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Liban - Rencontre

Youssef Fenianos : L’alliance stratégique Marada-CPL ne s’étendra pas aux législatives

Il n'y a « pas de barricades » au sein du gouvernement, assure le ministre des Travaux publics et des Transports.

Le ministre des Travaux publics et des Transports Youssef Fenianos. Archives L’Orient-Le Jour

Après le malheureux tweet qui lui a valu une vague de critiques (il a accusé les Libanais qui protestaient contre les trous remplis d'eau dans les chaussées, après la pluie, de mentir), le ministre des Travaux publics s'est exprimé dans les médias. Il a donc reçu le conseil de l'ordre des rédacteurs présidé par Élias Aoun. Direct et franc, Youssef Fenianos n'a pas mis de gants pour répondre aux questions des journalistes et au bout de deux heures, il a pratiquement dressé un tableau politique, loin de toute langue de bois, qui montre notamment l'étendue de l'inimitié entre les Marada et le CPL.

L'entretien a commencé par la question du fameux tweet. Le ministre a ainsi expliqué aux présents comment il avait, la veille, suivi les prévisions météorologiques et tenu des réunions jusqu'à deux heures du matin dans son ministère pour éviter que la pluie ne fasse des dégâts sur les voies publiques. Il a précisé que les contrats d'habilitation des routes et des bouches d'égout sont conclus en décembre de chaque année. Ce qui, selon lui, est une erreur, parce que l'on est déjà en plein hiver et que les compagnies sollicitées n'ont pas le temps de se préparer. En même temps, cela lui a permis de rappeler que les contrats sont encore ceux conclus par son prédécesseur, Ghazi Zeaïter.

Ce matin-là donc, ses conseillers l'informent qu'il y a une vaste campagne contre lui sur les réseaux sociaux. Il s'empresse alors d'envoyer sur place ses équipes, qui constatent qu'il n'y a pas, en réalité, de routes inondées ou bloquées par la violence des pluies. Le ministre reconnaît toutefois que certaines infrastructures, notamment sur le nouveau front de mer à Dbayé, sont désormais inadaptées en raison des nouvelles constructions. Se sentant blessé par ces attaques sur les réseaux sociaux, il proteste contre ce qu'il considère être des mensonges. Des protestations que son équipe publie sur les réseaux sociaux...
Le ministre des TP a aussi raconté comment, à la demande du président de la République (qui, a-t-il tenu à préciser, avait à ses côtés l'entrepreneur Jihad el-Arab), il a voulu trouver une solution pour la route principale de Ajaltoun où se produisent de nombreux accidents mortels. Le président, a déclaré M. Fenianos, voulait une solution rapide, même si elle est provisoire. Mais comme il n'y avait pas de budget prévu pour ce chantier, le ministre a donc ordonné de mettre, avec l'aide de Jihad el-Arab, des blocs de béton pour un coût total de 800 millions de livres. Malgré cela, aujourd'hui, il est critiqué parce que les blocs de béton qui empêchent les accidents rétrécissent la route.

En gros, M. Fenianos a voulu expliquer qu'il fait de son mieux, avec les moyens actuels et en l'absence de planification sur le moyen et le long terme. C'est pourquoi il est convaincu que les « campagnes » contre lui et son ministère ne sont pas innocentes. Elles sont même politisées, estime-t-il.
Le ministre des TP a ainsi évoqué l'aéroport international de Beyrouth qui relève de l'autorité de son ministère pour préciser qu'il a été conçu pour accueillir 5 millions de passagers. Mais à l'époque (les années quatre-vingt-dix), nul n'imaginait qu'il y aurait la crise en Irak et celle de Syrie et que le nombre de passagers passerait à 9 millions. « Pour la première fois dans l'histoire du Liban, a dit le ministre, 1 064 000 passagers sont passés par l'aéroport de Beyrouth au cours du mois dernier. Même chose au sujet des routes : on avait annoncé pour 2025 des routes capables d'absorber 400 000 voitures, or voilà que cette année, nous avons 800 000 voitures en circulation. La réalité a dépassé toutes les prévisions et nous en payons le prix aujourd'hui. »

