Tima Hayek a été arrêtée pour un commentaire sur Facebook portant atteinte à un haut dirigeant. Photo tirée de la page Facebook de Tima Hayek
Tima Hayek, 25 ans, de Barr Élias, dans la Békaa, a été arrêtée mercredi à la caserne des services de renseignements d’Ablah, caza de Zahlé, avant d’être relâchée hier dans l’après-midi, pour avoir porté atteinte il y a plusieurs mois à un haut dirigeant, dans un commentaire sur son compte Facebook. Mardi, la jeune femme avait posté un commentaire critiquant le président de la Chambre, Nabih Berry, mais ce texte ne serait pas la cause de son arrestation. « Je suis solidaire de Bassil. Au moins, lui n’a pas de problème avec les ordures », a écrit mardi Tima Hayek sur son compte Facebook. « Le pays est confronté au danger des voyous », avait-elle écrit quelques heures plus tôt, en référence aux propos du chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, qui avait qualifié M. Berry de « voyou » dans une vidéo qui avait fuité dimanche et provoqué la colère des partisans d’Amal.
(Lire aussi : L’humoriste Hicham Haddad poursuivi une seconde fois)
« Je devais signer (mercredi) un engagement à ne plus poster de commentaires portant atteinte à des responsables », raconte Tima Hayek, contactée par L’Orient-Le Jour. Elle précise que ce ne sont pas ces deux derniers commentaires qui lui ont valu cette arrestation, mais un commentaire vieux de quelques mois, dans lequel elle portait atteinte à un haut dirigeant qu’elle s’est refusée à nommer.
« J’ai signé le document et pensais que l’affaire était close », poursuit-elle. À tort. « La juge refusait de me laisser partir, ajoute la jeune femme. J’ai été transférée de la caserne des services de renseignements de l’armée au poste de la police militaire. On tardait à me libérer. Ma famille ne pouvait pas non plus me voir. »
La jeune femme a passé ainsi sa nuit dans la salle d’attente du poste. Le lendemain, « mon beau-frère qui est avocat a mené des contacts tous azimuts pour obtenir qu’on me relâche », précise Tima Hayek. « À Barr Élias, on menaçait aussi de recourir à la rue pour obtenir ma libération », note-t-elle. Finalement, elle a été relâchée hier en fin d’après-midi.
La jeune femme explique que c’est la première fois qu’elle est convoquée pour ses commentaires sur les réseaux sociaux, mais cela ne l’empêchera pas de continuer à s’y exprimer.
Gare au dérapage !
Le cas de Tima Hayek est le second de ce type en l’espace d’une semaine, relève de son côté le directeur de l’association Life (Lebanese Institute for Democracy and Human Rights), Nabil Halabi. Abada Youssef, activiste, a également été arrêté par les services de renseignements de l’armée à la suite de propos dans lesquels il a critiqué des responsables politiques.
« Gare au dérapage ! » martèle Me Halabi, qui explique que « ces commentaires sur les réseaux sociaux sont une forme de liberté d’expression ». « Par conséquent, il ne faut pas incriminer leurs auteurs ni entraver leur liberté, insiste-t-il. Les personnes lésées par ces propos doivent recourir au tribunal civil et réclamer des dommages et intérêts. Personne ne doit être arrêté parce qu’il a usé de sa liberté d’expression, et ce conformément au pacte international relatif aux droits civils et politiques. Or, au Liban, des mesures continuent à être prises à l’encontre de personnes qui exercent leur droit à l’opposition. »
« Pourquoi les services de renseignements de l’armée donnent du temps à ces cas ? s’interroge Me Halabi. L’institution militaire doit préserver le système démocratique et la Constitution, et non pas poursuivre des activistes en raison de commentaires sur les réseaux sociaux. »
Il souligne que l’arrestation d’activistes dans des casernes militaires est un « précédent dangereux » et une « politique visant à intimider toute voix opposante ». « L’institution militaire bénéficie de dons internationaux pour lutter contre le terrorisme, défendre le Liban, protéger les citoyens et préserver les droits de l’homme, et non pas le contraire », rappelle l’avocat, mettant en garde contre ces pratiques qui « auront certainement un impact sur les dons » internationaux accordés à l’armée.
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commentaires (12)
Vraiment je ne reconnais plus le Liban . Moi qui vit en Europe on peut même critiquer le Président , pauvre Liban
Eleni Caridopoulou
21 h 09, le 02 février 2018