Photo d’archives du président américain Barack Obama saluant le roi Salmane d’Arabie saoudite en Turquie, le 15 novembre 2015. Photo Reuters
Mais que fait donc l'Arabie saoudite ? Englué depuis un an et demi dans une opération militaire désastreuse au Yémen, le royaume s'est une fois de plus attiré les foudres de plusieurs grandes puissances, après le raid samedi à Sanaa. D'après l'Onu, 140 personnes ont été tuées et 525 autres blessées dans des frappes aériennes qui ont touché une cérémonie funèbre dans la capitale yéménite tenue par les rebelles houthis. