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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Réconciliation Hamas-Fateh : les Cisjordaniens plus sceptiques que jamais

Il y a une dizaine de jours, les principaux partis palestiniens annonçaient depuis Moscou avoir trouvé un accord sur la formation d'un gouvernement d'union nationale et la tenue imminente d'élections, sans provoquer l'enthousiasme.

Un membre des forces de sécurité palestiniennes porte une grande photo du président Mahmoud Abbas, lors d’une cérémonie de graduation militaire à Jéricho en Cisjordanie. Mohammad Torokman/Reuters

« On en a ri un bon moment quand on l'a appris. » C'est ainsi qu'ont réagi Samah*, une sympathisante du mouvement Hamas près d'Hébron – la plus grande ville de Cisjordanie –, et ses amies à l'annonce, le 17 janvier dernier de Moscou, par les partis palestiniens, d'une grande réconciliation nationale.

« J'aimerais y croire, et je rêve même de ce retour à l'unité, mais je ne pense pas que ce soit réaliste dans les conditions actuelles », explique cette enseignante. Comme elle, 61 % des Palestiniens se disent pessimistes quant aux chances de réconciliation du Hamas et du Fatah, selon le dernier sondage du Centre palestinien de politique et d'études d'opinion (PSR) de Ramallah.
Les médias nationaux font écho à ce scepticisme. La nouvelle a peiné à paraître en une des quotidiens locaux, où les titres parlaient encore de la conférence de Paris, plusieurs jours auparavant, puis de l'entrée en fonction de Donald Trump. Aussi, beaucoup de Palestiniens ne sont même pas au courant des déclarations de leurs dirigeants.

Pourtant, la nouvelle a son importance. Cette année marquera les dix ans du divorce entre les deux principaux mouvements de la vie politique palestinienne, le Fateh et le Hamas. De nombreuses tentatives de médiation ont déjà échoué. Cette fois-ci, des représentants du Fateh, du Hamas, du Jihad islamique et d'autres partis palestiniens se sont réunis dans la capitale russe et sont convenus de lancer des consultations sur la création d'un gouvernement d'union nationale.
« La réaction des Palestiniens est le résultat de ces années d'errance. D'une part, oui, il y a une aspiration à l'union nationale qui soit salvatrice et mette fin aux souffrances du peuple. D'autre part, les Palestiniens voient bien la réalité et ne peuvent pas prendre leurs désirs pour des réalités », analyse Mkhaimar Abusada, professeur agrégé de sciences politiques à l'université al-Azhar de Gaza.

Il cite les points sur lesquels achoppent les négociations, notamment la question du pouvoir et des hommes du Hamas dans la bande de Gaza : « Il y a 43 000 fonctionnaires et 5 000 employés intérimaires qui travaillent pour le Hamas dans la bande de Gaza, et sur ce même territoire, l'Autorité palestinienne a 50 000 employés qui ne peuvent pas travailler : qui payer, et comment ? »
Selon lui, il est difficile pour les Palestiniens de croire à une avancée politique quand la situation sur le terrain est aussi inquiétante. En Cisjordanie, des dizaines d'arrestations ont eu lieu ces dernières semaines, particulièrement autour de Bethléem. Sur le plan diplomatique, la nouvelle administration américaine pourrait déplacer son ambassade en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem, reconnaissant son statut de capitale de l'État hébreu. Et surfant sur l'investiture de Trump, lsraël accélère son offensive en matière de colonisation.

 

(Lire aussi : Le Hamas fait taire la grogne des Gazaouis, mais la colère couve)

 

 

Gaza
Même la bande de Gaza a été secouée par une vague de manifestations. Une très sérieuse pénurie d'électricité avait conduit des milliers de Gazaouis dans les rues début janvier, tandis que les deux organisations dirigeantes palestiniennes se rejetaient la responsabilité de la crise. Finalement, le Qatar a permis le retour au calme en acheminant des centaines de milliers de litres de carburant dans le territoire.
« On peut voir cette annonce, après des mois de négociations stériles, comme une réponse à cette crise », commente l'universitaire, qui y voit le signe de l'impuissance générale : « Les Palestiniens ont bien vu que les deux partis n'ont pas l'envie, l'intérêt, ou même les moyens de se réconcilier, et ils ne peuvent pas croire à cette annonce qui semble être uniquement faite pour les rassurer. »

À Ramallah, où siège l'Autorité palestinienne, les politiciens prétendent exactement le contraire. Ce ne serait pas par opportunisme mais bien pour faire face aux nombreux défis de ce début 2017 que l'union est essentielle. Jibril Rajoub, membre du comité central du Fateh et proche du pouvoir, donne pour signes d'encouragement la rencontre au Qatar entre le président Mahmoud Abbas et Khaled Mechaal, chef du Hamas en exil, ou la lecture d'une lettre de ce dernier lors du congrès du Fateh fin novembre. Alors qu'il s'apprête à rejoindre l'une des nombreuses réunions du parti sur la question de l'union nationale, il martèle avec passion : « Nous y sommes presque. » Un vœu pieux pour la nouvelle année ?

* Le prénom a été changé.

 

 

 

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