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Liban - Gouvernement

L’enjeu pour Hariri : éviter l’enlisement dans les marchandages

Saad Hariri. Photo d'archives. Anwar Amro/AFP

Le bazar de l'attribution des portefeuilles et des quotes-parts auxquelles aurait droit telle ou telle formation ou bloc politique s'est poursuivi hier à un rythme vertigineux. Ainsi, la valse des noms des ministrables a fixé le rythme des enchères de part et d'autre, lancées par déclarations politiques interposées. À la manière d'une Bourse, certains noms apparaissaient subitement, d'autres perdaient partiellement ou totalement leur valeur, d'autres encore refaisaient surface remettant à zéro les compteurs des négociateurs.
Pour les plus optimistes, les obstacles à une formation rapide du futur gouvernement « ne sont pas insurmontables » et devraient être résolus en peu de temps. Pour d'autres, le puzzle à mettre en place est tellement complexe qu'il est quasiment impossible d'espérer voir un gouvernement avant le 22 novembre, comme souhaité.

La naissance du futur gouvernement est rendue d'autant plus difficile qu'elle est régie par le principe basique de l'incompatibilité de l'offre et de la demande, l'appétit d'un grand nombre de protagonistes étant souvent démesuré par rapport au nombre de portefeuilles à distribuer, parfois même au poids réel des acteurs. Outre la difficulté à contenter toutes les parties – y compris ceux qui n'ont pas voté pour le président Michel Aoun comme les Kataëb, les Marada et bien entendu le président de l'Assemblée, Nabih Berry – deux nœuds gordiens continuent de bloquer le processus : tout d'abord l'attribution du ministère des Finances, convoité par plusieurs parties, notamment M. Berry et les FL ; le second, le problème de la majoration de la quote-part du bloc aouniste d'une part additionnelle : celle du président, lui-même issu de ce bloc et qui se prévaut désormais d'une quote-part qui est à distinguer de celle de sa formation.

Cette nouvelle revendication, « une hérésie » selon certains, n'a pas facilité les choses. C'est ce qui fera dire au député de la Jamaa islamiya, Imad el-Hout, qu' « une telle innovation devra s'appliquer de la même manière au chef du gouvernement et au président du Parlement, ce qui est inacceptable ». Ce dernier a d'ailleurs exhorté le Premier ministre désigné, Saad Hariri, à « ne pas faire de cette innovation une coutume qui contrevient à l'esprit de l'accord de Taëf et de la Constitution ». Le député de la Jamaa islamiya n'est d'ailleurs pas le seul à s'ériger contre le risque de consacrer certaines pratiques en coutume. Il est rejoint, mais évidemment pas pour les mêmes raisons, par l'ancien ministre Salim Jreissati (dont le nom circule pour le ministère de la Justice) qui a déclaré hier, à l'issue de la réunion du bloc du Changement et de la Réforme : « Nous refusons que des pratiques soient consacrées en coutumes », dans une allusion on ne peut plus claire à la revendication par le bloc Berry du portefeuille des Finances. « Il n'y a aucun intérêt pour la nation à attribuer de manière définitive un ministère à une communauté », a-t-il martelé. Il a évoqué le principe de la rotation des portefeuilles, laissant indirectement entendre que l'attribution des Finances à M. Berry ne lui est certainement pas acquise. L'avocat répondait ainsi indirectement aux propos du leader d'Amal qui, il y a quelques jours, avait laissé entendre que l'attribution de ce ministère revenait de « droit » aux chiites conformément à l'accord conclu dans les coulisses de Taëf.

Ce à quoi Talal Husseini, frère de l'ancien président de la Chambre Hussein Husseini et l'une des chevilles ouvrières de Taëf, répond dans un entretien à L'OLJ : « Il n'y a que le texte de la Constitution qui a valeur probante et qui, par conséquent, s'impose. » Et d'enchaîner : « Si l'on doit prendre en considération toutes les opinions qui se sont exprimées en marge des négociations, on n'est pas sorti de l'auberge. » Selon lui, il n'y a même pas eu de pratique répétée après les accords de Taëf, puisque les chiites n'ont occupé ce ministère que trois fois depuis.


