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Liban - Électricité

Un Conseil des ministres « chaud » sur fond de controverse autour des navires-centrales

Geagea répond au chef de l’État en lui suggérant le recours à l’arbitrage de la Direction des adjudications.

Le dossier de la production d’électricité était de nouveau sur la table du Conseil des ministres hier. Photo Dalati et Nohra

Pour la troisième fois consécutive, le chef de l’État, Michel Aoun, a parachuté en Conseil des ministres le dossier conflictuel de l’électricité, ressuscitant la polémique qui avait été enterrée durant un certain temps.
Non prévu à l’ordre du jour, ce dossier a été évoqué dès le début de la réunion par M. Aoun, qui a déploré le fait de n’avoir reçu aucun commentaire de la part des ministres présents sur le rapport qu’il avait présenté sur le secteur de l’électricité.

Le 7 mars dernier, le président avait distribué en Conseil des ministres un document qui résume les différents aspects de la crise du secteur de l’électricité dans le pays, pour souligner l’urgence d’y apporter une réponse rapide. Le document insiste en particulier sur la nécessité pour le pays « d’acheter » du courant, le temps de mettre en œuvre les réformes nécessaires pour restructurer le secteur.

Hier, le chef de l’État s’est empressé de souligner qu’il ne faisait pas « la promotion d’un projet quelconque », mais qu’il était « simplement soucieux d’assurer l’électricité aux Libanais ».  Soulignant que le projet des navires-centrales suggéré avait suscité de multiples réactions par le passé, M. Aoun a ajouté : « Je ne dis pas que le Liban est contraint de louer des navires-centrales. Mais personne à ce jour n’a suggéré une solution de rechange. »

Sujet de polémique par excellence depuis près d’un an, la location des navires-centrales, un projet temporaire permettant d’assurer la production d’un complément de courant en attendant la finalisation des usines de production, continue de diviser le gouvernement. L’appel d’offres lancé en 2017 à la demande du Conseil des ministres dans ce cadre a en effet été jugé non conforme par la Direction des adjudications (DDA), tandis que plusieurs voix ont dénoncé un cahier des charges sur mesure favorisant leur location à l’opérateur turc Karadeniz.


(Lire aussi : Hasbani : Le ministère de l’Énergie est resté sourd)


Hier, ce sujet a de nouveau envenimé la réunion, le chef de l’État ayant dénoncé une « tergiversation qui coûte cher aux citoyens et au Trésor ». Le président faisait notamment allusion au front d’opposition constitué par les FL, le PSP, les Marada, Amal et le Hezbollah qui ont critiqué plus ou moins ouvertement l’absence de transparence au niveau de ce marché public. Hier, les ministres FL sont revenus à la charge, rappelant que leur solution consiste à effectuer un appel d’offres transparent avec un cahier des charges qui assure une concurrence loyale, un processus qui devrait être confié, selon eux, à la DDA. Le ministre de l’Énergie, le aouniste César Abi Khalil, a riposté en pointant du doigt « une politique d’obstruction incessante ». « Nous voulons de l’électricité par les moyens les plus rapides et au moindre prix. Nous sommes contraints d’augmenter notre capacité de production pour pouvoir modifier les tarifs », a-t-il dit.

S’en est suivi un échange acerbe entre le ministre des Affaires sociales, Pierre Bou Assi (FL), et M. Abi Khalil, qui s’est demandé si « la DDA était hiérarchiquement supérieure au Conseil des ministres ou l’inverse ». « C’est précisément là où réside tout notre problème », a rétorqué M. Abi Assi, dans une allusion claire au fait que les remarques émises par la DDA n’ont pas été prises en compte. À trois reprises, celle-ci avait renvoyé le dossier au Conseil des ministres en estimant qu’il ne remplissait pas les critères d’une concurrence loyale.

C’est également sur ce point que s’est prononcé par ailleurs le chef des FL, Samir Geagea, qui, dans une réponse adressée au chef de l’État, a rappelé la position de sa formation à ce sujet.   « La solution, Monsieur le Président, consiste à confier à la DDA la tâche d’apporter les modifications nécessaires au cahier des charges établi par EDL et de lancer ensuite un appel d’offres transparent », a dit M. Geagea dans un communiqué, saluant au passage le « professionnalisme et l’efficacité » dont a fait preuve cette institution.

La réponse du ministre de l’Énergie a fusé aussitôt après. « Le cahier des charges a été adopté après avoir reçu l’aval des ministres des FL. Il a été amendé sur leur demande, le dernier amendement ayant eu lieu à Beiteddine le 4 août dernier. Combien de fois faut-il encore l’amender pour qu’on n’ait pas d’électricité ? » s’est interrogé M. Abi Khalil.


(Repère : Électricité au Liban : ce qu'il faut savoir pour comprendre une crise qui va crescendo)


DDA vs/Inspection centrale
La controverse suscitée autour du dossier des navires-centrales avait engendré, la veille, une polémique entre le directeur de la DDA, Jean Aalliyé et le directeur de l’Inspection publique, Georges Attiyé, dont la DDA relève hiérarchiquement.
Selon des informations obtenues auprès d’une source de la DDA, M. Attiyé a ignoré à maintes reprises les demandes formulées par différents médias auprès de la DDA pour obtenir des informations relatives au processus des marchés publics dont celui des navires-centrales. 

