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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

Concilier la parole de l’analyste avec le discours collectif de l’institution ? (suite)

Comme on l’a déjà vu, Lacan a renversé la perspective de la formation analytique. Son aphorisme « Il n’y a pas de formation de l’analyste, il n’y a que des formations de l’inconscient » donne à l’analyse personnelle toute sa valeur. Le futur analyste y apprend à écouter son propre inconscient : rêves, associations libres, lapsus, actes manqués… autant de formations qui lui permettent de découvrir son inconscient et la vérité qui y est refoulée.

Encore sur le divan, l’universalité de l’inconscient est saisie par le futur analyste et cela contribue à la naissance de son désir d’être analyste. Ainsi, la formation du futur analyste se fait sur le divan, au cours de son analyse personnelle. La sexualité infantile, le refoulement, l’Œdipe, le rêve, etc. sont à sa portée.

Comme on l’a vu la dernière fois, l’analyse ne peut pas être évaluée avant coup, parce que faite avec un analyste renommé dans l’institution. Dans les institutions appartenant à l’Association psychanalytique internationale (IPA), l’analyse est évaluée comme un cursus universitaire où la renommée du didacticien joue le rôle principal. Dans certains cas et de ce fait, l’analyse a beau être ratée, elle sera néanmoins admise. Le nom de l’analyste devient la seule garantie pour admettre un candidat/analyste. De manière annexe, chez les membres de l’institution qui ont un droit de vote pour l’admission d’un candidat, il est difficile de refuser ce candidat quand il a été analysé par un analyste renommé. Et le « renvoi d’ascenseur » est fréquent entre les didacticiens.

Lacan propose que lorsque le candidat/analyste est nommé Analyste de l’école (AE), son analyste peut lui-même être nommé AE. La première version de la Proposition d’octobre 67 donnait toute son importance à cette clause. L’analyste du candidat nommé par le jury d’agrément de l’École freudienne de Paris (EFP) peut être un illustre inconnu, comme il peut ne même pas faire partie de l’EFP. Alors que dans les institutions appartenant à l’IPA, l’analyste du candidat doit faire partie de l’institution en question pour que le candidat soit admis. Toute analyse faite avec des analystes qui n’appartiennent pas à l’institution est refusée par avance.

« À la fin de l’analyse, l’analysant n’a plus d’aide à attendre de personne »
À l’EFP, à quoi tient donc cette nomination subversive ? À l’épreuve de la fin de l’analyse que l’analyste et le candidat/analyste traversent. Cette épreuve, faite de « destitution subjective » pour l’analysant et de « désêtre » pour l’analyste, de « détresse absolue » et de « subjectivation de la mort ou de « seconde mort », amène le futur analyste à « ne plus attendre d’aide de personne ». D’où le second aphorisme de Lacan : « C’est l’analyse qui fait l’analyste et non l’inverse. » On le constate, cela ne pouvait qu’amener Lacan à la rupture avec l’IPA, tout en craignant de le faire. Le renversement de l’analyse didactique mettait à mal le privilège des didacticiens de l’IPA. Leur renommée n’était plus la clé pour la nomination des analystes et les analyses didactiques qu’ils menaient n’étaient plus garanties d’avance du fait de leurs noms.

Malheureusement, cette clause Lacan ne pourra pas la soutenir dans sa propre école. Il dut la changer et, dans la Proposition (finale) d’octobre 67 cette clause subversive, carrément révolutionnaire, est remplacée par une clause insipide : l’analyste élu au jury d’agrément est nommé AE. En quoi une élection peut amener l’analyste élu à faire partie du jury d’agrément ? La crispation des « barons » de son école et leur refus d’avaliser la première version de la Proposition d’octobre 67 témoigne que la loi du groupe rattrape Lacan avant même la mise en place de la procédure de la passe. L’échec de cette dernière et la dissolution de l’EFP (1980) qui en est la conséquence étaient programmés d’avance. La loi du groupe et la renommée des analystes qui composaient l’EFP finirent par avoir raison de Lacan.



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