Coopération entre le Liban et le Hamas : cherchez le Qatar !

La semaine dernière, les bonnes nouvelles sécuritaires et militaires se sont succédé. L'armée libanaise a réussi, à travers une opération préventive précise, à déjouer les plans d'une cellule terroriste qui se cachait dans les camps de déplacés autour de Ersal, prévoyant une série d'attaques dans plusieurs endroits du pays.
En dépit du tollé suscité par certains activistes sociaux qui se sont empressés d'accuser l'armée d'avoir violé les droits des déplacés civils et d'adopter des mesures racistes, le climat général était à la satisfaction, au Liban et dans les chancelleries occidentales qui ont estimé que l'armée avait accompli un excellent travail préventif dans la lutte contre le terrorisme. Preuve en est que les terroristes présumés recherchés ont préféré se faire sauter dans les camps de déplacés où ils s'étaient réfugiés.

En même temps, une autre bonne nouvelle, dans la lutte contre le terrorisme, est tombée vendredi avec l'annonce de la remise aux autorités libanaises et en particulier à la Sûreté générale en charge de cette enquête, du Palestinien Khaled Massaad qui se fait appeler « as-Sayed ». Cet homme est soupçonné par la Sûreté générale d'être le cerveau de plusieurs cellules terroristes, assurant le lien entre ces cellules et le siège principal du groupe État islamique à Raqqa. Il serait aussi en charge de la planification d'attentats et du recrutement des kamikazes. Il aurait ainsi planifié deux attentats-suicides pendant la période du ramadan, l'un à Tripoli, l'autre à Nabatiyé pour faire monter les tensions confessionnelles et faire croire aux uns que le second attentat est une vengeance à la suite du premier attentat.

Après une cavale complexe, Khaled Massaad avait atterri, selon les informations de la Sûreté générale, au camp de Aïn el-Héloué où il s'est placé sous la protection des groupes islamistes Esbat al-Ansar et le Hamas. Théoriquement, les autorités libanaises sont interdites d'entrer dans les camps palestiniens depuis les accords du Caire signés en 1969. À cause des dispositions de cet accord (officiellement abrogé, mais en pratique toujours en vigueur), de nombreux repris de justice se sont réfugiés dans les camps pendant des années, comme par exemple les assassins des quatre juges de Saïda (1999). D'autres aussi ont été livrés aux autorités libanaises suite à des négociations avec les parties palestiniennes. Dans le cas de Khaled Massaad, dit as-Sayed, les autorités libanaises ont tout essayé pour obtenir que le terroriste présumé leur soit livré en raison de l'importance de son rôle dans la préparation d'attentats au Liban.

Selon des informations sécuritaires, la Sûreté générale aurait même adressé un ultimatum aux différentes factions palestiniennes, et en particulier à la commission conjointe chargée de la sécurité des camps, pour remettre as-Sayed, sinon, elle serait contrainte à agir différemment pour procéder à son arrestation. Elle s'apprêtait même à mettre au point un plan audacieux pour l'attirer hors du camp et l'arrêter. Mais à l'aube de dimanche, Khaled Massaad a été remis au barrage de l'armée libanaise à l'entrée du camp de Aïn el-Héloué. L'armée l'a ensuite remis à la Sûreté générale en charge de l'enquête.

Que s'est-il donc passé pour que les factions palestiniennes décident de lâcher as-Sayed ? Des informations sécuritaires précises affirment que c'est le Hamas qui a fait pression sur Esbat al-Ansar et sur Khaled Massaad lui-même pour qu'il se rende aux autorités libanaises. Après une période de tension avec les autorités libanaises et avec le Hezbollah, en raison des développements de la guerre en Syrie (qui avaient d'ailleurs poussé la plupart des chefs du Hamas installés sur le sol libanais à se rendre au Qatar), le Hamas aurait donc décidé de donner des signes de bonne volonté et de rétablir ses relations d'antan avec l'axe dit de la résistance.

Selon les sources précitées, le nouveau bras de fer entre l'Arabie saoudite et ses alliés, d'une part, et le Qatar, de l'autre, ne serait pas étranger aux nouvelles dispositions du Hamas à l'égard du Liban et en particulier à l'égard du Hezbollah. Après avoir été le fer de lance de la guerre en Syrie contre le régime du président Assad et ses alliés, dont le Hezbollah, le Qatar serait donc en train de revoir ses positions régionales et pousserait le Hamas, dont il est depuis des années le protecteur et le bailleur de fonds, à en faire de même. Le premier indice de cette nouvelle attitude aurait donc été la décision prise par le Hamas de pousser Khaled Massaad à se rendre aux autorités libanaises.

Des sources sécuritaires proches du dossier palestinien estiment que désormais les relations avec le Hamas devraient s'améliorer, cette organisation ayant décidé de se rapprocher de l'axe dit de la résistance. Deux responsables de l'organisation auraient fait de rapides visites au Liban au cours des dix derniers jours pour rétablir les ponts avec le Hezbollah et avec les autorités libanaises, sur le plan notamment de la coopération sécuritaire à l'intérieur des camps palestiniens. Les mêmes sources sécuritaires précisent que les deux responsables du Hamas ne comptent pas s'établir au Liban, ayant des propositions intéressantes à ce sujet en Turquie et en Malaisie, mais cela ne signifie pas qu'ils n'ont pas l'intention de rétablir la coordination avec le Hezbollah et bien sûr avec les autorités libanaises au sujet de la lutte contre le terrorisme.