(Lire aussi : Les conditions des uns et des autres ne devraient pas entraver la formation du gouvernement, l’éclairage de Philippe Abi-Akl)

 

Au bras de fer qui a lieu autour des portefeuilles vient s'ajouter celui de la bataille pour les ministères classés par ordre d'importance, soit les ministères régaliens (Affaires étrangères, Défense, Intérieur en plus des Finances), les mégaministères (Énergie, Télécoms, Justice), ceux des services (Santé, Travaux publics, Affaires sociales, Travail, Éducation) et les ministères » ordinaires (le reste en plus des ministres d'État sans portefeuille) c'est-à-dire des postes quasi insignifiants pour nombre de parties politiques.
« Par insignifiants, il faut comprendre inutiles en termes de pouvoir et d'influence politique mais aussi dépourvus de pratique clientéliste que permettent surtout les ministères fournissant des services », souligne à L'OLJ un ancien commis de l'État. Dans les milieux des Marada, on tient toutefois à préserver la façade : « Nous souhaitons obtenir un ministère de services pour pouvoir servir le peuple, la nation et le gouvernement », a affirmé un député du parti, Salim Karam, qui n'oublie pas de citer au passage « l'action remarquée », même « en France », du ministre sortant de la Culture, Rony Arayji.

Au final, les enchères ont atteint un point tel que le bloc du Futur a appelé hier l'ensemble des forces politiques « à saisir ce moment positif et à faciliter le processus mené par M. Hariri ». Le bloc a ainsi invité l'ensemble des parties à faire preuve de « réalisme politique dans leurs demandes pour accélérer la formation du gouvernement ».
M. Hariri, qui déploie des efforts monstres pour mettre sur pied son équipe dans un laps de temps raisonnable, ne veut surtout pas perdre l'élan en s'enlisant dans un marchandage de portefeuilles qui risque de s'éterniser en décevant les Libanais, qui viennent à peine de sortir de leur torpeur.
Pour nombre d'analystes, ces enchères, légitimes en temps de négociations, ne sauraient toutefois arrêter le train en marche.

 

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commentaires (8)

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LA LIBRE EXPRESSION

12 h 17, le 10 novembre 2016

Tous les commentaires

Commentaires (8)

  • DICIDEZ EN COLLABORATION AVEC LE CHEF DE L,ETAT ET ALLEZ DE L,AVANT ! ET LES DESILLUSIONS AU MENU...

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 17, le 10 novembre 2016

  • Non ils sont venue vérifier le pouls du nouveau président cer ils ne sont pas confiant hahah attendez ce n'est que le début !!

    Bery tus

    20 h 33, le 09 novembre 2016

  • Pitoyable PM , "aux ordres" Un Président élu au forcing, équivalent à un coup d'état, Zarif qui vient vérifier que les ordres de Téheran, via le Hezbollah, seront bien exécutés, Le Liban vivrait mieux sans président et sans ces marionnettes

    FAKHOURI

    16 h 10, le 09 novembre 2016

  • SLEIMAN FRANGIÉ 2 EXIGE UN GRAND MINISTÈRE POUR SERVIR LE PEUPLE ET LA NATION. DE QUEL PEUPLE IL PARLE ? LE PEUPLE DES MARADA BIEN SÛR, C'EST LA NATION DE LA FAMILLE.

    Gebran Eid

    15 h 30, le 09 novembre 2016

  • A tous de soumettre leurs proposition mais c'est au 1er ministre de décider. Cela s’arrête la!

    Pierre Hadjigeorgiou

    13 h 29, le 09 novembre 2016

  • Discussions byzantines où on ergote et pinaille sur tel ou tel ministère ou autre sous-ministère, tandis que le pays croule sous les dettes, la corruption généralisée, les ordures, la présence de deux millions de réfugiés syriens et palestiniens... c'est le Souk-Nouriyé d'antan. Quelle honte, quelle insouciance ! Quelle irresponsabilité !

    Un Libanais

    11 h 56, le 09 novembre 2016

  • Si tous nos "politiciens" de tous bords étaient de vrais patriotes responsables et soucieux du bien de leur pays, ces marchandages ignobles et honteux n'existeraient même pas ! Ce ne sont malheureusement que des requins tournant autour de leur proie, notre pauvre Liban, qu'ils veulent continuer à saigner jusqu'à sa dernière goutte de sang pour leurs bénéfices personnels. Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 26, le 09 novembre 2016

  • Et c'est pas dans ce domaine qu'il excelle. .. On est pas sorti de l'auberge avec lui .

    FRIK-A-FRAK

    08 h 19, le 09 novembre 2016

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