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Liban - Réfugiés chaldéens

Samer, entre départ impossible et séjour insoutenable

Les perspectives d'émigrer aux États-Unis sont devenues très minces pour des exilés irakiens pris entre deux feux au Liban.

Ils sont six à vivre sous le même toit. La famille de Samer (son nom a été changé à sa demande) fait partie de ces familles d'Irakiens exilées au Liban, dont environ 4 500 sont chaldéennes. Ce père de famille est arrivé il y a quatre ans au Liban, et sa famille l'a rejoint il y a un an.

Ils ont quitté l'Irak par peur pour leur vie. Là-bas, étant chrétiens, ils étaient constamment menacés par des groupes armés, dont Daech. « Ce n'est pas par nécessité que nous avons quitté notre pays, nous avions une maison, un travail, des amis, raconte Samer. Mais nous devions préserver notre dignité et fuir les persécutions religieuses. Nous avons vendu tous nos biens pour financer notre départ et vivre en exil. »

Passant inaperçu derrière l'afflux important de réfugiés syriens, le nombre de réfugiés irakiens ne cesse d'augmenter. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) recense dernièrement plus de 18 000 réfugiés irakiens, soit 6 000 familles à travers le Liban. Ils représentent ainsi 86 % des réfugiés non syriens à arriver sur le sol libanais.

La famille de Samer pourrait s'intégrer complètement dans ce paysage libanais. C'est ce qu'il affirme d'ailleurs : « Nous n'avons aucun problème avec les Libanais, nous nous ressemblons, nous avons pour certains la même religion, et nous parlons presque la même langue, dit-il. Mais le Liban n'est pas notre pays, ce n'est qu'un point de passage vers une vie meilleure. » Quitter le Liban est leur seule et unique envie. « Partir, nous voulons partir. Pour nous, mais surtout pour mon fils. Nous voulons lui offrir un avenir, une stabilité », avoue Samer. Néanmoins, sa famille ainsi que les 5 999 autres se retrouvent bloquées dans ce pays.

 

(Pour mémoire : « Les chrétiens d’Irak ont le droit de vivre en paix. Mais partir est désormais la seule issue »)

 

 

Travailler au noir
Les perspectives d'émigrer se sont effectivement beaucoup réduites. L'ONU et son programme de relocalisation des réfugiés, qui est le principal organe de replacement de population, reçoivent des directives des pays hôtes concernant les quotas d'accueil. Dans le cas des réfugiés irakiens, ce sont les États-Unis qui acceptent la grande majorité de ces réfugiés, suivis par le Canada et l'Australie. À son arrivée à la Maison-Blanche, Donald Trump avait rangé l'Irak et ses réfugiés dans son « Muslim Ban », une liste qui interdisait aux ressortissants de certains pays à majorité musulmane d'émigrer aux États-Unis.

Depuis mars dernier, son administration a retiré l'Irak de cette liste mais, selon le HCR, le quota d'accueil aurait drastiquement baissé par rapport à celui qui était en vigueur pendant les mandats de Barack Obama.
Pour toutes ces raisons, les Irakiens réfugiés au Liban se trouvent dans une situation délicate : ils peuvent difficilement émigrer alors qu'ils n'ont pas de statut légal dans ce pays. L'État libanais lui-même ne les reconnaît pas, au vu de la loi, en tant que réfugiés, car ils arrivent sur le territoire par avion et avec un visa touristique. Ils ne peuvent donc pas bénéficier des aides de l'État allouées aux réfugiés politiques. Et, de plus, les aides du diocèse chaldéen de Beyrouth ont diminué depuis trois ans. Celui-ci ne pouvant plus faire face à l'afflux grandissant des Irakiens, il a dû réduire ses aides individuelles afin de les partager au mieux. En effet, en janvier 2016, on comptait plus de 300 nouveaux arrivants, de même pour les deux mois qui suivirent.

Samer, comme tant d'autres, doit donc travailler au noir au risque de se faire arrêter par la Sécurité générale car il ne détient pas de permis de travail. Sarah, sa femme, ne peut pas travailler non plus, elle fait donc du bénévolat « pour avoir au moins la sensation de se sentir utile », affirme-t-elle. Ils reçoivent parfois des aides médicales de l'association Caritas Liban, qui vient en aide aux plus démunis. Ces aides ne leur permettent pourtant pas de vivre « de manière stable ». C'est le mot qui revient souvent dans la bouche des membres de la famille. Ils n'ont aucune stabilité financière ou médicale.

Selon la famille, le patriarche chaldéen presse souvent ses fidèles de réoccuper les terres chrétiennes d'Irak, laissées à l'abandon, officiellement pour préserver le pluralisme religieux de ce pays. En revanche, pour la famille de Samer, le retour est inconcevable. « Nous ne pourrons jamais rentrer », lance Samer, les yeux remplis de nostalgie, avec un sourire triste. Khatret, son père, reprend d'un ton grave et irrité : « Pour rentrer, il faudrait que la paix revienne, et elle ne reviendra jamais. Si je retourne en Irak, qui va me protéger des enlèvements ? Sûrement pas le patriarche, il n'en a pas les moyens. »

 

 

 

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