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Liban - Liban

Amnistie : au Liban, les islamistes promettent de faire monter la pression

Les autorités libanaises « embarrassées à l’égard de leurs partenaires occidentaux ».

Le cheikh Salem Raféï, s’exprimant lors d’une manifestation à Tripoli.

L’amnistie générale promise à plusieurs catégories de détenus et de personnes recherchées par la justice sera-t-elle accordée avant ou après les législatives libanaises ? C’est la question qui taraude les esprits dans les milieux directement concernés par cette mesure exceptionnelle, avec à leur tête les détenus islamistes qui poursuivaient hier une grève de la faim entamée depuis jeudi dernier. Le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, qui avait reçu lundi des représentants des familles des détenus, a entretenu un peu plus le suspense en déclarant hier que la proclamation du décret d’amnistie générale était « proche », remerciant le Premier ministre Saad Hariri et les ministres du courant du Futur pour les efforts qu’ils ont déployés à cet égard.


Pour certains, les propos de M. Machnouk signifient que l’adoption de ce décret, qui doit toutefois être entériné par une loi votée au Parlement, serait imminent. Pour d’autres, et à la lumière des difficultés politiques et techniques inhérentes à ce dossier, la loi ne pourra pas être adoptée avant les élections, faute de temps tout d’abord, mais aussi par souci d’échapper aux accusations d’opportunisme politique adressées d’ores et déjà aux grandes formations politiques qui chercheraient à en tirer profit auprès de leur base électorale. Ce serait toutefois sans compter avec la détermination des milieux islamistes à aller jusqu’au bout de leur campagne de pression entamée depuis plusieurs semaines et leur promesse de recourir à l’escalade s’ils n’obtiennent pas satisfaction.


Outre la grève de la faim désormais observée par près d’un millier de détenus dans les prisons de Roumieh, Kobbé et Jezzine, les proches des détenus islamistes poursuivent de leur côté un lobbying corsé auprès des responsables politiques pour faire entendre leur voix. Les familles ont tenu hier un sit-in devant le siège du ministère de l’Intérieur à Sanayeh, après qu’une délégation se fut rendue auprès du mufti de la République, Abdellatif Deriane, afin de lui transmettre ses demandes. Le cheikh Salem Raféï, qui s’exprimait en leur nom, a appelé le chef de l’État, Michel Aoun, à signer la loi d’amnistie générale avant les élections législatives prévues le 6 mai. « Votre cause est la nôtre et nous n’accepterons aucune surenchère », a répondu le mufti Deriane.
Assurés de l’aval de la plus haute autorité religieuse, les proches des islamistes affichent jour après jour leur détermination à ne pas lâcher prise en multipliant les visites auprès des officiels, couplées de mouvements de rue et de coupure d’axes routiers.


Pour Mohammad Allouche, analyste politique et spécialiste des mouvements islamistes, leur action s’inscrit dorénavant dans le cadre d’« une stratégie bien réfléchie qui combine l’approche politique à une action sociale et une démarche légale, relayée par les avocats des détenus, la Jamaa islamiya et, dans une certaine mesure, le courant du Futur ».
Selon lui, près de 90 % des détenus croupissent dans les prisons depuis des années sans jugement. « Certains ont été jugés par contumace avant leur arrestation et n’ont jamais eu l’occasion d’être entendus, d’autres attendent toujours de passer devant le juge », dit-il, estimant que ces détenus font l’objet « d’accusations politiques qui n’ont jamais été avalisées par une procédure judiciaire ».

Le Futur pris en tenailles
L’autre problème que pose ce dossier est le fait que les islamistes réclament l’adoption d’une loi d’amnistie générale ne souffrant aucune exception, en référence aux dérogations prévues par le projet de loi pour les crimes de terrorisme et ceux qui ont occasionné des victimes civiles et militaires.


Le président de la République, Michel Aoun, avait assuré le 28 février dernier qu’il « ne signera aucune loi qui amnistierait les détenus condamnés – ou qui seront condamnés – pour avoir tué des soldats libanais ». Un point que contestent les familles et, avec eux, plusieurs dignitaires sunnites qui font valoir une « injustice flagrante sachant que l’armée et le Hezbollah ont agencé l’exfiltration vers la Syrie des combattants de l’État islamique après les combats dans le jurd de Ersal et de Baalbeck, alors que les autorités s’acharnent sur des jeunes dont les crimes contre la troupe ne sont pas prouvés », déplore Salem Raféï.


