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Liban - Liban

Disparus : les espoirs des familles convergent vers une possible adoption d’une loi aujourd’hui

Le Comité des familles des disparus et kidnappés au Liban observera aujourd’hui un sit-in place de l’Étoile, pour faire pression sur les parlementaires.

Les familles des disparus se dirigeant vers le Parlement, lors d’un sit-in organisé le 30 août à l’occasion de la Journée internationale des victimes de disparition forcée. Photo d’archives/Marwan Assaf

Les parents des personnes disparues en Syrie et au Liban fondent tous leurs espoirs sur la séance législative de nécessité qui s’est ouverte hier et qui pourrait enfin mettre fin à leur longue attente. À juste titre, puisque la proposition de loi sur les personnes victimes de disparition forcée figure à l’ordre du jour de cette séance qui se poursuit aujourd’hui encore… Un document qui constitue toutefois le dernier point de l’agenda (article 29).

« Au rythme où vont les débats, il se peut que ce point soit reporté à la nouvelle séance plénière », déplore Wadad Halaouani, présidente du Comité des familles des disparus et kidnappés au Liban. Hier, le Parlement avait voté cinq articles de l’ordre du jour. « Mais je ne veux pas perdre espoir », confie-t-elle à L’Orient-Le Jour, annonçant que parallèlement à la tenue de la séance législative, un sit-in sera observé aujourd’hui dès 10h30 pour pousser les parlementaires à voter la loi. Les manifestants se dirigeront de Riad el-Solh vers la place de l’Étoile. Hier également, le Comité des familles des disparus et kidnappés au Liban a observé un sit-in. Les manifestants ont insisté sur leur « droit à connaître la vérité ».

La proposition de loi sur les personnes victimes de disparition forcée est, rappelons-le, une fusion de deux textes, l’un présenté par Hikmat Dib, député du bloc Aoun, et l’autre par Ziad Kadri, ex-député du groupe parlementaire du Futur, et Ghassan Moukheiber, ex-député du bloc du Changement et de la Réforme (bloc aouniste). Il comprend trois volets principaux : la création d’une instance nationale qui sera chargée de régler la question des disparus ; la garantie des droits fondamentaux des familles des disparus (accès à l’information, à la protection…) et les procédures à appliquer pour l’exhumation des dépouilles.


(Lire aussi : Les disparus, grands oubliés du Liban)


Une loi à caractère humanitaire
« C’est une loi à caractère humanitaire et non pénale, explique à L’Orient-Le Jour M. Moukheiber. Elle tend à donner aux familles le droit de connaître le sort de leurs disparus, d’aider à libérer les personnes en vie, sinon de restituer aux familles les dépouilles mortelles. Ce n’est pas une instance de justice, parce que cette autorité nationale (la commission) n’a pas de compétence de poursuivre les criminels de guerre ni d’instruire des dossiers de crime de disparition forcée. »

M. Moukheiber souligne en outre qu’en votant cette loi, « on aurait créé un outil de travail politique qui doit être matérialisé par la nomination des membres de cette commission et par l’octroi des moyens financiers pour que celle-ci entame son travail ». La commission comptera dix membres : deux anciens magistrats, deux spécialistes en droit pénal et en droit de l’homme nommés par les barreaux de Beyrouth et de Tripoli, un professeur universitaire spécialisé en droits de l’homme et en libertés publiques, un médecin légiste, deux membres représentants des associations des droits de l’homme et deux membres représentants des associations des familles de disparus. « C’est une représentation variée qui ne peut pas être politisée, insiste M. Moukheiber. Les nominations se font en Conseil des ministres, mais sur proposition d’autorités indépendantes. » Et d’ajouter : « Le vote de la loi est un important jalon sur un long et lent chemin. »


(Pour mémoire : Coup d’envoi d’une série de rassemblements pour sensibiliser à la cause des disparus)


Pétition nationale
Pour l’ancien parlementaire, « il n’y a pas de raisons pour que la proposition de loi ne passe pas ». « Le texte a nécessité plusieurs années de travail, en coopération avec Ghazi Aad (porte-parole décédé de Solide – Soutien aux Libanais en détention et en exil) et Wadad Halaouani, note-t-il. Le texte a été passé au crible par toutes les instances de l’État et des associations locales et internationales. Il est bien ficelé et a obtenu un aval politique autant que juridique. J’espère qu’il verra le jour. » Il a en outre déploré le fait que « le Parlement n’ait pas soumis au débat la pétition nationale qui lui a été présentée », il y a quelques mois par le Comité des familles des disparus et kidnappés au Liban. Cette pétition qui avait récolté des milliers de signatures appelle au vote de la proposition de loi sur les victimes de disparition forcée, comme à l’approbation en Conseil des ministres de la proposition du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour la formation d’une banque d’ADN qui permettra d’identifier les restes humains. Le CICR avait déjà commencé, il y a plus de deux ans, la collecte des échantillons biologiques de référence des membres de ces familles, c’est-à-dire la salive. À ce jour, il a réuni 1 266 échantillons des familles de 609 personnes disparues.

« C’est la première fois dans l’histoire de la République libanaise qu’une pétition nationale est soumise au Parlement, reprend M. Moukheiber. Les parlementaires ont palabré pendant plus d’une heure sans débattre de cette pétition. Cela est inacceptable. »


(Pour mémoire : Liban : Quand des disparus entrent en campagne)


Lettre ouverte…
Avant l’ouverture de la séance de législation de nécessité, Wadad Halaouani a remis aux parlementaires une lettre ouverte les appelant à « mettre un terme aux souffrances des familles » qui durent, pour certains, depuis plus de 40 ans. Dans ce document, le comité appelle les parlementaires à « oublier la communauté et la région auxquelles ils appartiennent et le parti auquel ils sont affiliés ». « Agissez en tant qu’êtres humains, en tant qu’hommes et femmes dont le père, le fils, le mari, le frère… est disparu », insiste le comité.

Il souligne que le vote de cette proposition de loi devrait « mettre fin aux souffrances des familles qui ont trop duré ». Et d’exhorter les parlementaires à « voter le texte à l’unanimité et en un seul article ».

Par ailleurs, la directrice du Programme Moyen-Orient à Amnesty International, Lynn Maalouf, a estimé que le fait d’inclure la proposition de loi sur les personnes victimes de disparition forcée à l’ordre du jour de la séance de législation de nécessité constitue « une démarche juste tant attendue ». Dans un communiqué, elle a appelé les parlementaires à voter la loi, ce qui constituera « la première reconnaissance nationale » d’une revendication qui dure depuis plus de trente ans. « L’approbation de ce texte sera un premier pas dans la bonne direction, a poursuivi Mme Maalouf. C’est une démarche susceptible de rendre justice dans le dossier de la guerre libanaise (…) et de donner une lueur d’espoir à des milliers de familles. »


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