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Liban - Anciens baux commerciaux

Le Conseil constitutionnel rejette le recours en invalidation de la loi de prorogation

La juridiction motive sa décision par le souci d’éviter un vide législatif, tout en exhortant le législateur à « légiférer plutôt qu’à proroger ».

Le Conseil constitutionnel (CC) avait été saisi le 18 décembre par dix députés en vue de faire annuler la loi de prorogation pour un an des anciens loyers non résidentiels adoptée par le Parlement le 30 novembre dernier. Photo ANI

Exhorter le législateur à ne plus proroger des lois exceptionnelles comme la loi régissant les anciens baux commerciaux, le pousser au contraire à élaborer un nouveau texte qui stabiliserait les relations des propriétaires et des locataires et établirait une meilleure justice entre eux. Voici l’essence de la décision rendue hier par le Conseil constitutionnel (CC) qui a été saisi le 18 décembre par dix députés en vue de faire annuler la loi de prorogation pour un an des anciens loyers non résidentiels adoptée par le Parlement le 30 novembre dernier. L’instance judiciaire a dû rejeter le recours des parlementaires Paula Yacoubian, Adnane Traboulsi, Ziad Assouad, Salim Khoury, Jean Talouzian, Nicolas Nahas, Fayez Ghosn, Georges Atallah, Ali Darwiche et Assaad Dargham en s’abstenant de prononcer l’inconstitutionnalité de la loi pour ne pas tomber dans un vide législatif et favoriser ainsi l’application du code des obligations et des contrats (COC), dont les dispositions édictent une liberté contractuelle totale. Elle a toutefois déploré que « les prolongations successives de cette loi d’exception consacrent un fait accompli et une instabilité, et ne font que reporter l’introduction, à travers une nouvelle loi, de solutions aux problèmes qui opposent bailleurs et locataires ». « La prorogation répétée d’une loi datant de plus de 70 ans conduit à une injustice sociale, puisqu’elle consolide l’inégalité entre les droits des propriétaires et ceux des locataires », a indiqué le CC dans le dispositif de son jugement.Un constitutionnaliste proche du dossier note pour L’Orient-Le Jour qu’ en ne prononçant pas l’annulation de la loi de prorogation, le CC a voulu être prudent, d’autant qu’en l’absence d’une nouvelle législation, cette annulation aurait entraîné un vide juridique dans le domaine des baux commerciaux et aurait donc imposé l’application plus large du code des obligations et des contrats, sans tenir compte de la situation difficile des locataires dans la conjoncture économique actuelle. Ce qui aurait conduit « à un chaos dont les résultats auraient été catastrophiques aux plans des problèmes juridiques et des conflits judiciaires », selon les termes mêmes de la décision du Conseil constitutionnel, signée par ses président et vice-président, respectivement Issam Sleiman et Tarek Ziadé, et par ses membres Antoine Messarra, Mohammad Mortada, Salah Moukheiber, Souheil Abdel Samad, Toufic Soubra, Zaghloul Attiyé, Ahmad Takieddine, sachant que le dixième membre, Antoine Khair, se trouve actuellement à l’étranger.

Le constitutionnaliste précité estime qu’« à travers son jugement, plutôt que de favoriser cette liberté contractuelle édictée par le COC, le Conseil constitutionnel a voulu donner la chance de faire adopter plus tard, c’est-à-dire dès que la situation économique le permet, une loi graduelle, à l’instar de la loi sur les loyers (2014) libéralisant de manière progressive les baux résidentiels antérieurs à 1992 ». « Une loi similaire pourrait corriger les violations à l’encontre de la propriété individuelle, de la liberté contractuelle et de l’équilibre des contrats », estime l’homme de loi, notant par ailleurs que la décision rendue hier par le CC « pourrait constituer l’année prochaine une référence en faveur de l’abandon de la prorogation, laquelle illustre une mentalité de report et de manque de sérieux ».


Les anciens propriétaires mécontents

Le facteur de circonstances exceptionnelles pris en considération par le CC pour justifier le rejet du recours en invalidation ne semble pas avoir convaincu le syndicat des propriétaires de biens-fonds loués. « La décision du Conseil constitutionnel ne tient nullement compte des principes de justice, d’égalité et d’équilibre entre les citoyens. Elle foule aux pieds les droits des anciens propriétaires en faveur des anciens locataires qui, eux, profitent de l’absence de législations adéquates et du principe anticonstitutionnel de prorogation », indique un communiqué du syndicat, regrettant que « les anciens locataires bénéficient de loyers quasi gratuits, à l’heure où la commission de l’Administration et de la Justice ne remplit pas son rôle consistant à élaborer une nouvelle loi qui restituerait leurs droits aux anciens propriétaires ». Propos dont s’étonne le constitutionnaliste précité qui affirme qu’« une telle décision est au contraire en faveur des anciens propriétaires puisque, en l’absence d’une loi spécifique, les juges qui seraient saisis des litiges n’admettront pas d’appliquer les dispositions du COC, préférant attendre une nouvelle loi spéciale dont la date d’élaboration et d’adoption est au demeurant inconnue ».


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