Un hôpital d’une saleté repoussante, sans chauffage, ni eau chaude, ni générateur d’électricité. Quelque deux cents malades mentaux, toxicomanes ou personnes à besoins spécifiques enfermés dans cette prison malodorante, privés de médicaments, de soins convenables, d’hygiène, de nourriture décente… au point qu’ils dorment sur des matelas sans draps, qu’ils n’ont pas été baignés depuis deux mois, qu’ils sont rongés par les poux. Tel est le quotidien des patients de l’hôpital Fanar, situé à Msayleh au Liban-Sud, cet hôpital privé, construit en 1962 sur la colline de Zahrani par l’ancien ministre de la Santé Abdel Rahmane Labbane, et dont la gestion a été transmise à son épouse et à sa fille, à la mort de ce dernier. Jusqu’à l’alerte lancée par une femme, Hayat Jaber, qui a dévoilé le scandale la semaine dernière, photos à l’appui, un jour où elle apportait aux malades de l’établissement quelques couvertures et provisions pour la saison d’hiver. Les réseaux sociaux ont fait le reste, avisés par l’association Tyeb el-Eid (les habits de la fête).
Les réactions n’ont pas tardé. La télévision al-Jadeed et l’association Legal Agenda se sont rendues sur les lieux, révélant non seulement les flagrantes atteintes aux droits des patients internés dans cet établissement, certains étant quasiment « attachés à leurs lits par des chaînes métalliques », mais aussi le dénuement total d’un « personnel infirmier livré à lui-même, privé de salaire depuis deux ans ». La mauvaise gestion de l’établissement serait la première cause de cette inadmissible réalité. L’hôpital de Msayleh, disent-ils, a « accumulé des dettes d’un milliard sept cent millions de livres libanaises ». Mais l’État est également montré du doigt pour avoir manqué à ses obligations, non seulement de contrôle sanitaire et médical, mais de « non-paiement des subventions dues à l’établissement, et qui s’élèvent à un milliard trois cent millions de livres libanaises ».
Alerté à son tour, le ministre de la Santé Jamal Jabak, qui s’est rendu hier à l’hôpital, a promis que « tous les patients seraient rapidement replacés dans d’autres institutions » et que l’hôpital serait bientôt fermé. Faisant part de sa « colère » et de son « profond dégoût lors de sa visite de ces lieux particulièrement insalubres », il n’a pas manqué d’insister sur la nécessité de « déterminer les responsabilités dans l’affaire ». Une position saluée par l’ancien député Ismaïl Succariyé, particulièrement engagé dans le domaine de la santé, qui a tenu à rappeler « le passé sombre de l’hôpital Fanar, connu pour les mauvais traitements qu’il inflige aux malades », tout en jetant la responsabilité « sur les ministres successifs de la Santé ».
commentaires (11)
On ne peut pas dire qu'au Liban les hôpitaux sont nombreux et que les inspecter serait un travail de titan, à condition de vouloir faire le travail pour lequel ils sont payé. Où sont les inspecteurs payés par le ministère de la santé, (je ne voudrais surtout pas déranger Mr le ministre pendant sa longue sieste)qui ne sont que des fantômes malhonnêtes et inhumains.Comment un corps médical peut travailler dans ces décharges humaines sans dénoncer cette barbarie dans un pays où la technologie a atteint son paroxysme? Honteux mais pas surprenant.
Citoyen
16 h 46, le 19 février 2019