Ihab el-Banna, un membre du groupe de soutien aux familles des détenus islamistes, affirme qu’ « il n’est pas question de réclamer l’amnistie pour ceux qui ont été pris en flagrant délit, notamment ceux qui ont égorgé des soldats ». Il exhorte les autorités à prendre en considération « les circonstances dans lesquelles certains islamistes ont été poussés à prendre les armes ». « Il est temps de tourner la page et de transcender les blessures des guerres et des conflits qui ont jalonné l’histoire récente du pays, depuis l’assassinat de Rafic Hariri jusqu’à la crise syrienne et ses répercussions au Liban, en passant par les affrontements du 8 mai 2008 », dit-il dans une allusion à peine voilée à l’intervention armée du Hezbollah à Beyrouth, à cette date.


Pour Mohammad Allouche, le courant du Futur est pris en tenailles dans cette affaire. « Quand bien même il réussirait à convaincre ses partenaires politiques du CPL et du Hezbollah de la justesse de cette cause, il va buter contre un obstacle extérieur », dit-il. Sur les 1 300 détenus à amnistier, près de la moitié sont des ressortissants syriens, palestiniens et en provenance des pays du Golfe. Ils sont accusés d’avoir commis des crimes contre des intérêts occidentaux en collaboration avec des Libanais. « Plusieurs d’entre eux ont été arrêtés sur la base d’informations obtenues auprès des services de renseignements américains ou européens. Or ces derniers ne donneront pas facilement le feu vert à leur libération », commente-t-il.


Les autorités libanaises seraient d’autant plus embarrassées à l’égard de leurs partenaires occidentaux qu’elles ont à maintes reprises exploité auprès des puissances étrangères le dossier de la lutte contre le terrorisme sur la base duquel ils ont même réussi à obtenir des aides et un soutien international inconditionnel.


Pour mémoire

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L’amnistie générale promise à plusieurs catégories de détenus et de personnes recherchées par la justice sera-t-elle accordée avant ou après les législatives libanaises ? C’est la question qui taraude les esprits dans les milieux directement concernés par cette mesure exceptionnelle, avec à leur tête les détenus islamistes qui poursuivaient hier une grève de la faim entamée...

commentaires (5)

toujours les mêmes qui jouent les martyrs !! bientôt on va nous dire que ces islamistes, sont des scouts ! ils n'ont rien fait !!! et les politiques les soutiennent , ils disent le Liban d'abord, mais derrière l'arabie saoudite et le sunnitisme avant

Talaat Dominique

18 h 09, le 15 mars 2018

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Commentaires (5)

  • toujours les mêmes qui jouent les martyrs !! bientôt on va nous dire que ces islamistes, sont des scouts ! ils n'ont rien fait !!! et les politiques les soutiennent , ils disent le Liban d'abord, mais derrière l'arabie saoudite et le sunnitisme avant

    Talaat Dominique

    18 h 09, le 15 mars 2018

  • Amnistier des islamistes daéchistes assassins de soldats de l'armée libanaise à Nahr el-Bared tandis que des compatriotes libanais sont condamnés à l'exil en Israél pour avoir résisté au blocus imposé par des hordes palestiniennes et aujourd'hui menacés de lynchage par une milice à la solde de l'étranger... cela est injuste, révoltant, déplorant pour ne pas dire écoeurant et inhumain.

    Un Libanais

    16 h 14, le 15 mars 2018

  • Amnistier des islamistes daéchistes assassins de sold

    Un Libanais

    16 h 04, le 15 mars 2018

  • TANT Q,IL Y A DEUX POIDS ET DEUX MESURES DANS LE PAYS ... LES DANGEREUX ISLAMISTES SOUS LES VERROUX ET LES PLUS DANGEREUX, PLUS QU,ISLAMISTES, SE BALLADANT IMPUNEMENT... IL Y AURA DE LA GROGNE DE LA PART DES PREMIERS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 33, le 15 mars 2018

  • Et si on envisageait plutôt l’emprisonnement et le jugement des terroristes du Hezbollah, de Amal et du PSNS qui on tout simplement fait leur coup d’Etat le 7/5/2008, provoquant l’assassinat de plus de cent personnes ?

    Saleh Issal

    03 h 42, le 15 mars 2018

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