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Lifestyle - La mode

L’hommage de Lebnan Mahfouz à Frida Kahlo

Il n’a jamais aimé l’école. En revanche, ce cancre magnifique a toujours été artiste dans l’âme, même si son inspiration d’enfant se limitait aux « Burda » de sa tante couturière et aux costumes de scène de Chantal Goya. Sous son label « Perverse », il continue à explorer les possibilités du noir. Sa nouvelle collection, « Mestizaje », évoque l’univers sombre de Frida Kahlo.

Perverse de Lebnan Mahfouz, collection « Mestizaje ». ©Tarek Moukaddem (Instagram)

« Le noir est la couleur la plus difficile à maîtriser », disait son idole Diana Vreeland qui, pour sa part, n’aimait rien tant que les couleurs les plus vibrantes. Aussi, après avoir roulé sa bosse prématurément de la Turquie à l’Inde, de la Thaïlande à la Chine, Lebnan Mahfouz est revenu au Liban relever ce défi : créer des collections autour de toutes les nuances du noir, en jouant avec les textures. Dès sa première collection, il adopte une stratégie de neutralité sexuelle et prend le parti de réaliser des vêtements fluides, sans structure, qui vont aussi bien aux hommes qu’aux femmes. Réservant sa signature à la haute couture, il donne à son enseigne un nom ciblé, qui va bien au style club wear. Ce sera « Perverse », et le logo sera dessiné en lettres phonétiques et en noir et blanc.

Les réalités du métier
L’année du bac, Lebnan Mahfouz s’était inscrit à Esmod Beyrouth, en stylisme et modélisme, « parce qu’on ne peut pas faire l’un sans l’autre : il faut connaître l’anatomie pour structurer un vêtement ». Il termine avec une mention, il est heureux. Mais c’est le moment où, comme tout jeune diplômé à la veille d’affronter la « vraie » vie, il se sent au bord d’un précipice. Rabih Kayrouz le prend alors en stage et lui enseigne les contraintes du métier. Les folies qu’il pouvait se permettre à l’académie n’ont absolument rien à voir avec la réalité du marché. Le jeune créateur s’assagit et repense ses créations en termes de stratégie. Il poursuivra sa formation chez Élie Saab, à l’atelier de modélisme, puis chez Zuhair Murad
dans le stylisme du prêt-à-porter.

Son tour du monde
Mais son tempérament est incompatible avec un emploi à horaires fixes. Une proposition de travail lui est offerte opportunément dans une usine de robes de soirée en Turquie. Il accepte, tient un an, travaille dur, apprend les arcanes de l’industrie et revient. Il est ensuite engagé par Giacomo Cinque qui fait broder en Inde des caftans de plage. Ce créateur basé à Positano a besoin d’un assistant dans le sous-continent où il séjourne trois mois par an. Le voilà à New Delhi avec son nouveau patron. La découverte de l’Inde est un tournant enchanté dans la vie de Lebnan. Il y apprend de nouvelles techniques, la production d’un vêtement à partir d’un patron et d’un simple échantillon de broderie. À son retour au Liban, une marque de mode spécialisée dans la production de masse, dont les bureaux se trouvent à Bangkok et qui réalise en Chine des vêtements pour le Brésil, lui propose un job similaire à celui qu’il exerçait en Inde. Il part pour Guangzhou où le fabric market lui coupe le souffle. Des tissus à perte de vue. Il sort ses sketchs, choisit des tissus pour chaque dessin. Lebnan part ensuite pour Shantou, sur la mer de Chine méridionale, à 4 heures de train de Guangzhou. Là, il est accueilli par les habitants comme un membre de leur famille. Il vérifie la conformité des produits, rectifie les patrons sur toile, revient à Guangzhou, repart pour Shantou où il fait approuver les échantillons finaux. Cependant, le climat tropical lui pèse, il a besoin des quatre vraies saisons du Liban pour retrouver sa créativité.

Une première collection sous l’égide de Starch
Reçu au sein de la promotion Starch qui aide au développement des jeunes talents, il crée Shadows of my reflection. Cette nouvelle ligne, tout en noir, va défiler à Dubaï. Le soir de l’épreuve, la critique de mode de Vogue Arabia, réputée redoutable, fume une cigarette à l’extérieur, habillée en Missoni. Lebnan fume aussi dans son coin. Elle lui sourit, il lui sourit, il ne sait pas qui elle est, elle se présente, elle l’a vu courir sur le podium à la fin de son show, elle lui dit « Good job » et souligne qu’il n’est pas facile de faire une impression avec une collection toute noire sur un tel défilé. La critique est favorable et la collection est la mieux vendue de Starch en huit ans d’existence. Son style est qualifié de athleisure, comprendre un croisement entre l’univers du sport et celui de la détente.

« Mestizaje », par-delà les races et les cultures
Sa toute nouvelle collection, lancée en février 2018, est baptisée Mestizaje, soit métissage en espagnol. Pourquoi en espagnol ? Parce que Frida Kahlo. Une artiste dont l’univers répond à sa quête esthétique. « Mestizaje, c’est le mélange racial et culturel. Ce mot m’a fait penser à des images de Frida Kahlo. Elle a été mon inspiration (…). Frida a eu une vie pleine et douloureuse, son unique exutoire était la peinture. En observant sa garde-robe, on voit des fleurs et un mélange de couleurs prédominant. Dans ma collection, le noir est ma couleur, et les fleurs sont représentées par la dentelle », précise le jeune créateur. Entre dentelles donc, harnais rappelant les corsets de Frida, silhouettes fluides, vestes déstructurées et sarouels, Lebnan Mahfouz joue avec une belle maîtrise sa propre partition du vestiaire masculin-féminin et réussit à travers ses mille nuances de noir à faire apparaître les couleurs de l’émotion.

« Le noir est la couleur la plus difficile à maîtriser », disait son idole Diana Vreeland qui, pour sa part, n’aimait rien tant que les couleurs les plus vibrantes. Aussi, après avoir roulé sa bosse prématurément de la Turquie à l’Inde, de la Thaïlande à la Chine, Lebnan Mahfouz est revenu au Liban relever ce défi : créer des collections autour de toutes les...

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