« M. Attiyé s’est abstenu de répondre dans un sens comme dans un autre, une attitude qui contrevient à la loi sur le droit d’accès à l’information », précise la source de la DDA qui fait également valoir une violation de la Convention des Nations unies contre la corruption dont le Liban est signataire. Celle-ci prévoit notamment la nécessité de « promouvoir l’intégrité, la responsabilité et la bonne gestion des affaires publiques et des biens publics » et « le droit de révéler au public la manière dont sont gérés les marchés publics », ajoute la source, précisant que l’obligation de confidentialité s’applique uniquement sur les détails des offres présentées et non sur la procédure en tant que telle et les vices qui l’entachent.

« La DDA a une obligation de transparence envers le public qui doit être informé sur la manière dont le marché (des navires-centrales) a été géré dès le début », poursuit la source, avant de conclure : « Face à la politique de manque de transparence, on se demande comment les responsables politiques comptent affronter les pays donateurs à la conférence de CEDRE qui se tiendra à Paris dans quelques semaines et comment ils entendent recouvrer leur crédibilité. »



Pour mémoire

Le président Aoun remet sur la table les navires-centrales

La guerre contre les navires-centrales se poursuit... chez le procureur financier    

Passe d’armes entre Bassil et Khalil sur le dossier de l’électricité

Mise en demeure présidentielle    



Pour la troisième fois consécutive, le chef de l’État, Michel Aoun, a parachuté en Conseil des ministres le dossier conflictuel de l’électricité, ressuscitant la polémique qui avait été enterrée durant un certain temps. Non prévu à l’ordre du jour, ce dossier a été évoqué dès le début de la réunion par M. Aoun, qui a déploré le fait de n’avoir reçu aucun commentaire...

commentaires (6)

Une bonne fois pour toute, disons que l'affaire (car s'en est une) des bateaux flottants générateurs est un scandale, qui ridiculise le Liban le mettant au niveau des pays, sous-sous développés ... En plus il faut supporter le "deal" contractualisé entre certains "boss libanais" et une société plus que douteuse qui vont se faire une fortune sur lié dos des honnêtes citoyens libanais. Aucun doute sur la finalité de ce "deal" ! Une vreaie honte

Sarkis Serge Tateossian

22 h 43, le 28 mars 2018

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Commentaires (6)

  • Une bonne fois pour toute, disons que l'affaire (car s'en est une) des bateaux flottants générateurs est un scandale, qui ridiculise le Liban le mettant au niveau des pays, sous-sous développés ... En plus il faut supporter le "deal" contractualisé entre certains "boss libanais" et une société plus que douteuse qui vont se faire une fortune sur lié dos des honnêtes citoyens libanais. Aucun doute sur la finalité de ce "deal" ! Une vreaie honte

    Sarkis Serge Tateossian

    22 h 43, le 28 mars 2018

  • NOUS CONSTATONS ENCORE UNE FOIS UNE ABSENCE TOTALE DES HÉRAUTS/ADORATEURS DU CPL ET CO... , ANALYSTES DÉCRYPTEURS ET COMMENTATEURS , DES QU'IL S'AGIT DE SUJETS SENSIBLES TELS QUE CELUI-CI.

    Gaby SIOUFI

    16 h 13, le 28 mars 2018

  • Entre la solution de rechange..., la transparence, Karadeniz, ministres successifs de l'Energie Gébran Bassil et César Abi-Khalil, la rengaine est archiconnue. La solution est unique : Construire des centrales électriques comme celles de Zouk et Jiyeh.

    Un Libanais

    11 h 52, le 28 mars 2018

  • LA LATTA OU ON A MANGÉ PRESQUE LA BATTA !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 35, le 28 mars 2018

  • De l'électricité 24/24 oui mais de l'électricité propre pas sous fond de tripatouillage et a un coût exorbitant. Pas besoin d'être un grand économiste pour savoir que d'être propriétaire à long terme d'une centrale coûte moins cher que la location !!Mais c'est vrai que avec une location il y a des possibilités de complément de ressources pour certains

    yves kerlidou

    09 h 07, le 28 mars 2018

  • Incroyable combien ce dossier pue les magouilles! Ceux qui s’empressaient à favoriser le Karadeniz sans appel d’offre à prix faramineux, pris à leur propre jeu lorsqu’ on leur a demandé plus de transparence! Car ils ne pouvaient accepter de rouvrir le dossier avec la DDA, sinon ils seraient débusqués et le scandale éclaterait au grand jour... Donc, ils continuent de ruer dans les brancards, de tergiverser en faisant croire que ces navires-centrales sont indispensables en attendant une solution globale du problème de l’électricité qui semble être à la saint glin-glin! Arrêtez cette comédie, Messieurs et cessez de vous moquer des honnêtes -gens.

    Saliba Nouhad

    03 h 44, le 28 mars 2018

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