Rechercher
Rechercher

Liban - Scandale

L’affaire Itani menace d’exploser en Conseil des ministres

Le juge Samir Hammoud prolonge de 48 heures la détention de l’ancienne directrice du bureau de lutte contre la cybercriminalité.

Ziad Itani.

L’affaire Ziad Itani, accusé de collaboration avec Israël, mais qui semble avoir été victime d’un coup monté par l’ancienne directrice du bureau de lutte contre la cybercriminalité au sein des Forces de sécurité intérieure (FSI), Suzanne el-Hajj, a pris une telle ampleur qu’elle risque de provoquer de sérieux dégâts au sein du gouvernement, d’autant qu’elle semble s’imposer à la prochaine séance du Conseil des ministres. Cela dit, le dossier ne relève plus uniquement de l’ordre des tiraillements entre les différents services de sécurité, mais se répercute foncièrement sur la scène politique.
Selon notre correspondante Hoda Chedid, l’affaire Ziad Itani, qui a porté un coup sérieux à la crédibilité des services de sécurité et du corps judiciaire, a permis à tous ceux qui sont lésés par des dossiers sécuritaires d’aller jusqu’à mettre en doute ce qui a déjà été soutenu par des preuves. Il est très probable que l’affaire s’impose à l’ordre du jour de la séance du Conseil des ministres demain mercredi, à l’heure où le Hezbollah conserve un mutisme qui serait, en soi, une prise de position de sa part à ce sujet. Cette affaire semble en effet servir le parti chiite, puisqu’elle permet la réouverture du dossier des faux témoins dans l’affaire Hariri et de l’emprisonnement des quatre chefs de services de sécurité arrêtés par le Tribunal spécial pour le Liban dans la foulée de l’attentat du 14 février 2005.
La réouverture de ce dossier fera-t-elle éclater la séance du Conseil des ministres ? Jusqu’ici, les données confirment que le Hezbollah reste attaché à la stabilité politique et n’a pas l’intention de la remettre en cause. Ceci n’exclut pas toutefois une potentielle exploitation de cette affaire sur la scène politique.
De son côté, le président de la République, Michel Aoun, s’est entretenu avec le directeur général de la Sécurité de l’État, le général Tony Saliba, et le directeur général des FSI, le général Imad Osman. Il leur a demandé de garder confidentiels tous les rapports et résultats des interrogatoires. Des responsables sécuritaires ont en outre tenu hier au siège de la direction générale des FSI une réunion, consacrée notamment à l’affaire Itani et aux derniers développements relatifs à Suzanne el-Hajj.
Arrêtée vendredi pour son rôle présumé dans la fabrication d’accusations à l’encontre de Ziad Itani, Suzanne el-Hajj a été entendue par les renseignements des FSI durant le week-end. Elle est soupçonnée d’avoir « utilisé les services d’un pirate informatique pour fabriquer des conversations afin de faire accuser Ziad Itani d’avoir pris contact avec une jeune Israélienne ». Suzanne el-Hajj avait été écartée de son poste, rappelons-le, à la suite du retweet d’un message ironique du comédien Charbel Khalil contre les femmes en Arabie saoudite. Un individu nommé Ziad Itani avait diffusé la capture d’écran de son retweet et, selon les informations qui ont fuité durant le week-end, Mme el-Hajj aurait monté l’affaire pour se venger, mais se serait trompée de victime en prenant pour cible le comédien, en raison de l’homonymie.
Le pirate, Élie Ghabache, serait passé aux aveux, aurait reconnu avoir agi à la demande de Mme el-Hajj et confirmé les accusations portées contre lui.
Le procureur général près la Cour de cassation, Samir Hammoud, a prolongé de 48 heures la durée de l’arrestation de Suzanne el-Hajj, précisant que la confrontation entre l’ancienne directrice du bureau de lutte contre la cybercriminalité et Élie Ghabache n’avait pas eu lieu hier.
Le premier juge d’instruction militaire, Riad Abou Ghida, poursuit de son côté l’enquête dans l’affaire Itani et attend la réponse à la commission rogatoire qu’il a adressée au service des renseignements au sein des FSI. Le sort de Suzanne el-Hajj et de Ziad Itani seront révélés à la suite des enquêtes menées à la lumière de cette réponse. L’avocat de Ziad Itani, Saliba el-Hajj, avait rappelle-t-on adressé une demande de remise en liberté de son client.
Plus tôt dans la journée, l’ancien ministre des Affaires sociales et ex-bâtonnier de l’ordre des avocats de Tripoli, Rachid Derbas, avait annoncé qu’il se chargerait de la défense de Suzanne el-Hajj.
Le ministre de la Défense, Yaacoub Sarraf, a défendu hier le tribunal militaire qui juge le dramaturge Ziad Itani. « Le tribunal militaire a fait et continuera à faire son travail avec transparence, intégrité et en conformité avec la loi malgré les tentatives d’instrumentalisation politique », a indiqué M. Sarraf dans un communiqué. « Personne n’a le droit d’attaquer, dans les médias ou sur les réseaux sociaux, le tribunal militaire à des fins électorales », conclut ce texte.
De son côté, le ministre de la Justice, Salim Jreissati, a adressé une note au directeur de l’Inspection judiciaire dans laquelle il appelle les juges à se conformer à l’obligation de réserve et à s’abstenir d’évoquer les dossiers dans les médias et sur les réseaux sociaux sans l’autorisation préalable du ministre de la Justice. Il reste à noter qu’Élie Gergès Ghabache, un homme portant le même nom que le pirate informatique Ghabache, a publié un communiqué dans lequel il appelle les médias à être plus rigoureux et prudents dans le traitement des informations relatives au dossier de ce dernier puisque certains médias ont pris Élie Gergès Ghabache pour le pirate et ont tiré de sa page Facebook des photos de lui et de sa famille et les ont attribuées au pirate.
Pour sa part, la Rencontre de Saydet el-Jabal a estimé dans un communiqué que l’affaire Itani a mis à nu des failles flagrantes dans le travail des services de sécurité, dans le corps judiciaire, les médias et la presse, ainsi que dans la société libanaise qui n’arrive plus à détecter le vrai du faux en raison de la surcharge médiatique, politique et sectaire dont elle est victime. L’association Journalistes contre la violence a quant à elle mis en garde contre un dossier qui rappelle les temps de l’occupation syrienne, qui plus est à l’heure où certains symboles de l’appareil sécuritaire font leur retour sur la scène politique du pays.

L’affaire Ziad Itani, accusé de collaboration avec Israël, mais qui semble avoir été victime d’un coup monté par l’ancienne directrice du bureau de lutte contre la cybercriminalité au sein des Forces de sécurité intérieure (FSI), Suzanne el-Hajj, a pris une telle ampleur qu’elle risque de provoquer de sérieux dégâts au sein du gouvernement, d’autant qu’elle semble...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut