Le président français élu Emmanuel Macron va devoir rassembler un pays profondément divisé et s'attaquer à des chantiers majeurs, de la lutte contre le chômage à la relance de l'Europe.
"Son premier sujet va être d'obtenir une majorité (aux législatives des 11 et 18 juin) qui lui donne les coudées franches pour réformer", note Stéphane Rozès, président de Cap (Conseils, analyses et perspectives).
Réduire les fractures
Ce centriste pro-européen de 39 ans hérite d'un pays fracturé, qui a voté à près de 50% aux extrêmes - contre l'Europe, la mondialisation et les "élites" - au premier tour du scrutin le 23 avril.
L'analyse des votes montre aussi une France divisée en deux, entre zones urbaines, plutôt favorisées, réformatrices et zones plus déshéritées -"périphériques" disent les sociologues-, massivement favorables à l'extrême-droite.
Elu avec plus de 65% des voix, Emmanuel Macron sait que beaucoup l'ont soutenu pour barrer la route à l'extrême droite. Ces votes dits "d'élimination", et non de "conviction" n'engagent pas le choix pour les législatives de juin.
Selon Stéphane Rozès, le clivage Macron/Le Pen, "clivage identitaire, national, existentiel et non pas clivage habituel gauche/droite" pourrait "perdurer aux législatives".
Majorité introuvable ?
Emmanuel Macron promet de dépasser les partis traditionnels, de droite comme gauche, pour créer une nouvelle majorité au centre aux législatives de juin.
Celui qui dit porter le renouvellement politique va devoir traduire son score présidentiel en sièges à l'Assemblée nationale avec son tout jeune mouvement en Marche!, créé en avril 2016.
Il se dit convaincu que les Français sauront lui faire à nouveau confiance dans les urnes, grâce à la dynamique de la présidentielle.
Mais la droite conservatrice compte bien se relever de l'échec cinglant de son candidat François Fillon au premier tour de la présidentielle -- 20,01% sur fond d'affaire d'emplois fictifs -- et lui imposer une cohabitation.
A gauche de l'échiquier politique, le Parti socialiste est en miettes mais le candidat de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, reste en embuscade, fort de son score du premier tour (19,6%).
Chômage
Comme ses prédécesseurs, le nouveau président sera jugé à l'aune de l'emploi, dans un pays plombé par un chômage endémique - 10%, contre 3,9% en Allemagne et 8% en moyenne dans l'Union européenne.
"Nous sommes le dernier grand pays de l'UE qui n'a pas réussi à résoudre le chômage de masse", martèle-t-il.
Il veut réformer à marche forcée le marché du travail, dès l'été, en procédant par ordonnances. Cette procédure expéditive permet d'adopter un texte sans débats parlementaires mais pourrait susciter des protestations sociales.
Il table sur un retour au plein emploi, avec 7% de chômage en fin de quinquennat, à travers des mesures libérales - baisses de charges pour les entreprises ou primauté, assouplissement des règles régissant le temps de travail.
Le terrorisme, épée de Damoclès
Le 20 avril à Paris, en pleine campagne électorale, l'attentat des Champs-Elysées qui a coûté la vie à un policier a rappelé que la France vivait sous la menace jihadiste. Les attaques perpétrées au nom du groupe Etat islamiste (EI) y ont fait 239 morts depuis janvier 2015.
"Daech (acronyme arabe de l'EI, ndr) ne cache pas sa volonté de faire voler en éclats la cohésion nationale en exacerbant les tensions entre les musulmans et le reste de la population", relève Marc Hecker, expert à l'Institut français de relations internationales (IFRI).
Si l'EI semble de plus en plus acculé, "la menace terroriste va rester très élevée au cours des prochaines années", anticipe-t-il en pointant le défi posé par les Français partis par centaines faire le jihad en Syrie et Irak, et leur possible retour.
Sans expérience sur les sujets régaliens, Emmanuel Macron va aussi devoir assumer pleinement son rôle de chef des armées.
Au Sahel comme au Moyen-Orient, l'engagement militaire français va se poursuivre sous sa forme actuelle, selon le général Jean-Paul Paloméros, qui l'a conseillé.
Emmanuel Macron veut aussi renforcer les frontières extérieures de l'UE et plaide pour une augmentation massive des effectifs de l'agence Frontex, de 1.000 à 5.000 postes. Il veut aussi "développer l'Europe de la défense".
Refonder l'Europe
Emmanuel Macron promet de faire repartir le moteur franco-allemand, préalable selon lui à toute relance de l'UE, ébranlée par le choc du Brexit et la crise des réfugiés.
Il compte faire "un tour des capitales européennes" afin de proposer une "feuille de route à cinq ans pour doter la zone euro d'un vrai budget et pour une vraie Europe à 27 de l'environnement, de l'industrie et de la gestion des migrations".
"Réformer l'UE semble bien beau sur le papier, mais les idées de Macron sont audacieuses: il veut un budget et un ministre pour la zone euro. Tout cela est-il bien réaliste vu que cela demanderait de changer les traités?", prévient Vincenzo Scarpetta, analyste au centre de réflexion Open Europe.
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Bizarre cet article de "CAP "...? la dette d'état ou plus communément appeler l'ardoise de F.Hollande d'environ 2 500 Milliards (pour la partie visible) est pratiquement passée sous silence ...?
07 h 45, le 08 mai 2017