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À La Une - Syrie

Près de Raqqa en guerre, une Syrienne revient arroser sa vigne

Depuis qu'elle a fui les combats dans le fief jihadiste, Warda al-Jassem avait une obsession : sauver ses raisins.

Warda al-Jassem, une Syrienne de cinquante ans, arrose sa vigne après être retournée chez elle, dans l'ouest de Raqqa, le 15 juillet 2017. Photo AFP / BULENT KILIC

Sitôt entrée dans le patio de sa maison près de Raqqa, Warda al-Jassem se précipite vers sa vigne et l'arrose: depuis qu'elle a fui les combats dans le fief jihadiste, sauver ses raisins était son obsession.

Il y a plus d'un mois, au moment de l'avancée des forces antijihadistes à Jazra, une banlieue ouest de Raqqa tenue par le groupe Etat islamique (EI), Warda, 50 ans, a préféré quitter sa maison avec sa famille par peur des combats. Depuis, elle et son mari, réfugiés à al-Andalos, une localité à 25 km au nord-est de Raqqa, ne cessaient de penser à leur treille.
"Je suis revenue pour ma vigne, je suis revenue l'arroser", confie à l'AFP Warda, venue avec des voisines pour une brève visite dans leur quartier, repris à l'EI début juin.

Cette femme brune aux yeux bleue, la tête recouverte d'un voile noir brodé de fils bordeaux, regarde la treille d'où pendent des raisins jaunis et des feuilles sèches.
Une grande partie des grappes n'a pas tenu le coup faute d'eau mais d'autres sont encore toutes vertes. "Elles mourraient de soif", affirme-t-elle.

 

(Lire aussi : La détresse d'une famille revenue à Raqqa pour enterrer ses morts)

 

"La vigne a soif"
Son mari, malade du cœur, n'a pas pu l'accompagner. "Depuis qu'on est parti d'ici, tout ce qu'il voulait, c'était connaître le sort de la vigne. Il répétait chaque jour 'la vigne a soif, il faut l'arroser'".

Cette femme à l'air déterminé retourne la terre avec une pelle puis, munie d'un seau, l'asperge d'eau pour essayer de sauver ce qui peut encore l'être. Le simple fait d'arroser lui redonne le sourire.
Elle invite ensuite ses amies à cueillir les raisins encore intacts.

De la maison, Warda s'empresse de récupérer des affaires chères à son cœur: un sac de menthe sèche, un autre de corète potagère (plante utilisée dans la mouloukhiya, un plat populaire au Moyen-Orient) et... un soutien-gorge multicolore. Avant de repartir, elle remplit une bouteille en plastique de mazout d'un bidon retrouvé dans le patio.

Mais si la maison de Warda a été épargnée par les violences, celle de sa voisine Maryam Moustapha, une rue plus loin, n'a pas eu la même chance. A peine arrivée à son logis, elle voit des combattants des Forces démocratiques syriennes (FDS) -l'alliance arabo-kurde qui combat l'EI- allongés dans le patio.
A l'intérieur, elle voit les vêtements de la famille éparpillés, la machine à laver cassée et la vaisselle disparue. Le salon est aussi méconnaissable: plus de télévision, plus de vases de fleurs, et plus de divans.

 

(Lire aussi : La guerre syrienne racontée par les enfants...)

 

"Tout est cassé"
"Je suis revenue chez moi et je n'ai trouvé que destruction", affirme à l'AFP Maryam, encore sous le choc.
"Tout est cassé ou volé", ajoute la jeune femme au voile multicolore lui cachant le bas du visage.

A ses côtés, les combattant FDS assurent que la maison était dans cet état lorsqu'ils sont arrivés la veille. "Je n'accuse personne", se défend Maryam.

Elle aussi essaie de prendre ce qu'elle peut de ses affaires personnelles, des abayas orange et bleue, un châle blanc en laine, les chaussures de ses filles et des jouets. Alors que l'EI interdisait aux femmes de porter des vêtements en couleurs --l'abaya et niqab noirs étaient de rigueur--, Maryam a une certaine affection pour ces habits colorés. "J'aimerais les emporter", confie-t-elle.

En pensant à la guerre qui gronde à quelques km de là, elle se tait un moment puis lance: "il y a des gens qui meurent dans leurs maisons alors que nos enfants sont sains et saufs".
"Il faut dire merci à Dieu. Tout peut être réparé", ajoute-t-elle.

 

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