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Culture - À L’AFFICHE

Quand Frances McDormand s’en va-t-en guerre

Après les Golden Globes et les Bafta, à elle les Oscars ?

Face-à-face Frances McDormand/Sam Rockwell. Photo AFP courtesy 20th Century Fox

On la savait excellente actrice, alter ego de son époux Joel Coen, miroir convexe ou concave (selon !) du génie des deux frères. On ne doutait pas une seule seconde que cette diplômée de la prestigieuse école de théâtre de Yale, celle qui rêvait depuis son plus jeune âge de faire de la scène, arriverait là. Dans Three Billboards, parti gagnant dans la course aux Oscars, Frances McDormand est simplement magistrale.

Du personnage d’Abby dans Blood Simple en 1984, son premier rôle dans l’univers des frères Coen (car c’en est effectivement un), à celui de Mildred Hayes dans Three Billboards de Martin McDonagh, la frondeuse, la révoltée, l’atypique a fait bien du chemin. Rappelons à cet effet cette Dot dans Raising Arizona, ou le Dr Molly Arrington dans Primal Fear de Gregory Hoblit en 1996. Ou encore cette même année ce personnage hyperfarfelu de flic enceinte de Fargo qui rentre de plain-pied dans les annales du cinéma. Marge Gunderson avait alors reçu sa première statuette d’or pour meilleure actrice. Et pourquoi pas la Linda Litzke qui incarne une coach dans un centre de gymnastique, donnant la réplique à un extraordinaire Brad Pitt dans Burn After Reading ? C’était en 2008 et Frances McDormand, bien que muse et égérie des Coen, avait joué pour d’autres réalisateurs qui trouvaient en elle une actrice multitalentueuse, comme Wes Anderson qui lui fera interpréter le rôle de Lisa Bishop à la mesure de son Moonrise Kingdom.

Dans Three Billboards Outside Ebbing, Missouri, elle incarne Mildred Hayes, une femme dans ce patelin de l’Amérique profonde qui, ayant perdu sa fille d’une façon dramatique (violée et brûlée), décidera de prendre les choses en main face à une police indifférente et impuissante. Le titre du film est faussement traduit en français Panneaux de la vengeance. Car pour Mildred Hayes, femme battue par un mari qui la larguera plus tard pour une jeunotte de 20 ans, il ne s’agit pas là de vengeance mais de prise de responsabilité.

Sa révolution !
La première scène du film annonce la couleur. À la vue des trois panneaux abandonnés et vides depuis des années, et au regard de Mildred, le spectateur comprend ce qu’elle a dans la tête. Elle va faire sa propre révolution en relançant l’enquête sur le meurtre et en interpellant la police, via des panneaux publicitaires. Véritable pasionaria, Frances McDormand va en guerre contre l’ordre établi, contre les idées de racisme encore bien enracinées dans cette Amérique qui se veut moderne, contre les esprits figés et contre la haine. Dans ce film, la colère a son tempo. Elle va crescendo. Mais elle a aussi sa couleur. La couleur du feu. L’Irlandais Martin McDonagh, réalisateur de In Bruges qui s’aventure pour la première fois dans la peinture du Midwest américain, emploie à trois moments cruciaux du long métrage l’élément du feu. Tout au début du film, lorsqu’on apprend que Mildred a une fille qui est morte brûlée. Lorsque la ville décide de se révolter contre Hayes, en deuxième lieu, en brûlant les panneaux, et enfin dans des dernières flammes qui embrasent un endroit (attention spoiler), mais cette fois ci, elle seront réparatrices, car la situation est renversée. Le feu devient un élément qui nettoie, désinfecte des salissures de l’âme et qui apaise la colère ou la fait tomber en cendres. Frances McDormand, par un body language propre à elle, puisqu’elle n’interprète pas le rôle, mais l’habite totalement, aura bien mérité son Bafta (cérémonie très british) et son Golden Globe, en attendant les Oscars. Elle est certes le pilier de cette tragédie, mais elle est soutenue par deux acteurs non moins énormes. Il y a d’abord Woody Harrelson, qui, rien que par sa présence, si courte soit-elle, donne une autre saveur au film, et enfin Sam Rockwell en policier raciste, méchant, homophobe, affublé d’une maman non moins hideuse et acariâtre, qui nous fait détester la police mais qui aura lui aussi mérité le Bafta du deuxième rôle masculin.

Tout en dénonçant les pires travers d’une Amérique encore viciée, Mildred Hayes le fait avec un humour noir qu’on retrouvera souvent aux abords de la route de Missouri.

On la savait excellente actrice, alter ego de son époux Joel Coen, miroir convexe ou concave (selon !) du génie des deux frères. On ne doutait pas une seule seconde que cette diplômée de la prestigieuse école de théâtre de Yale, celle qui rêvait depuis son plus jeune âge de faire de la scène, arriverait là. Dans Three Billboards, parti gagnant dans la course aux Oscars, Frances...

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