Lundi 5 juin 2017, une employée de maison éthiopienne est retrouvée pendue à la branche d'un arbre, dans le jardin de la maison de ses employeurs, à Blida, dans le caza de Marjeyoun. La malheureuse était au service de la famille depuis trois mois seulement. Un médecin légiste a été dépêché sur les lieux du drame. L'enquête est en cours pour déterminer les circonstances du décès.
Le dimanche 28 mai 2017, une employée de maison éthiopienne meurt après une chute du septième étage de l'immeuble où résident ses employeurs à Sin el-Fil. Elle avait la trentaine. Son corps a été transporté à la morgue d'un hôpital proche.
La liste est longue d'employées de maison anonymes, toutes étrangères, qui décèdent chez leurs employeurs libanais après une chute d'un étage élevé, par pendaison ou autre. Ont-elles tenté de se tuer par désespoir, pour une raison ou pour une autre ? Sont-elles tombées dans le vide après avoir essayé de s'enfuir, car enfermées à clé dans l'appartement ? Ont-elles perdu l'équilibre en nettoyant les vitres ? L'enquête officielle ne le dit jamais. Les autorités se contentent de classer les affaires, l'une après l'autre, et concluent à un suicide dans la grande majorité des cas. Les agences de presse, elles, consacrent à ces drames tout au plus quelques lignes laconiques, comme reprises plus haut, dans la rubrique des faits divers. Avant de passer à autre chose.
Cela dure depuis plusieurs décennies. Depuis que la main-d'œuvre féminine migrante d'Afrique ou d'Asie a pris le chemin du Liban, pour y travailler au service de familles libanaises, comme employées de maison, nounous d'enfants, cuisinières ou auxiliaires de vie, moyennant des salaires de misère. Car la main-d'œuvre locale a depuis longtemps déserté ces professions mal payées et peu considérées, qui ne sont pas reconnues par le code du travail, à l'instar des emplois de jardiniers ou de chauffeurs.
La main-d'œuvre migrante vient au Liban pour y travailler et non pas pour y mourir. Son objectif ? Améliorer les conditions de vie des siens restés au pays et mettre de côté de quoi vieillir dignement. Mais au pays du Cèdre, aucune loi ne réglemente le travail domestique. Encouragé par le système du garant ou kafala qui le rend responsable de son employée de maison, l'employeur est facilement poussé à la dérive, d'autant que cette dernière vit chez lui. Sans oublier qu'il a souvent payé des milliers de dollars de commission d'agence pour embaucher son employée domestique.
Pas question pour nombre d'employeurs de l'autoriser à sortir seule. Elle restera à la maison, enfermée à clé, même le dimanche. Pas question non plus de lui permettre de garder son passeport. Ce dernier est une garantie contre la fuite...
Dans la foulée, certains patrons s'octroient le droit de sanctionner leur employée de maison, de retenir des sommes sur son salaire ou tout bonnement de ne pas la payer.
Fort heureusement, les bons employeurs existent, mais les abus sont légion, sans oublier parfois la maltraitance, les abus sexuels, les viols.
Pas étonnant dans ce cadre que certaines travailleuses désespérées tentent de mettre fin à leurs jours. Pas étonnant non plus qu'elles mettent leur vie en danger pour fuir par tous les moyens leur calvaire quotidien.
Dans l'indifférence générale. Jusqu'à quand ?
Le décret de l'abolition de l'esclavage en France, a été signé le 27 avril 1848 mais pas au Liban en 2017 au XXIè siècle.
19 h 38, le 08 juin 2017