Dans la grande salle de réunion de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, cela fait belle lurette que les échos d'un discours n'ont pas retenti d'une telle manière. Chaque année, les délégations des 193 pays membres de cette organisation internationale guettent quelques discours-clés, comme celui du président des États-Unis, en raison de l'importance du rôle joué par ce pays sur l'échiquier mondial, celui du président iranien, en raison des polémiques qui continuent d'entourer la République islamique, celui du président russe, lorsqu'il participe à la session ordinaire, et éventuellement celui du président français, surtout lorsqu'il vient d'entrer en fonction, comme c'est le cas d'Emmanuel Macron, plutôt inconnu auparavant des milieux politiques internationaux.
Mais il est rare que le président d'un petit pays – dont beaucoup ignorent l'emplacement sur la carte – soit autant suivi et obtienne un tel écho. C'est du moins ce que rapportent des membres de la délégation libanaise présents lorsque le président Michel Aoun a prononcé le discours du Liban. « Nous n'accepterons aucune forme d'implantation des réfugiés ou des déplacés, qu'ils soient palestiniens ou syriens, et la décision à ce sujet nous appartient, à nous Libanais et à nous seulement. » « Il est temps que les déplacés syriens commencent à rentrer chez eux, sachant que ce retour doit être sûr, non volontaire, et que l'État syrien a retrouvé le contrôle de 85 % de son territoire... »
Ces affirmations et bien d'autres, notamment au sujet de « l'injustice faite aux Palestiniens par les Israéliens qui ne peut pas être réparée par une autre injustice faite aux Libanais », ont secoué un auditoire peu habitué à tant de clarté et de fermeté, surtout de la part du chef d'un petit pays, considéré généralement comme « la base arrière des plans occidentaux et régionaux » depuis des années. Le discours de Aoun était d'ailleurs très structuré. Il a commencé par le terrorisme, rappelant qu'en 2001, New York a été frappée de façon atroce alors que le phénomène s'est étendu à plusieurs régions dont le Liban, qui a heureusement réussi à le vaincre.
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Mais ce pays continue à subir les graves conséquences de la présence d'un grand nombre de déplacés syriens et aussi de réfugiés palestiniens. Dans ce sillage, Aoun a ainsi mentionné les violations de la résolution 1701 de la part des Israéliens qui cherchent aussi à neutraliser l'Unrwa pour augmenter le poids de ces réfugiés sur le Liban. Au passage, le chef de l'État a évoqué la cause palestinienne et il a fallu que le seul président chrétien de la région soulève cette cause devant le concert des nations et soit le seul à en parler. Il est ensuite passé au rôle du Liban comme vivier des cultures, des civilisations et des religions qui devrait lui permettre d'accueillir un centre permanent de dialogue, relevant des Nations unies.
Il s'agissait donc effectivement d'un discours inhabituel par sa profondeur et la clarté de la vision qu'il comporte ainsi que par le courage des mots utilisés. Au point qu'à la fin de la séance, de nombreux chefs de délégation arabes présents sont venus féliciter le président Aoun pour son discours et l'encourager dans les propositions qu'il a formulées.
Justement, ces propositions, Aoun les évoquera aussi en France où il devrait arriver lundi pour une visite d'État. Selon des sources diplomatiques, cette visite est très importante en raison des liens existants entre la France et le Liban, d'une part, et, d'autre part, à cause de la volonté de Paris d'effectuer un retour politique et diplomatique dans la région, par le biais de la porte libanaise, sachant qu'au cours des dernières années, son rôle en Syrie, en Irak, en Turquie et même en Iran et en Jordanie avait été affaibli, la France s'étant plutôt concentrée sur l'Afrique du Nord (Libye) et les pays du Golfe.
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Les sources diplomatiques précitées affirment que quatre dossiers seront principalement évoqués au cours des entretiens entre Emmanuel Macron et Michel Aoun. Ils se concentrent sur quatre axes : celui de la coopération militaire, celui de la coopération économique et celui des déplacés syriens, en plus du contexte politique général et du processus d'entente interne, ainsi que l'appui de la France aux institutions publiques libanaises. La France pourrait ainsi soulever la question de l'armement de l'armée libanaise qui vient de remporter une victoire éclatante sur le terrorisme, voire organiser une conférence internationale sur le sujet. Tout comme des informations font état de la possibilité d'organiser une nouvelle conférence économique pour le Liban qui pourrait s'appeler Paris IV. Mais le gros des discussions devrait porter sur le dossier des déplacés syriens, et là aussi la France pourrait accueillir une conférence internationale destinée à définir les conditions de leur retour ainsi qu'à encourager ce processus.
D'ailleurs, le Liban et la France souhaitent visiblement donner une nouvelle impulsion et un nouveau souffle à leurs relations bilatérales qui s'étaient installées ces dernières années dans une sorte de routine, surtout pendant la période de vacance présidentielle, alors qu'il n'y avait pas d'ambassadeur du Liban en France. Aujourd'hui, ce poste est désormais occupé par le diplomate Rami Adwane dont les formalités d'accréditation ont été effectuées avec une rapidité record, justement pour lui permettre d'être en poste lors de la visite d'État de Michel Aoun à Paris. Un indice de plus de la volonté des deux pays de dynamiser leurs relations, selon leurs intérêts communs. Au cours de cette visite, le président Aoun devrait d'ailleurs prononcer plusieurs discours, dont un au Sénat, un autre devant la communauté libanaise installée en France et un troisième au cours du dîner qui sera donné en son honneur par le président Macron.
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commentaires (5)
du discours de aoun on peut tt dire , mais pas cela quand meme : pr citer l'ecrivaine de cet article : Ces affirmations et bien d'autres, notamment au sujet de « l'injustice faite aux Palestiniens par les Israéliens qui ne peut pas être réparée par une autre injustice faite aux Libanais », ont secoué un auditoire "" SECOUE UN AUDITOIRE ??? l'ecrivaine ns le savons est amoureuse de LA POLITIQUE de Mr. aoun -soit , mais qd meme , pas autant ! je re-cite l'ecrivaine ""la volonté de Paris d'effectuer un retour politique et diplomatique dans la région, par le biais de la porte libanaise"" en oubliant que comme tjrs la france est a la traine, ne fait mine de zele que lorsqu'elle decide que les USA perdent du terrain ds la region.... SANS JAMAIS GRAND EFFET- mis a part finacierement bien entendu !
Gaby SIOUFI
09 h 58, le 24 septembre 2017