L'internet a été jadis un moyen de communication utilisé entre deux à trois personnes. Il est devenu aujourd'hui l'outil d'information, de réseautage et de communication le plus puissant et le plus utilisé au monde. Ce qui explique le recours d'organisations terroristes comme Daech à ce média.
Des parents de jeunes radicalisés confirment qu'ils ne sont pas parvenus à répondre aux questions de leurs enfants, liées à la religion. N'ayant pas reçu l'information recherchée, ces jeunes sont partis chercher la « vérité » sur internet. Les rabatteurs profitent de cette curiosité pour les engager. Des vidéos très élaborées sur la religion sont mises en ligne. Très denses de versets coraniques et d'épopées du prophète Mahomet et de ses successeurs, elles exercent un mécanisme de « captation de l'âme », et à la fin de chacune un lien dirige vers des forums et/ou des blogs de « parent virtuel » bienveillant (un éventuel recruteur), que l'on écoute et auquel on obéit. Et c'est à ce stade qu'ils vont se mettre en groupe et qu'ils vont solliciter les réseaux sociaux (Facebook, Twitter...) pour agir comme un « espace d'accrétion » en communautés virtuelles. Ces dernières transforment les recrues aux recruteurs qui attirent de nouveaux adeptes de leur sphère amicale ou familiale. Quelques semaines ou quelques jours passés connectés sur les réseaux sociaux suffisent à former de petits jihadistes prêts à agir.
Les recruteurs identifient les centres d'intérêt de chaque internaute à travers la collecte d'informations sur l'usage de chacun. In facto, les algorithmes sélectionnent les données recherchées répétitivement. YouTube, Facebook et d'autres applications suggèrent des vidéos du même type. C'est ainsi que les recruteurs présentent du contenu personnalisable. Par conséquent, l'internaute est confinée dans un cycle vicieux, il devient « exposé » en permanence au même type de contenu. Eli Pariser décrit ce processus d'isolement intellectuel et culturel des recrues.
Non seulement ils utilisent les moteurs de recherche et les réseaux sociaux pour propager leurs idées extrémistes, mais les recruteurs de Daech maîtrisent aussi parfaitement plusieurs applications d'internet comme WhatsApp, YouTube et Instagram pour populariser leur « cause ». Daech donne beaucoup d'intérêt à internet à tel point qu'il a créé une cellule de communication nommée al-Furqan Media. Cette dernière diffuse de la propagande en arabe, en français (Dar al-islam), en anglais (Dabiq), mais aussi en turc et en russe.
Force est d'admettre que l'Occident ou la Syrie n'ont pas exploité assez la piste électronique dans la lutte contre l'extrémisme violent avant l'éclosion de ce phénomène. Et ce en privant les recruteurs de ce moyen de résistance et d'existence. S'agit-il d'une erreur dans la politique de lutte ou plutôt d'une volonté implicite ?
Doctorante en sciences sociales et politiques, Cecid, ULB
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