Lorsqu’on ne sait pas, on se tait. Ou alors, on fait appel à des experts. Ces experts, on les écoute. Attentivement. On applique leurs recommandations. À la lettre. Dans le cadre d’un plan d’urgence, si nécessaire, d’une stratégie à long terme surtout, à ne jamais perdre de vue. Et si on n’en est pas capable, on démissionne.
C’est simple comme bonjour. Mais cela semble si compliqué pour nos dirigeants, qui s’empêtrent lamentablement dans le dossier des déchets, tout en s’agrippant ferme à leurs strapontins. Et lorsque leur incompétence devient trop évidente, leur seul moyen de défense est l’attaque. Contre leurs adversaires politiques, en premier, les plus menaçants bien sûr, qui risquent de leur barrer l’accès au Parlement dès les législatives de mai prochain. Contre les citoyens aussi, qu’ils rendent responsables à parts égales de la crise des déchets. Contre la société civile enfin, qui leur fait désormais de l’ombre et qu’ils accusent donc de tous les maux.
La dernière trouvaille de nos chers leaders mériterait de figurer dans un livre de records, si elle n’était particulièrement grave. Dramatique pour le pays, pour son littoral, sa mer et ses montagnes. Rageante pour le citoyen qui assiste, impuissant, à la transformation de son environnement en un dégoûtant paysage jonché d’ordures. Et pour cause, le mauvais temps qui s’est installé sur le pays la semaine dernière a tapissé le littoral et les plages de Zouk Mosbeh de tonnes et de tonnes de déchets rejetés par Dame Nature. Quoi de plus normal, compte tenu de ce que le Liban compte désormais un bon millier de dépotoirs.
Au lieu d’admettre son échec chronique, et de se mobiliser pour remédier une bonne fois pour toutes à la crise des déchets qui fait rage depuis août 2015, la caste au pouvoir s’est contentée d’engager une rapide opération de nettoyage en surface de la zone touchée. Avant de se lancer dans une série d’accusations et de soi-disant enquêtes d’expertise… sur la provenance de cette marée de déchets. « De Bourj Hammoud », diront les détracteurs du pouvoir. « Du Nahr el-Kalb ou de décharges du Metn », diront les proches du pouvoir, soucieux de porter atteinte à tel ou tel député qui les titille un peu trop.
Sauf que le citoyen se gausse et se désole à la fois des vaines gesticulations des politiciens de service. Au point de les tourner en ridicule, sur les réseaux sociaux ou dans les salons. Car il n’a cure d’entendre les mêmes palabres à visées électorales qui ne mènent nulle part.
Le constat qu’il dresse est particulièrement navrant. La politique pratiquée depuis des décennies par un État incompétent et corrompu a montré ses limites, dans le dossier des ordures plus spécifiquement. Une politique de l’autruche qui consiste à ne pas voir le problème en face, à le contourner plutôt pour diverses considérations, souvent clientélistes, tout en proposant des solutions totalement inadaptées.
Trouvez donc une solution viable au problème des déchets! réclament les Libanais d’une seule voix. Une solution à très long terme, respectueuse de l’environnement, qui rende la mer au peuple et nettoie le pays des immondices. Partout au monde, cette solution commence par le tri des ordures et le recyclage. Elle nécessite l’engagement ferme de tous et de chacun, municipalités et industriels compris. Elle passe notamment par l’interdiction pour tous les commerces, sans exception, de distribuer gratuitement des sacs en plastique à leur clientèle. Car la Méditerranée n’en veut plus.
C’est dire combien le pays du Cèdre est à côté de la plaque.
Liban - Citoyen grognon
À côté de la plaque
OLJ / Par Anne-Marie El-HAGE, le 26 janvier 2018 à 00h00
commentaires (3)
Bien dit. Ce qui rend la situation plus grave ou plus triste c'est que l'endroit Nahr el-Kalb c'est un endroit de valeur culturel et écologie très important.
Stes David
09 h 18, le 26 janvier 2018