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Nos Lecteurs ont la Parole - Élie HANNA

Rafic Hariri et Hassan Nasrallah vus par Raymond Eddé

J’ai eu la chance et le privilège de nouer de bonnes relations avec Raymond Eddé à partir de 1995 et jusqu’au bout.

À chacune de mes trois ou autres visites annuelles à Paris, je lui apportais de Genève son médicament préféré contre la migraine. Il s’agissait du Siridon, qu’il ne trouvait pas en France. Et lui, il m’invitait à déjeuner, souvent dans une brasserie rue Marbeuf où il avait ses habitudes. Il avait gardé de sa vie mondaine beyrouthine une tendance à déjeuner tard, vers 14h.

Nous nous promenions à pied. Au sortir de son lieu d’exil, quand le feu passait au rouge, il prenait un malin plaisir à traverser la rue, en se faufilant entre les automobiles, comme il les appelait à l’ancienne. Il me disait, en riant, que c’était la seule occasion pour lui d’enfreindre les lois françaises. À chaque fois, je faisais comme si j’entendais sa bonne blague pour la première fois.

Au restaurant, il prenait naturellement la place dos au mur, pour avoir une belle vue sur la salle. En cas de tentative d’assassinat, m’a-t-il expliqué au premier déjeuner, il préférerait qu’on lui tire dessus de face. En réalité, il aimait, comme tout le monde, voir et être vu.

Une fois, avant de sortir déjeuner, il me fit remarquer que, par respect à son égard, j’étais assis sur le bord du canapé, alors que lui était assis, taille haute, bien adossé dans son fauteuil, les bras reposant fièrement sur les accoudoirs. Il me sortit à ce moment-là de son porte-document une coupure du journal, qui était une photo du président martyr Hariri, en tête-à-tête avec le président des États-Unis alors en fonction, Bill Clinton. Hariri assis pleinement dans son fauteuil, et Clinton qui parlait avec ses mains à l’italienne, sur le bord de son siège. Et le Amid d’en conclure : les Américains respectaient Hariri.

Raymond Eddé appréciait et aimait énormément le président Hariri. Il lui faisait confiance. La dette de 10 ou 12 milliards à l’époque ne l’inquiétait pas. Heureusement qu’il n’a pas eu à subir le chagrin de notre grande perte du 14 février 2005, puisqu’il était décédé avant.

Un jour, en septembre 1997, il m’avait sorti de son porte-document une autre coupure de presse, une photo également. On y voyait sayyed Hassan Nasrallah debout, en train de recevoir les félicitations pour la mort en martyr de son fils aîné, Hadi, à 18 ans, sous une grande photo du jeune homme abattu, la veille, par l’armée d’occupation israélienne.

Malgré la tragédie qui le frappait, le sayyed avait un visage lumineux et accueillant sur la photo, affichant un large sourire. Le Amid avait commenté « qu’avec un chef comme lui, les chiites ne seront plus opprimés dorénavant », en référence au qualificatif utilisé par l’imam Moussa Sadr. Il avait vu juste.

Raymond Eddé devina très tôt le potentiel de l’incroyable force de caractère du sayyed.

Ma mémoire me trahit pour pouvoir rapporter fidèlement plus de paroles de Raymond Eddé sur Hassan Nasrallah en ce jour-là. Hélas, le Amid a disparu en mai 2000, quelques semaines avant la libération du Liban-Sud par al-sayyed.

21 ans après le départ de son fils, jour pour jour, le héros légendaire de la résistance libanaise nous a démontré hier à la télévision qu’il était aussi un homme. Hadi devait lui manquer.

Élie HANNA

J’ai eu la chance et le privilège de nouer de bonnes relations avec Raymond Eddé à partir de 1995 et jusqu’au bout. À chacune de mes trois ou autres visites annuelles à Paris, je lui apportais de Genève son médicament préféré contre la migraine. Il s’agissait du Siridon, qu’il ne trouvait pas en France. Et lui, il m’invitait à déjeuner, souvent dans une brasserie rue Marbeuf...

commentaires (1)

A comparer l'incomparable on déduit l'ineffable

Wlek Sanferlou

23 h 13, le 17 septembre 2018

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Commentaires (1)

  • A comparer l'incomparable on déduit l'ineffable

    Wlek Sanferlou

    23 h 13, le 17 septembre 2018

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