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Liban - Rapt

« Si l’État n’a pas encore libéré Saad Richa, c’est que les voyous sont plus forts que lui »

Les proches de l'otage se sont mobilisés hier et ont coupé des routes dans la Békaa pour faire pression sur les pouvoirs publics.

De gauche à droite, le beau-frère, le neveu et la sœur de Saad Richa postés sur l’autoroute menant à Chtaura.

Kidnappé mercredi après-midi à Qab Élias, Saad Richa, 74 ans, n'a toujours pas donné signe de vie. Identifiés par les forces de sécurité, ses ravisseurs sont originaires de la région de Brital, mais aucun d'eux n'a été arrêté pour l'instant. La famille de Saad Richa a poursuivi hier le blocage des artères principales de la Békaa dans l'espoir de faire pression sur l'État pour faire libérer Saad au plus vite, mais également pour alerter l'opinion publique sur l'insécurité grandissante dans la région.

La tension était palpable hier dans la Békaa, deux jours donc après l'enlèvement de Saad Richa, propriétaire d'un magasin de vente en gros de produits alimentaires. Alertés à propos de la fermeture des routes principales de la Békaa, les camions de transport des marchandises qui se rendent en Syrie sont restés stationnés au niveau de Bhamdoun, en attendant de pouvoir reprendre la route. Les rues de Jdita, de Chtaura, de Mreijate et de Qab Élias sont restées vides hier, les commerçants de la région ayant fermé leurs magasins en signe de solidarité. Même les écoles de la région ont chômé.

La famille du septuagénaire a bloqué plusieurs routes hier, notamment celle reliant Chtaura à Dahr el-Beidar, et celle reliant Zahlé à Saadnayel, ainsi que d'autres routes dans les villages avoisinants, dans l'espoir d'attirer l'attention de l'État sur une des plaies principales de la région, le rapt avec demande de rançon.
Sauf qu'aucune rançon n'a pour l'instant été demandée à la famille Richa, « sans doute à cause de l'effervescence médiatique autour de l'affaire », estime Hoda, la sœur de Saad Richa. « Les ravisseurs ne s'attendaient pas à une telle réaction de notre part. Nous continuerons à manifester tant que Saad ne sera pas rentré », ajoute-t-elle.

« Saad prend dix-sept médicaments par jour, mais ne connaît pas le nom de ses médicaments, c'est sa femme qui les lui donne. Nous avons rendu publique la liste de ses médicaments, mais nous doutons que les kidnappeurs les lui ont fournis. Cela fait deux jours qu'il n'a pas pris son traitement. Il s'agit de médicaments pour le cœur, la tension artérielle ainsi que des anticoagulants », explique Hoda Richa, qui craint pour la santé de son frère.

Le président de la Fédération des syndicats des transporteurs terrestres, Bassam Tleiss, envoyé par le président du Parlement et leader du mouvement Amal, Nabih Berry, s'était rendu mercredi à Brital pour négocier avec les ravisseurs. Plus tôt dans la soirée, les pères de deux suspects soupçonnés d'être impliqués dans l'enlèvement avaient été arrêtés par les forces de sécurité.

Réuni hier avec le ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk, le chef du législatif, Nabih Berry, a estimé que le dossier des kidnappings dans la Békaa « doit être traité une fois pour toutes par l'armée et les forces de sécurité ». « M. Berry est en contact avec toutes les personnes concernées par le rapt de Saad Richa et il insiste pour la mise en place d'un plan sécuritaire pour la Békaa qui soit différent de tous les plans qui ont été appliqués auparavant. J'ai demandé rendez-vous avec le président de la République pour évoquer ce plan sécuritaire en détail », précise Nouhad Machnouk.

Dans une interview hier à la chaîne MTV, le mufti de Zahlé et de la Békaa, le cheikh Khalil Meiss, a affirmé que les habitants de Brital s'étaient désolidarisés des kidnappeurs et qu'ils soutenaient pleinement la famille de Saad Richa.

 

« Ces voyous sont plus forts que l'État »
Dans la tente dressée par la famille Richa sur la partie coupée de la route de Mreijate, un des neveux de Saad Richa laisse éclater sa colère. « Le nouveau mandat commence par un kidnapping, quel beau début pour cette nouvelle année ! Nous pensions que nous aurions un peu de sécurité maintenant que le président de la République a été élu », lance-t-il.

Mohammad Dib, boulanger établi à Jdita depuis de nombreuses années, évoque une situation de « tension, de colère et de tristesse » dans la région. « Tout le monde est solidaire de la famille du kidnappé. Il s'agit de voyous qui ont agi pour l'argent. J'espère que l'État va nous assurer plus de sécurité », dit-il.

Marwan Mechaalani, gérant d'une épicerie à Mreijate, connaît bien Saad Richa avec qui il entretient des relations professionnelles et amicales. « Saad est un homme bien. Il n'a pas d'ennemis et n'a jamais été affilié à un parti politique », explique-t-il en montrant un chapelet qu'il porte à la main et que Saad lui a ramené de Notre-Dame de Béchouate. « Nous ne vivons pas dans un État, ni même dans un zoo. Parce que, dans le zoo, il y a des grilles, des gardiens et un règlement à respecter. Alors qu'ici rien n'est respecté », souligne Marwan qui demande « aux hommes d'État de s'acquitter de leur tâche ». « Ces voyous sont plus forts que l'État, cela fait vingt ans que nous subissons la même chose », lance-t-il avant de dénoncer « les voitures aux vitres fumées et sans plaques d'immatriculation qui circulent librement dans la région ». « Nous vivons une colère et un dégoût face au quotidien. Je me demande chaque soir, lorsque vient le temps de fermer mon magasin, si je ne vais pas être volé ou agressé », dit encore Marwan. « Il faut que l'État soit ferme puisqu'il connaît les ravisseurs, mais s'il n'a encore rien fait, c'est que ces derniers sont plus forts », conclut-il.

 

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