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À La Une - Liban

Réfugiés syriens : face à Merkel, Aoun et Hariri affichent leurs discordances

Le chef de l'Etat veut dissocier le dossier des réfugiés d'une solution politique en Syrie, alors que le Premier ministre, comme la chancelière, insiste sur la nécessité d'un règlement.

La chancelière allemande Angela Merkel et le président libanais Michel Aoun, le 22 juin 2018. Photo Dalati et Nohra

Le président libanais Michel Aoun et le Premier ministre sortant Saad Hariri, qui ont tous deux reçu la chancelière allemande Angela Merkel en visite officielle au Liban, ont affiché vendredi leurs divergences sur le dossier des réfugiés syriens.

Selon notre correspondante à Baabda, Hoda Chedid, le chef de l'Etat, qui a reçu au palais de Baabda Mme Merkel,a demandé à Berlin de "soutenir la position du Liban appelant au retour progressif des déplacés syriens dans des zones sûres" dans leur pays, insistant sur "la nécessité de dissocier leur retour d'une solution politique en Syrie qui pourrait tarder à venir".

"Si un règlement tarde à venir et que les rapports de forces changent, qui peut garantir le retour des déplacés", a souligné le chef de l'Etat à la chancelière allemande, rappelant que "le Liban a déjà souffert de deux crises, la crise chypriote qui n'a toujours pas été réglée depuis 40 ans et la crise palestinienne qui dure depuis 70 ans et qui attend une solution politique".

Selon la présidence libanaise, Mme Merkel a dit comprendre la position du Liban, soulignant qu'une solution politique en Syrie contribuerait à régler rapidement le dossier des réfugiés. Les deux responsables n'ont pas fait de déclarations à l'issue de leur entretien, qui a duré un peu moins d'une heure.

Baabda était la dernière étape de la visite de Mme Merkel, arrivée jeudi soir et qui a rencontré à deux reprises le Premier ministre désigné Saad Hariri. Lors d'une conférence de presse avec la responsable allemande, ce dernier a affirmé avoir "répété à la chancelière que la seule solution permanente (à la crise des réfugiés syriens) consiste en un retour digne et sûr des déplacés syriens vers la Syrie", soulignant qu'une solution politique à la crise syrienne était nécessaire. Saad Hariri et Angela Merkel ont tous deux insisté sur le fait que tout retour des réfugiés syriens chez eux devrait être "sécurisé".

"La visite de la chancelière allemande au Liban en cette phase délicate est un signe de l'importance qu'accorde l'Allemagne à la stabilité politique et économique du Liban, et c'est une occasion pour renforcer les liens bilatéraux historiques", a ajouté M. Hariri.


(Lire aussi : La coopération économique au cœur de la visite de Merkel à Beyrouth)


"Solution politique" en Syrie
Même son de cloche de la part d'Angela Merkel : "Nous œuvrons pour une solution politique en Syrie qui puisse permettre un retour des réfugiés chez eux. Ce retour doit avoir lieu lorsque les conditions sécuritaires requises seront assurées", a-t-elle insisté. "Le Liban passe par des circonstances difficiles et est un exemple de vivre-ensemble pour le monde. Il faut soutenir le Liban car l'accueil des réfugiés est difficile pour un tel pays. J'ai dit aux responsables que la solution consiste en une coopération avec les organisations onusiennes pour obtenir un accord", a-t-elle ajouté.

La visite de Mme Merkel, qui a quitté Beyrouth en fin d'après-midi, est intervenue alors que le chef de la diplomatie libanaise, Gebran Bassil, est en conflit ouvert avec le Haut commissariat pour les réfugiés (HCR) qu'il accuse d'entraver le retour volontaire des réfugiés syriens dans leur pays. Il a gelé la semaine dernière les procédures de renouvellement des permis de séjour des employés du HCR, lequel estime que tout retour en Syrie est prématuré, mais ne s'oppose pas à des retours volontaires.

Le Liban accueille près de 1,5 million de réfugiés syriens, dont près d'un million inscrits auprès du HCR. Ils ont fui la guerre qui ravage la Syrie depuis 2011. Les responsables libanais, notamment le président de la République et le chef de la diplomatie, appellent depuis plusieurs mois à organiser leur retour vers des zones sûres contrôlées par le régime syrien.

