L'attentat déjoué de Hamra serait-il l'indice d'une situation instable qui se prête à toutes les éventualités, y compris un report des législatives ? À l'heure où les milieux politiques oscillent entre le respect des délais du scrutin, même s'il faut maintenir l'ancienne loi électorale, et un nouveau report des législatives, avec une promesse – maintes fois désavouée au cours des cinq dernières années – d'élaborer une nouvelle loi électorale, prétexter une quelconque menace sécuritaire semble un moyen facile de justifier toutes les issues politiques.
Ainsi, et bien que le ministre de l'Intérieur ait eu le feu vert pour respecter le calendrier des prochaines législatives, et bien qu'il se soit engagé lors de la dernière séance législative à transmettre sa demande au Conseil des ministres de demain pour former le comité de supervision des législatives, il s'est finalement abstenu de le faire. Les 63 clauses de l'ordre du jour transmises aux ministres préalablement à leur réunion à Baabda, demain, n'incluent ni la désignation de ce comité ni une demande de déblocage des crédits nécessaires pour mettre en marche les préparatifs du scrutin. Selon des sources du ministère de l'Intérieur, le travail est en cours pour présenter au Conseil des ministres la demande de former le comité de supervision la semaine prochaine.
Certes, tout semble indiquer que les parties politiques dans leur ensemble – à l'exclusion des indépendants – ne seraient pas lésées par le maintien de l'ancienne loi électorale, y compris le tandem Forces libanaises-Courant patriotique libre. Mais un nouveau report des élections permettrait aux blocs parlementaires de maintenir leur rôle respectif dans la prise de décision, en concoctant une loi électorale qui préserverait tant bien que mal leur représentativité.
Vu l'impossibilité d'aboutir à une nouvelle loi électorale dans les délais, il se pourrait qu'un scénario soit mis en œuvre pour mettre l'opinion publique devant l'alternative qui tourmente la caste politique : tenir les législatives sur la base de l'ancienne loi ou les reporter pour donner le temps à une nouvelle loi de voir le jour. Pour ce faire, il se pourrait, à en croire certaines sources, que le Conseil des ministres et le Parlement feignent de tout faire pour mettre au point une nouvelle loi électorale, quitte à soumettre au vote les dix-sept projets et propositions de loi existants. S'ensuivrait l'annonce d'un accord politique général qui offrirait aux Libanais le choix entre une nouvelle loi électorale mixte moderne, dont la mise en œuvre justifierait un report technique d'un an, ou la tenue des législatives à temps, mais sur la base de l'ancienne loi prétendument honnie de tous.
Il est néanmoins des signaux qui présagent de la tenue des législatives à temps, sur la base de l'ancienne loi : la majorité des forces politiques semble convaincue que cette option serait l'option la moins risquée. Cela vaut aussi bien pour le Courant du futur, pourtant affaibli actuellement, que pour le ministre Gebran Bassil, qui aurait le plus intérêt à la tenue du scrutin au plus vite.
Du reste, des amendements pourraient toucher la loi de 1960 d'ici au 21 février.
En somme, la caste politique dispose désormais des moyens de couvrir l'une ou l'autre option qui se présente à elle : le report du scrutin sans brusquer l'opinion et sa tenue de manière à préserver l'équilibre des forces en vigueur.