Au sujet de l'autoroute Beyrouth-Jounieh dont tout le monde se plaint, M. Fenianos a précisé qu'elle relève de la responsabilité du CDR, et non de son ministère. C'est donc le CDR qui reçoit les dons et les crédits internationaux. Mais au passage, il a égratigné les députés et les candidats à la députation du Kesrouan qui refusent le plan d'élargissement de la route pour ne pas avoir à exproprier une quarantaine de commerces. Les candidats et les députés ont proposé à la place de l'élargissement la construction d'un pont, mais les crédits sont spécifiques. « 160 000 voitures passent chaque jour par cette route et sont prises dans des embouteillages pour ne pas déplaire à 40 commerces... » a lancé le ministre, qui a ajouté que des décisions d'expropriation ont été prises, mais nul ne veut les exécuter, alors que la contestation de la décision ne suspend pas son exécution, portant uniquement sur le montant des indemnités.
M. Fenianos, qui représente le courant des Marada au sein du cabinet, a également souligné que s'il s'oppose, au sein du Conseil des ministres, à une décision, il la défendra en dehors une fois cette décision adoptée.

 

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Tout en reconnaissant que le gouvernement actuel et le président Michel Aoun ont à leur actif d'importantes réalisations, il est critique à l'égard de certaines procédures au sein du Conseil des ministres, notamment lorsque les ministres sont les derniers informés, à défaut d'être consultés, de certaines nominations. Le ministre faisait là référence notamment aux permutations diplomatiques qui ont été publiées dans la presse avant que les ministres n'en soient informés. Selon lui, l'adoption de la loi sur le partenariat entre les secteurs privé et public est une grande réalisation. Par contre, il est totalement hostile au dossier des bateaux pour la production de courant électrique. Il a déclaré ainsi qu'il ne sert à rien de déférer le dossier à la direction des adjudications si on ne veut pas tenir compte de son avis.
M. Fenianos a fait l'éloge du Premier ministre, assurant qu'il est convaincu que ce dernier a à cœur l'intérêt du Liban et, selon lui, nul ne peut lui imposer une décision dont il n'est pas convaincu. « Son alliance avec le président Aoun est tout à fait sérieuse et il mène un dialogue avec toutes les parties politiques. Ce qui est dans l'intérêt du Liban », a-t-il déclaré.

Interrogé sur sa relation avec le chef de l'État, il a précisé qu'il n'y a eu entre eux qu'une seule rencontre en particulier en dehors des réunions du Conseil des ministres. Par contre, il a fait l'éloge de l'entourage du président au palais. Entre Aoun et Frangié, « la relation n'est plus tendue, a-t-il précisé. Et c'est en connaissance de cause que le chef des Marada a déclaré que lorsque le président le convoquera à Baabda, il s'y rendra sans hésiter ». Le ministre a également démenti qu'il y ait « des barricades » entre lui et Gebran Bassil au sein du Conseil des ministres.

Selon lui, les élections auront lieu à la date prévue, probablement avec la carte d'identité ordinaire ou le passeport. Ce qui, selon lui, devrait entraîner une baisse du budget consacré à l'organisation des élections. Au sujet de la détermination supposée de Sleiman Frangié à faire échouer Gebran Bassil aux législatives à Batroun, il a répondu : « Ceux qui déclenchent des batailles contre nous, nous les combattrons. » Selon lui, le CPL n'aura pas plus d'un siège (sur dix) dans la circonscription en question, que ce soit Gebran Bassil ou un autre. Il y a une alliance sur le plan stratégique avec le CPL, mais celle-ci ne s'étend pas aux élections, a-t-il dit. Il a aussi précisé que le courant de Sleiman Frangié respecte la fonction de président de la République, lequel exprime d'ailleurs les options stratégiques de ce courant. Par contre, la situation est différente avec le CPL, son chef et ses députés qui ne cessent de l'attaquer au Parlement.
Avec les Forces libanaises, M. Fenianos a affirmé que les relations s'améliorent, ajoutant qu'il ne comprend pas les critiques qui sont adressées aux Marada sur ce sujet. « Quand le CPL noue une alliance avec les FL, c'est bien, mais quand c'est nous qui entamons un dialogue avec elles, c'est mal ? » a-t-il demandé. Il a aussi critiqué ce qu'il considère comme l'abandon des thèses développées par le CPL pendant des années au sujet de la corruption.

M. Fenianos a enfin affirmé être convaincu de la justesse de sa visite en Syrie, dans le cadre de la foire de Damas, ajoutant que l'intérêt du Liban exige un dialogue avec les autorités en place en Syrie.

 

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