En réponses aux questions des journalistes, Saad Hariri a expliqué que "la question des déplacés est d'ordre humanitaire. Le Liban a le devoir d'accueillir ces déplacés, en attendant leur retour chez eux. S'il ne le fait pas, le Liban et le monde auront perdu leur humanité.  (...) Mais les Libanais ne peuvent pas supporter ce grand nombre de déplacés sans une croissance économique. C'est pour cela que les efforts sont axés sur cette croissance. En tant que responsables et en tant qu'Etat, nous avons un devoir humanitaire. Mais nous restons attachés à un retour rapide des déplacés, un retour sécurisé. Mais nous n'allons pas leur tourner notre dos".

Interrogé par une journaliste sur les craintes d'une implantation des réfugiés syriens, M. Hariri s'est voulu rassurant : "Les appréhensions des Libanais trouvent leur réponse dans la Constitution qui interdit l'implantation. Il n'y a pas eu d'implantation des réfugiés palestiniens, et cela n'arrivera pas avec les déplacés syriens", a-t-il affirmé.

M. Hariri a dans ce contexte remercié Berlin "pour son soutien humanitaire qui vise à alléger le poids de la crise des déplacés syriens", mais a fait savoir qu'il y a un "besoin d'augmenter ces aides humanitaires essentielles de manière continue et globale, de sorte à ce que ces aides ne soient pas uniquement destinées aux déplacés, mais également aux pays qui les accueillent", tel que le Liban.


Soutien et aide au Liban
Sur un autre plan, le Premier ministre libanais a de nouveau assuré à Mme Merkel "que le gouvernement libanais s'engage à effectuer toutes les réformes prévues par la conférence CEDRE" qui s'est tenue en France en avril dernier et qui prévoit un soutien international au Liban. "J'ai insisté sur l'importance des mécanismes de contrôle que la communauté internationale doit mettre en place, de sorte à ce que l'Allemagne fasse partie de la commission chargée du suivi de cette question".

M. Hariri a également expliqué qu'il a "discuté avec la chancelière allemande du rôle que Berlin peut jouer, notamment en aidant le Liban à appliquer les engagements qu'il a pris lors de la conférence de Bruxelles 2 (sur les réfugiés), notamment la lutte contre la pauvreté au Liban et le soutien stratégique à l'enseignement national technique".

Le Premier ministre libanais a enfin "assuré à Mme Merkel que le Liban reste engagé à respecter la résolution 1701 (du Conseil de sécurité de l'ONU)" et a remercié la chancelière pour la participation de l'Allemagne à la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) et le soutien de Berlin au Tribunal spécial pour le Liban qui juge les assassins de l'ex-Premier ministre Rafic Hariri, tué dans un attentat en 2005.

Angela Merkel a pour sa part souligné que la conférence de CEDRE "assure un bon cadre de coopération". "Notre objectif est de renforcer les relations germano-libanaises, et l'Allemagne va contribuer aux réformes structurelles que le Liban s'est engagé à mener à l'issue des conférences internationales, notamment CEDRE. L'Allemagne s'est engagée à aider et soutenir le Liban".

En fin de matinée, Angela Merkel avait été reçue à Aïn el-Tiné par le président du Parlement, Nabih Berry, et s'était rendue dans une école à Ras Beyrouth.



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commentaires (9)

Du coté positif, Merkel elle a parlé quand-méme 3 réprésentants Hariri, Aoun et Berry; donc c'est déjà équilibré sauf qu'il faudrait aussi aller parler avec les arméniens, les druzes, les grecque-orthodoxes, assyriens etc. qui vivent au Liban pour soutenir "les" positions du Liban (plusieurs positions, non pas soutenir singulier "la" position comme Aoun a dit) c'est qu'il y a plusieurs positions au Liban.

Stes David

21 h 28, le 22 juin 2018

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Commentaires (9)

  • Du coté positif, Merkel elle a parlé quand-méme 3 réprésentants Hariri, Aoun et Berry; donc c'est déjà équilibré sauf qu'il faudrait aussi aller parler avec les arméniens, les druzes, les grecque-orthodoxes, assyriens etc. qui vivent au Liban pour soutenir "les" positions du Liban (plusieurs positions, non pas soutenir singulier "la" position comme Aoun a dit) c'est qu'il y a plusieurs positions au Liban.

