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Moyen Orient et Monde - Crise du Golfe

Malgré l’affaire Khashoggi, pas de rapprochement Arabie-Qatar en perspective

Les tensions sont un peu plus exacerbées entre les pays du Golfe, alors que Riyad et ses alliés maintiennent fermement le blocus contre Doha depuis juin 2017.

Les leaders du Conseil de cooperation du Golfe avant le sommet dimanche à Riyad. Bandar Algaloud/Courtesy of Saudi Royal Court/Handout via Reuters

Alors que les pressions se sont accentuées depuis l’affaire Jamal Khashoggi pour résoudre la crise du Golfe, l’émir du Qatar était aux abonnés absents dimanche dernier lors du 39e sommet du Conseil de coopération du Golfe. Si certains observateurs avaient souligné la possibilité d’un début de désamorçage de la crise lors de ce sommet, le message envoyé dimanche par la décision de cheikh Tamim ben Hamad al-Thani indique clairement l’inverse. Dans un contexte où le royaume wahhabite maintient fermement le blocus contre Doha depuis 2017, « il était difficile d’imaginer que l’émir irait à Riyad et serrerait la main de Mohammad ben Salmane, du roi Salmane ou de Mohammad ben Rachid (le vice-président des Émirats arabes unis », explique à L’Orient-Le Jour Andreas Krieg, professeur au King’s College de Londres et ex-conseiller de l’armée qatarie. « Les signaux envoyés par l’Arabie saoudite au Qatar ces derniers mois et surtout ces dernières semaines ont été négatifs alors que de nouvelles accusations ont été proférées et de fausses informations diffusées sur le Qatar comme étant impliqué dans le terrorisme », ajoute-t-il.

Depuis juin 2017, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et Bahreïn ont rompu leurs relations diplomatiques avec Doha, accusé notamment de financer le « terrorisme » et d’entretenir des liens trop étroits avec Téhéran. Mis sous pression par Washington, « MBS voulait utiliser ce sommet pour signaler à l’administration Trump qu’il est un médiateur sérieux, qu’il peut réunir toutes les parties du CCG et qu’il veut unir et non diviser », poursuit-il. En mai dernier, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo avait souligné lors d’un appel téléphonique avec le ministre qatari des Affaires étrangères que « le président (Trump) désire voir la crise du Golfe calmée et éventuellement résolue, alors qu’elle bénéficie à l’Iran ». Un peu plus tôt en avril, M. Pompeo avait effectué le déplacement à Riyad où il avait appelé les Saoudiens à mettre un terme au blocus. Sans succès.

L’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi dans le consulat de son pays à Istanbul le 2 octobre dernier a toutefois relancé les pressions sur Riyad pour faire rentrer le royaume dans le rang voulu par Washington. Une stratégie qui a fait ses preuves dans le cadre des pourparlers de paix au Yémen, où Riyad et Abou Dhabi mènent une coalition aux côtés du président yéménite Abed Rabbo Mansour Hadi. Pour la première fois depuis 2016, les belligérants ont accepté de se réunir la semaine dernière en Suède pour des consultations et ont annoncé être prêts à se réunir de nouveau en 2019. En revanche, l’absence de l’émir qatari à Riyad montre que les négociations pour résoudre la crise du Golfe sont quant à elle toujours au point mort.


(Lire aussi : Affaire Khashoggi: Riyad refuse d'extrader en Turquie des suspects saoudiens)


Embarrasser l’émir

Selon l’agence de presse du Qatar, cheikh Tamim avait reçu une lettre d’invitation de la part du roi saoudien Salmane pour assister à la conférence annuelle devant se tenir cette année à Riyad. Malgré les rumeurs, c’est finalement le secrétaire d’État aux Affaires étrangères, Sultan al-Merrikhi, qui a fait acte de présence au sommet pour représenter le petit émirat. Alors que le sommet devait d’abord se dérouler à Oman, « il y avait une peur qu’ils (les États participant au blocus) abusent et exploitent ce sommet pour embarrasser l’émir en Arabie saoudite », précise l’expert.

