Le climat positif, sensible dans le pays depuis l'élection de Michel Aoun à la présidence de la République lundi dernier et dans lequel s'est déroulé jusqu'à présent le processus de formation du gouvernement mené par le Premier ministre désigné Saad Hariri, a été assombri lundi par la passe d'armes qui a opposé dans la journée le président du Parlement, Nabih Berry, et le chef des Forces libanaises, Samir Geagea.
"La passion tue"
Dans des propos rapportés par le quotidien local as-Safir, M. Berry accuse le leader des FL de vouloir écarter certaines formations politiques du gouvernement. M. Geagea "essaie de mettre la main sur le nouveau gouvernement, en oubliant que l'intérêt national exige qu'un cabinet d'union nationale soit formé en cette période", estime le président de la Chambre.
"Mon ami Nabih Berry, j'apprécie le grand intérêt que vous me portez ces derniers jours, avec ou sans raison, mais...la passion tue", a répliqué M. Geagea sur son compte Twitter. "Ma principale préoccupation du moment, c'est que le nouveau mandat soit un succès et je ferai tout pour cela", a-t-il déclaré plus tard à l'issue d'une rencontre avec le député Ibrahim Kanaan, membre du Courant patriotique libre aouniste et l'un des architectes du rapprochement entre le CPL et les FL.
Le leader du mouvement Amal soupçonne M. Geagea de vouloir écarter du gouvernement ceux qui n'ont pas soutenu la candidature de Michel Aoun. Les FL ont ainsi demandé le portefeuille des Finances que réclame également M. Berry.
Dans ses propos rapportés par as-Safir, le président de la Chambre fait référence au chef des Marada, Sleiman Frangié, candidat malheureux à l'élection présidentielle, et aux Kataëb. Lors des consultations parlementaires non contraignantes menées par Saad Hariri, M. Frangié a demandé un ministère dit de "service". De leur côté, les Kataëb n'ont pas encore annoncé s'ils participeraient ou non au prochain gouvernement.
La balle est dans le camp de M. Hariri qui, après s'être entretenu la veille avec Samir Geagea, doit recevoir M. Berry dans les prochaines heures.
Le leader druze Walid Joumblatt a, lui, tenté de calmer le jeu en appelant sur Twitter à éviter les "batailles périphériques" susceptibles de retarder la formation du gouvernement et à "capitaliser sur l'entente du moment". Le chef du PSP avait soutenu la candidature de M. Aoun.
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Le Liban et les pays arabes
Dans la journée, plusieurs responsables ont mis l'accent sur la nécessité pour le Liban de rétablir de bonnes relations avec les pays arabes. Ces relations s'étaient progressivement détériorées autour de l'action du Hezbollah, soutenu par l'Iran en conflit avec l'Arabie saoudite sur plusieurs fronts dans la région.
"L'accession de Michel Aoun à la présidence et le gouvernement qui sera prochainement formé constituent une chance pour réaffirmer l'identité arabe du Liban et relancer ses relations avec les pays du Conseil de coopération du Golfe", a déclaré lundi Saad Hariri à l'issue d'une rencontre avec les ambassadeurs du CCG en poste à Beyrouth.
Dans une interview accordée au quotidien panarabe al-Chark al-Awsat et publiée lundi, le chef du CPL, Gebran Bassil, a expliqué que Michel Aoun était désormais "l'allié de tous les Libanais après avoir été celui du Hezbollah", ajoutant que "l'Arabie saoudite est un pays ami avec lequel nous voulons construire les meilleurs relations possibles". La veille, M. Aoun avait prononcé un discours devant ses partisans rassemblés au palais de Baabda dans lequel il avait rappelé "l'identité arabe" du Liban.
Par ailleurs, le chef de l'Etat a reçu son prédécesseur Michel Sleiman. "J'ai demandé au président Aoun de poursuivre la mise en œuvre de la déclaration de Baabda pour laquelle il avait joué un grand rôle", a déclaré M. Sleiman à l'issue de son entretien. Cette déclaration, adoptée en juin 2012 par la conférence de dialogue national sous les auspices de Michel Sleiman, rappelle, entre autres, la distanciation du Liban à l'égard des conflits régionaux et la nécessité d'élaborer une stratégie nationale de défense. L'élection lundi dernier de M. Aoun à la tête de l'Etat était intervenue deux ans et demi après la fin du mandat de M. Sleiman, le 25 mai 2014.
Plus tôt dans la journée, M. Aoun avait reçu le ministre syrien chargé des Affaires présidentielles, Mansour el-Azzam, qui lui avait transmis les vœux du président syrien Bachar el-Assad.
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commentaires (6)
Le président de la chambre ..(des prorogations gratuites pour tous )... sera réélu quand ...? , pour un XIème mandat ...? est-ce bien dans la légalité constitutionnelle du pays tout ca..?
M.V.
18 h 05, le 07 novembre 2016