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Moyen Orient et Monde - Conflit

Rien ne va plus au Yémen entre Saleh et les houthis...

La coalition des forces rebelles au président Hadi menace d'imploser.

Des centaines de milliers de Yéménites réunis lors de la manifestation célébrant le 35e anniversaire de la création du Congrès populaire général, parti de l’ex-président Ali Abdallah Saleh, jeudi à Sanaa. Mohammad Huwais/AFP

Le casse-tête yéménite se complique davantage. Le conflit, ayant débuté en 2014, oppose le gouvernement de Abed Rabbo Mansour Hadi, soutenu par la coalition arabe, aux forces de l'ancien président Ali Abdallah Saleh auquel sont alliés les rebelles houthis, affiliés à la branche chiite et soutenus par l'Iran. Mais l'état de la relation entre l'ex-président et les rebelles se dégrade un peu plus chaque jour depuis ces derniers mois. Les tensions sont montées d'un cran hier, suite à de violents affrontements samedi non loin du siège de M. Saleh à Sanaa, la capitale yéménite. Le chef adjoint des relations extérieures du Congrès populaire général (CPG), le colonel Khaled el-Ridha, issu du parti de M. Saleh, a été tué dans les heurts. Deux rebelles houthis ont également perdu la vie pendant les combats le même jour, rapporte l'agence de presse Saba gérée par les houthistes.

Depuis une semaine, les deux camps s'accusent mutuellement de « trahison ». L'ex-président a présenté dimanche dernier les rebelles comme étant des « miliciens ». Les houthis s'étaient empressés de qualifier mercredi cet acte de « coup de poignard dans le dos », annonçant que l'ancien président avait « franchi une ligne rouge » et qu'il en « subira les conséquences ». Les houthis suspectent le camp de M. Saleh de chercher un arrangement avec la coalition arabe sunnite menée par l'Arabie saoudite et soutenant le président Hadi. Pas plus tard que mercredi, M. Saleh déclarait être « prêt » pour « un dialogue courageux (...) avec nos frères en Arabie saoudite » représentant la coalition, rapporte le quotidien palestinien al-Qods. Ce n'est pas la première fois que M. Saleh se montre ouvert au dialogue avec Riyad. Déjà en mai dernier, il avait évoqué la possibilité de s'entretenir avec le leader de la coalition.

Selon al-Qods, l'ex-président a également précisé être prêt « à discuter, à travers un comité des Nations unies représenté par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, sur la menace pour les pays voisins », alors qu'il excluait encore cette option en mai dernier. Celle-ci serait conditionnée à l'abolition de la résolution 2216 de l'ONU imposant un embargo sur les armes à destination des rebelles houthis et des forces de Saleh. Pour l'ex-président yéménite, l'accusation selon laquelle « le Yémen est une menace pour la paix internationale pour les pays de la coalition » signifie que le pays est « lié à l'Iran ». « Nous n'avons aucune association avec l'Iran, et nous considérons tout membre ou toute conférence officielle lié(e) à un sort extérieur de trahison nationale », a-t-il ajouté.

 

(Lire aussi : "Au Yémen, pas de héros, que des criminels et des victimes")

 

 

« Partenaires d'opérette »
Alors que le pays continue d'être ravagé par la guerre (le dernier raid aérien de la coalition a fait 14 morts parmi les civils vendredi), M. Saleh était présent lors d'une manifestation jeudi dernier pour célébrer le 35e anniversaire de la création de son parti sur la place Sabyine, à Sanaa. Le numéro deux du CPG, Aref el-Zouka, a déclaré à cette occasion que son camp refusait d'être « un partenaire d'opérette » face aux houthistes, considérés comme trop envahissants dans l'organisation institutionnelle de l'alliance, alors que ces derniers contrôlent le ministère de la Défense et les renseignements militaires. Et suite aux combats de samedi, le CPG les a qualifiés de « groupe qui n'a aucune moralité », en référence au décès du colonel Khaled el-Ridha.

La relation entre Ali Abdallah Saleh et les houthis a longtemps été tumultueuse, notamment au début des années 1990 puis dans les années 2000. Mais les deux camps se sont rapprochés en 2014 pour un mariage de convenance leur permettant de lutter depuis 2015 contre la coalition arabe. Les houthis, issus de la communauté zaïdite, dénoncent leur marginalisation par le gouvernement Hadi et les inégalités socio-économiques auxquelles ils font face dans le pays. M. Saleh, qui a dû faire face à une révolution en 2011 pendant son mandat présidentiel, s'était vu forcé de quitter le pouvoir. Mais il a profité de sa nouvelle alliance comme d'une rampe de lancement pour la reconquête du pouvoir.

La prise de Sanaa en 2015 par les rebelles houthis n'a pu se faire que grâce à une coopération avec les forces de M. Saleh, alors président du CPG. Mais elle n'a pas pour autant effacé la persistance d'une certaine méfiance entre les deux camps, qui apaisaient jusqu'à peu, bon gré mal gré, les tensions.

 

Alliance « contre nature »
La fissure qui ne cesse de s'approfondir dans l'alliance depuis le milieu de cette année pourrait en effet avoir de lourdes conséquences sur le terrain si elle amenait les parties à divorcer. Dès le début de l'accord entre elles, les observateurs se sont montrés pessimistes quant à la possibilité de maintenir cette alliance – que nombre d'entre eux appellent « contre nature » – sur le long terme. Mais les forces loyalistes à l'ex-président et les houthistes se renforcent mutuellement et ont besoin l'un de l'autre pour maintenir leur contrôle sur la capitale et le nord du pays. Avec la création du Gouvernement de salut national (non reconnu par la communauté internationale), le pouvoir est réparti de manière spécifique selon les priorités de chaque camp. À titre d'exemple, les rebelles houthis tiennent les rênes du ministère de l'Éducation tandis que les forces de Saleh contrôlent le ministère des Télécommunications. Il s'agit ainsi pour les houthis d'étendre leur contrôle dans le pays et d'avoir accès aux armes, tandis que M. Saleh cherche à retrouver sa légitimité politique perdue depuis 2011. Alors que cette alliance doit permettre d'afficher une opposition unie face au gouvernement Hadi, les tensions peuvent la décrédibiliser et démolir le système mis en place, dans un contexte déjà particulièrement instable.

 

 

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