La décision du leader qatari de ne pas se rendre à Riyad a été fustigée par ses voisins alors que le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn, Khaled ben Ahmad al-Khalifa, a estimé sur son compte Twitter qu’« il aurait été préférable pour l’émir du Qatar d’accepter la sérieuse invitation et de participer au sommet ». « Le Qatar peut prendre ses propres décisions et a assisté au sommet du Koweït (de 2017) alors que les dirigeants des pays qui boycottent (le Qatar) n’ont pas participé », a rétorqué Ahmzd ben Saïd al-Rumaïhi, le directeur du bureau d’informations du ministère qatari des Affaires étrangères. L’année dernière, Bahreïn avait envoyé son vice-Premier ministre au sommet du CCG se déroulant au Koweït, tandis que l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis étaient représentés par leurs ministres d’État aux Affaires étrangères. Cheikh Tamim avait pour sa part effectué le déplacement.


(Pour mémoire : Un proche de MBS accusé d'avoir supervisé des actes de torture)


Menace pour l’unité

Créé en 1981, le CCG est une alliance politico-économique qui regroupe les six pétromonarchies du Golfe, à savoir l’Arabie saoudite, Oman, Bahreïn, les EAU et le Qatar. L’objectif de l’organisation est notamment de maintenir un front stable dans la région tout en assurant une coopération entre les « frères » du Golfe dans les domaines économique, sécuritaire et militaire. Dans son discours d’ouverture, l’émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmad, a souligné que « l’obstacle le plus dangereux auquel nous sommes confrontés est la lutte au sein du CCG », précisant que celle-ci constituait une « menace pour l’unité de notre position et pour les intérêts de notre peuple ».

Signe que les tensions ne sont pas prêtes de décroître, la crise n’a pas été discutée durant la réunion et aucune mention du blocus n’a été faite dans le communiqué final après le sommet du CCG. De façon presque provocatrice, le texte souligne la « volonté (des dirigeants) de maintenir la force et la cohésion du CCG, ainsi que l’unité de ses membres, en raison de leurs relations privilégiées et de leurs caractéristiques communes fondées sur la foi islamique, la culture arabe, une longue histoire, ainsi que l’unité des objectifs qui lient leurs nations ».



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Alors que les pressions se sont accentuées depuis l’affaire Jamal Khashoggi pour résoudre la crise du Golfe, l’émir du Qatar était aux abonnés absents dimanche dernier lors du 39e sommet du Conseil de coopération du Golfe. Si certains observateurs avaient souligné la possibilité d’un début de désamorçage de la crise lors de ce sommet, le message envoyé dimanche par la décision...

commentaires (3)

"Créé en 1981, le CCG est une alliance politico-économique qui regroupe les six pétromonarchies du Golfe, à savoir l’Arabie saoudite, Oman, Bahreïn, les EAU et le Qatar" Vous avez oublié le Kuwait!

Fady Challita

14 h 50, le 12 décembre 2018

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Commentaires (3)

  • "Créé en 1981, le CCG est une alliance politico-économique qui regroupe les six pétromonarchies du Golfe, à savoir l’Arabie saoudite, Oman, Bahreïn, les EAU et le Qatar" Vous avez oublié le Kuwait!

    Fady Challita

    14 h 50, le 12 décembre 2018

  • LE CHEF DU QATAR A COMMIS UNE GRAVE ERREUR EN NE SE RENDANT PAS A CETTE REUNION QUI AURAIT OUVERT LES PORTES DE LA NORMALISATION !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 18, le 11 décembre 2018

  • Je ne comprends pas la logique de ce titre. Il ne veut rien dire pour cette rencontre du RIEN néant.

    FRIK-A-FRAK

    00 h 39, le 11 décembre 2018

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