpables sur le terrain ... La lutte anti corruption entamée sort doucement Mais sûrement de son cocon d acier dans lequel elle y était emprisonné durant des décennies et qui faisait barrière ... Enfin Certains employés et cadres absents du service public se réveillent aujourd hui chaque matin plus tôt que d habitude pour pointer à l heure reprenant leur travail plus aux sérieux ... Les coups de pieds entamés dans la fourmilière commencent à dégager leurs effets positifs ... Un petit coup de pouce qui semble engendrer l effet Domino ... l Effet Tsunami aurait put être dévastateur ... Qui va piano va sano va longtano ...

    Menassa Antoine

    04 h 30, le 13 mars 2019

  • Mais certainement, Mme Haddad que les libanais vont demeurer sceptiques devant cet étalement soudain de sentiments vertueux de la part de tous nos politiciens qui veulent lutter contre la corruption endémique et à tous les niveaux... Qu’ ils arrêtent de se moquer de ce pauvre peuple, et tant que le gouvernement chapeauté par le chef de l’état n’annonce pas la mise sur pied d’une commission nationale trans-communautaire et apolitique aux pouvoirs élargis pour investiguer systématiquement tous les dossiers, identifier les coupables potentiels avec possibilité de poursuites pénales sérieuses et sanctions, rien ne sera réglé! Tous ces messieurs vont jouer aux veuves éplorées, à l’honneur bafoué, à l’insulte communautaire et on fera vite de fermer les dossiers pour préserver la soit-disant entente nationale et la paix civile! Rien ne pourra changer tant qu’il n y a pas une vraie révolte sociale et changement de toute cette clique de dinosaures politiques féodaux, sclérosés et corrompus! Et ce n’est pas demain la veille!

    Saliba Nouhad

    02 h 18, le 13 mars 2019

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