Depuis la visite officielle menée début janvier par le président de la République, Michel Aoun, à Riyad puis à Doha, les milieux d'affaires libanais guettent les signes d'une amélioration concrète des relations économiques entre le Liban et ses partenaires du Golfe. Un souhait partagé par la plupart des intervenants au panel intitulé « Le Liban et le Golfe : un nouveau partenariat économique », lors du Lebanon Economic Forum, organisé hier par le groupe al-Iktissad wal Aamal à l'hôtel Phoenicia de Beyrouth. « Il est important de donner une forte impulsion aux relations entre le Liban et les pays du Golfe, car nul n'ignore qu'elles connaissent un refroidissement qui impacte l'activité touristique, les investissements et les échanges commerciaux (même si) des efforts sont founis pour remédier à cette situation », a déclaré le président du groupe al-Iktissad wal Aamal, Raouf Abou Zaki.
« Nous souhaitons que nos frères du Golfe nous refassent confiance. L'objectif du gouvernement est de supprimer tout obstacle au retour des visiteurs », a assuré le ministre du Tourisme, Avédis Guidanian. Pour rappel, les États du Conseil de coopération du Golfe (CCG) – Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Qatar, Koweït et Bahreïn – avaient appelé en février 2016 leurs ressortissants à ne pas se rendre au Liban ou à quitter le pays, en raison de tensions diplomatiques. En 2012, les pays du CCG avaient déjà lancé un appel similaire à leurs ressortissants suite à des menaces sécuritaires. Résultat, la fréquentation des touristes en provenance du Golfe s'est effondrée: en 2016, les Saoudiens représentaient 7 % du total des touristes, en chute de 78 % par rapport à 2010 ; les Koweïtiens 5 % (-73 % par rapport à 2010) et les Émiratis 0,4 % (- 95 %). « Nous allons commencer par lutter contre l'exploitation et les arnaques que subissent les touristes du Golfe. Le ministère collera bientôt des étiquettes avec un numéro vert aux entrées de tous les établissements touristiques du pays, et les touristes pourront signaler toute infraction au ministère », a déclaré M. Guidanian lors du panel. « Le secteur touristique libanais a de nombreux atouts car il offre des prix compétitifs, un très bon rapport qualité/prix et des ressources humaines hautement qualifiées », a plaidé de son côté le PDG de Golden Tulip Mena et du Louvre Hotels Group, Amine Moukarzel. « Il faudrait cependant constituer un fonds financé par les pays du CCG afin de soutenir les investissements visant à moderniser certaines infrastructures touristiques, à commencer par un agrandissement de l'Aéroport international de Beyrouth », a-t-il suggéré.
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« Rien n'a changé »
Une demande qui s'est heurtée aux attentes des autres conférenciers ressortissants des pays du CCG, qui ont exposé plusieurs conditions au retour des investisseurs arabes. « Une réforme des régulations libanaises en matière de gestion des affaires, une amélioration de la situation politico-sécuritaire locale et une lutte contre la corruption sont les meilleurs moyens pour réussir une coopération entre le Liban et les pays du Golfe », a averti l'ancien ministre des Finances koweïtien, Badr al-Humaidhi, avant de rappeler que les pays du Golfe n'avaient toujours pas levé officiellement l'interdiction pour leurs ressortissants de séjourner au Liban. « En revenant après cinq à sept ans d'absence, nous avons l'impression que rien n'a changé au Liban au niveau de la qualité des infrastructures. Le Liban doit améliorer ses infrastructures s'il souhaite attirer des investisseurs », a alerté pour sa part Jamal Moaibed, PDG du groupe industriel saoudien Moaibed Group.
De son côté, le représentant de la Société financière internationale (SFI, bras financier de la Banque mondiale) au Liban, Saad Sabrah, a plaidé pour l'instauration d'une coopération « gagnant-gagnant » entre le Liban et les pays du CCG. « Aujourd'hui, les investissements des pays du Golfe au Liban se limitent quasiment au secteur bancaire. Pour encourager ces investissements dans d'autres secteurs de l'économie libanaise, il faut les doter d'avantages comparatifs. Et en contrepartie de ces investissements, le Liban devrait s'impliquer dans la formation des ressources humaines des pays du CCG », a-t-il préconisé. Une pratique déjà amorcée par M. Moukarzel. « Dans mes hôtels en Arabie saoudite, je suis tenu de recruter un quota d'employés locaux », a-t-il affirmé.
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commentaires (3)
Et que dit HN ?
FAKHOURI
15 h 38, le 17 mars 2017