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À La Une - crise

Panne électrique au Venezuela : la mort dans les hôpitaux et la morgue congestionnée

"Les médecins ont fait tout ce qu'ils pouvaient, mais sans électricité, que pouvaient-ils?"



Dans le couloir de l'hôpital Miguel Perez Carreno à Caracas, pendant la coupure d'électricité, le 8 mars 2019. AFP / MATIAS DELACROIX

Marielsi Aray est morte au petit matin, elle avait 25 ans. Les appareils respiratoires qui la maintenaient en vie à l'hôpital universitaire de Caracas ont cessé de fonctionner à cause de la panne électrique la plus longue et la plus grave qu'ait connue le Venezuela. Son oncle, José Lugo, pleure devant le bâtiment en attendant le corps de la jeune femme. "Les médecins ont essayé de la ranimer manuellement, mais elle a décompensé et elle est morte à 2h00 ce matin", raconte-t-il à l'AFP.

A ce moment-là, cela faisait déjà huit heures que 22 des 23 Etats du pays et Caracas étaient privés de courant. Des pannes fréquentes au Venezuela mais jamais de cette ampleur, ce qui a conduit le chef de l'Etat Nicolas Maduro à dénoncer une "guerre de l'électricité" et son gouvernement à évoquer un "sabotage". Des experts évoquent pour leur part un manque d'investissement et de maintenance.

Dès le début de la panne, les machines d'assistance respiratoire du service de soins intensifs où Marielsi étaient hospitalisée pour une affection pulmonaire grave se sont arrêtées. La jeune femme avait été transférée lundi d'une clinique privée. "Les médecins ont fait tout ce qu'ils pouvaient, mais sans électricité, que pouvaient-ils?", se demande son oncle.

Douze patients étaient décédés dans l'hôpital universitaire de Caracas le 12 janvier lors d'une précédente panne. Au-dehors, Gisela Cote attend des nouvelles de sa soeur reçue aux urgences depuis le matin. "Elle est atteinte d'un cancer des os et cette nuit elle avait horriblement mal. Mais on n'a pas pu l'amener à l'hôpital à cause de la panne. Il a fallu qu'on attende le matin", explique Gisela, qui habite le quartier de Petare, le plus grand quartier populaire du pays et l'un des plus dangereux.


(Lire aussi : Venezuela : soumis à de nouvelles sanctions, le régime contre-attaque)



"Les enfants étaient terrorisés"

L'hôpital pédiatrique J.M de los Ríos, dans le centre de Caracas, est plongé dans la pénombre depuis jeudi en fin d'après-midi. Le générateur électrique censé dépanner en cas d'urgence ne fonctionne pas, accuse Gilberto Altuvez, 38 ans, père d'un enfant de 8 ans hospitalisé depuis janvier. "La nuit a été terrible, sans lumière, sans rien... L'hôpital est resté dans le noir, c'était bizarre, une folie", raconte-t-il à l'AFP devant le bâtiment où les parents se plaignent de cette panne sans précédent.

L'hôpital, qui accueille quelque 160 enfants, pour la plupart souffrant d'affections chroniques aiguës, a reçu ensuite plusieurs générateurs. "Mais aucun n'a permis de résoudre complètement le problème", continue Gilberto. Non loin de lui, sur le trottoir, Emilse Arellano craint pour la vie du plus jeune de ses cinq enfants qui devait être dialysé ce vendredi.

"Certains services sont chaotiques, mais en néphrologie, l'électricité marche mieux", selon elle. Mais pendant la nuit, il a fallu éclairer les lieux avec les torches des téléphones portables parce que "les enfants étaient terrorisés". "Mon fils avait besoin d'une dialyse urgente, il n'arrive pas à uriner et souffre rapidement d'oedèmes, ce qui le gêne pour respirer. Ils ont essayé quatre générateurs, un seul a fonctionné mais c'est insuffisant pour tout l'hôpital", souligne Emilse au milieu d'autres mères inquiètes.


(Pour mémoire : La pression internationale monte sur Maduro, l'aide toujours bloquée)


"Pas plus de cadavres"

A l'entrée de la morgue municipale de Bello Monte, la principale de la capitale, une forte odeur de putréfaction imprègne l'air. Devant, les familles patientent en attendant de récupérer la dépouille de leur proche. Mais avec la panne électrique qui dure et paralyse les chambres froides, beaucoup redoutent les épidémies. "On ne peut pas recevoir plus de cadavres", affirme un employé sous couvert d'anonymat. Au moins vingt corps ont été déposés au cours des dernières heures.

Le chaos est dû à la panne de la principale centrale hydroélectrique du pays à Guri, dans l'Etat de Bolivar (sud), qui fournit 75% de l'électricité du Venezuela.

"Ca fait deux jours que j'attends le corps de mon fils. Si on ne me le remet par aujourd'hui, je le laisse là et je ne reviens plus. Il pourrira de la même façon qu'au cimetière", déclare, résigné, Luis Moises Guerra, dont le fils Johan a été tué par balles il y a trois jours. "On ne peut pas trouver normal que la moitié des hôpitaux n'aient pas de générateurs et que l'autre moitié peine à recevoir les urgences", a déclaré le chef de l'opposition Juan Guaido, qui s'est proclamé président par intérim le 23 janvier et a été reconnu depuis par une cinquantaine de pays.



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