Alors que le Liban est toujours techniquement en guerre avec Israël, des groupes de touristes israéliens de confession chrétienne se rendent régulièrement en pèlerinage sur des sites religieux libanais, rapporte le quotidien israélien Haaretz. Selon le quotidien israélien, ce sont des centaines de pèlerins qui sont entrés au Liban au cours de l'année écoulée pour y passer, discrètement, une semaine.
Il ne s'agit pas « d'infiltration ou d'excursions clandestines mais de voyages suivant +une procédure très méthodique+ », explique au Haaretz un des organisateurs qui assimile ces pèlerinages à ceux des Musulmans à La Mecque et Médine. « Nous faisons profil bas en raison du caractère très sensible de la situation entre Israël et le Liban », nuance-t-il toutefois.
Une semaine très chargée
Au cours de ces voyages organisés dans les moindres détails par des hommes d'Église de la région de Galilée, les touristes visitent des sites dispersés sur la totalité du territoire libanais. Ils vont notamment à Beyrouth, Notre-Dame du Liban à Harissa (Kesrouan), le village de Annaya et le sanctuaire de Saint Charbel dans les montagnes surplombant Byblos, le village de Maghdouché, proche de Saïda au Liban-Sud, Baalbeck, Zahlé et de nombreux sites de la vallée de la Békaa.
Toutes ces étapes sont très encadrées et les voyageurs n'ont pas l'autorisation de visiter d'autres endroits sans que l'organisateur ne soit tenu au courant.
« Il s'agit d'une semaine très chargée de visites spirituelles. Nous n'allons pas au Liban pour discuter de politique mais pour prier et profiter des paysages libanais qui sont à couper le souffle », confie un participant au journal israélien.
Tout compris, cette semaine coûte près de 1 800 dollars par personne ce qui, pour certains des touristes, « est un prix raisonnable quand on sait qu'il s'agit d'une opportunité unique, qui ne se représentera probablement pas. »
« Accord tacite »
Pour rendre ce voyage possible, les pèlerins transitent par la Jordanie, avec laquelle Israël a signé un accord de paix et dont ils franchissent la frontière avec leur passeport israélien. De Amman, les touristes se rendent ensuite au Liban, munis alors d'un passeport palestinien émis spécialement pour l'occasion et décrit par un responsable comme « une carte d'accès temporaire et valide pour une seule visite ».
Toute cette organisation est, selon le Haaretz, « basée sur un accord tacite impliquant le Liban, Israël, l'Autorité palestinienne et la Jordanie. »
« Israël autorise les groupes à partir pour la Jordanie et en revenir (...) sans les interroger sur ce qu'il s'est passé lors de leur séjour à Amman. La Jordanie les laisse partir pour Beyrouth avec des passeports palestiniens et le Liban accueille les pèlerins », indique au quotidien un prêtre ayant accompli ce voyage.
Et de poursuivre : « Il y a clairement un accord multilatéral. Le fait que tout cela se passe sans aucun accroc et que personne n'ait jamais été interrogé ou arrêté, à aucun niveau en est la preuve. »
« Lors du trajet de retour, à la frontière jordanienne, personne n'a caché le fait que nous étions allés au Liban et rien ne s'est passé. Un responsable israélien au poste frontière nous demandé comment était le Liban et nous lui avons raconté. Nous n'avons rien à cacher, nous n'avons fait que visiter des sites sacrés », confie un autre voyageur.
Le Liban ne reconnaissant toujours pas Israël et aucun accord de paix n'ayant jamais été signé entre les deux pays, les interactions entre Libanais et Israéliens suscitent régulièrement des polémiques. La loi libanaise interdit tout contact avec l'État hébreu et les Libanais qui se rendent en Israël sont passibles d'une condamnation pour haute trahison, même si des autorisations exceptionnelles peuvent toutefois être accordées.
Cette polémique est revenue sur le devant de la scène avec la comparution, début septembre, du réalisateur franco-libanais Ziad Doueiri devant le tribunal militaire libanais pour avoir violé l'article 285 du code pénal libanais qui interdit toute visite en territoire ennemi sans autorisation préalable. L'affaire est liée au film L'Attentat, de Ziad Doueiri, qui avait été interdit de diffusion à sa sortie en 2013 dans les pays de la Ligue arabe, dont le Liban, car certaines scènes avaient été tournées en Israël avec des acteurs israéliens.
En 2014, c'était une visite pastorale du patriarche maronite Béchara Raï en Terre Sainte qui avait suscité de vifs débats. Cette visite qui l'avait conduit à Jérusalem et à Bethléem coïncidait avec le pèlerinage du pape François à Jérusalem, à Bethléem et en Jordanie.
Pour mémoire
Quand une conférence de Ziad Doueiri à l'USJ vire à l'esclandre
commentaires (6)
IL SEMBLE QUE C,EST JUSTE... ET C,EST BIEN FAIT !
LA LIBRE EXPRESSION
11 h 45, le 03 novembre 2017