Des youyous pour accueillir les forces irakiennes dans l'ouest de Mossoul

C'est derrière des portes entrouvertes que des enfants curieux ont suivi vendredi l'entrée dans la partie ouest de Mossoul des forces irakiennes venues chasser les jihadistes de leur dernier grand bastion en Irak.

"Rentrez, rentrez, il y a des snipers", leur ont lancé des hommes de la Force d'intervention rapide (FIR), peu avant le sifflement de balles du groupe Etat islamique (EI) au dans le quartier de Jawsaq. Des Humvees s'engouffrent dans un entrelacs de ruelles, accompagnés au sol par des hommes qui guettent la présence d'éventuels véhicules piégés ou de kamikazes.

Dans le premier ensemble de bâtiments se trouve une mosquée verte d'où, selon le général Abbas al-Joubouri, commandant de la FIR, les jihadistes avaient défendu leurs lignes plus tôt dans la journée.
Balles et éclats d'obus ont défiguré ses murs. Devant la mosquée gisent deux jihadistes.
Les autres murs du quartier témoignent de la présence de l'EI depuis plus de deux ans: d'un graffiti de leur drapeau noir à l'inscription "Réservé à l'Etat islamique". Sur un autre mur on peut lire: "Il est interdit aux jeunes de s'asseoir ici sur ordre de la police religieuse" des jihadistes.

Des soldats passent de maison en maison, glanent des informations sur les combattants de l'EI qui seraient toujours dans les parages ou sur des caches d'explosifs. Alors que les troupes ont sécurisé les premières rues du quartier, des civils s'aventurent à l'extérieur, saluant les soldats lors de leur passage.

Du seuil de leurs maisons, des femmes lancent des youyous, pendant qu'un groupe d'hommes supplient un soldat de leur donner des cigarettes. "Je n'en ai plus, je jure que je n'en ai plus", répond le soldat à bord d'un convoi qui avance doucement dans ce quartier situé au nord de l'aéroport, dont les forces irakiennes ont pris le contrôle jeudi.

 (Repère : La bataille pour Mossoul : ce que l'on sait)

'Liberté'
"Je savoure le goût la liberté pour la première fois depuis plus de deux ans", dit Moqdad Ahmed, portant la barbe imposée par l'EI. "Pendant deux ans, nous avons vécu sous leurs ordres: pantalons courts, barbes, pas de cigarettes".

"Les femmes devaient couvrir leur visage et leur corps et ne pouvaient pas sortir sans un homme", poursuit-il.
Il raconte avoir retiré ses enfants de l'école après que l'EI a voulu y introduire un programme sur les armes et la guerre. "Je fais la prière, mais avec eux vous étiez dans l'obligation d'aller à la mosquée sinon ils vous imposaient une amende".

Dans une autre maison, une vieille femme entourée de sa famille est à peine capable de voir ou d'entendre l'arrivée des soldats dans sa cour. "Ils disent 'bonjour' mamie", dit l'une de ses petites filles.

Selon le général al-Joubouri, ses forces avaient repris environ deux kilomètres carrés de l'ouest de Mossoul en fin de journée. Il a indiqué que "la plupart des jihadistes dans le secteur, dont des étrangers, ont été tués ou ont fui vers le nord" de la ville. Mais les combattants de l'EI ne semblent pas s'être retirés complètement de Jawsaq. Des échanges de tirs avaient toujours lieu à la tombée de la nuit.

Un tireur embusqué ouvre le feu sur des soldats qui traversaient la rue. "Contre le mur, contre le mur", crient les soldats à leurs camarades plus avancés. Alors qu'ils avancent, une voiture piégée explose propageant une fumée noire et des morceaux de métal dans le ciel.

Lire aussi

Ils fuient Mossoul-Ouest pour « rentrer à la maison »

Quelles sont les forces qui combattent l'EI à Mossoul ?

À Mossoul-Ouest, « un maigre repas par jour »

« Le même homme m’a violée chaque jour pendant un mois »

« Nous apprenons régulièrement que des personnes meurent de malnutrition » à Mossoul-Ouest

« Restez chez vous » : l'appel aux habitants de Mossoul divise

À Mossoul, l'EI troue des maisons et fait payer les habitants

À Mossoul, les forces irakiennes confrontées aux kamikazes et aux drones de l'EI

Les enfants "ont vu des choses que personne, peu importe son âge, ne devrait voir"