    Stes David

    21 h 28, le 22 juin 2018

  • LA DEMAGOGIE EST MAUVAISE ! DEMANDEZ A ASSAD DE DECLARER QU,IL EST PRET A RECEVOIR TOUS LES REFUGIES A DAMAS ET LES GRANDES VILLES ET VILLAGES SOUS LA DOMINATION DU REGIME ET D,ANNONCER UNE AMNISTIE GENERALE CONTROLEE ET GARANTIE PAR LES NATIONS UNIES POUR LE RETOUR DE CES GENS. IL NE LE FERA PAS ! ALORS ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    18 h 25, le 22 juin 2018

  • Pour une fois, je suis entièrement d'accord avec le président Michel Aoun. Le Liban n'est pas concerné par un règlement politique en Syrie. La superficie des terres libérées par le régime et ses alliés en Syrie dépasse plus de cinq fois la surface totale du Liban. Personne ne nous a consultés pour nous envoyer ses réfugiés, nous ne consultons personne ni Merkel ni autres Assad pour le retour des déplacés syriens chez eux. Le problème coréen dure depuis 68 ans, le problème palestiniens depuis 70 ans, le problème chypriote depuis 44 ans. Si l'Etat libanais accepte d'attendre la solution du problème syrien, il n'y aurait plus aucun non-musulmans au Liban.

    Un Libanais

    18 h 15, le 22 juin 2018

  • MALHEUREUSEMENT C,EST LA VERITE QUE LA DEMAGOGIE DE CHEZ NOUS FAIT SEMBLANT DE DENIER POUR SES BESOINS POLITIQUES UNIQUEMENT ! CONCENTRONS-NOUS ET RECLAMONS AU MONDE ET SURTOUT AUX GRANDES PUISSANCES CONCERNEES DE NOUS AIDER REELLEMENT ECONOMIQUEMENT A SUPPORTER CE FARDEAU JUSQUE... JUSQUE QUAND ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 56, le 22 juin 2018

  • Le taux de naissance chez nos chers réfugiés "déplacés" syriens fera qu'à la prochaine visite Merkel, si visite il y aura, elle discutera avec le leader de ces syriens pour résoudre le problème de nous, réfugiés libanais, sur notre terre ancestrale...

    Wlek Sanferlou

    16 h 17, le 22 juin 2018

  • "...Tout retour des réfugiés syriens doit être sécurisé..." Dites-nous chers Angela Merkel et Saad Hariri, le BIG BOSS de Damas, quand il bombarde et arrose généreusement de produits chimiques ses propres citoyens pour soi-disant éliminer des rebelles (comprenez des opposants) qui se trouvent parmi eux...pense-t-il de "sécuriser" les innocents civils qui ont le malheur de se trouver parmi eux ? Chère Madame Merkel, et tant que bonne citoyenne allemande, avez-vous seulement une toute petite idée de ce qui se passe vraiment dans notre région, et connaissez-vous ne serait-ce qu'un tout petit peu la mentalité des gens d'ici, du plus haut responsable au plus petit citoyen ? Dans de telles situations, les dollars ou les euros ne peuvent pas tout résoudre...juste remplir les poches de beaucoup ! Irène Saïd

    Irene Said

    16 h 14, le 22 juin 2018

  • Une façon (polie) claire et nette de nous dire: "Allez vous faire voir...?"

    NAUFAL SORAYA

    15 h 58, le 22 juin 2018

  • Je dirai même mieux Mme Merkel, pour encore mieux sécuriser les réfugiés et les retourner chez eux en Syrie LIBÉRÉE du complot initié par l'occident dont vous faites partie , qu'ils fassent un tour par Berlin ou Munich, et à partir de là, en accord avec les instances internationales qu'ils soient rendus à la Syrie leur mère partrie. Le Liban, Mme Merkel , est incapable , incompétent pour suivre la marche que le bon conseilleur que vous êtes et dont vous n'êtes pas le bon payeur en retour . Gardez vos quelques euros de plus et allégez nous , plus de ces pauvres civils que l'occident a BERNÉ en leur racontant des sornettes , que de vouloir "renflouer" nos caisses. DANKESHÖN FRAU MERKEL.

    FRIK-A-FRAK

    15 h 21, le 22 juin 2018

  • Et quand le retour des réfugiés syriens chez eux va être "sécurisé", à la st Glin glin?

    Antoine Sabbagha

    15 h 12, le 22 juin 2018

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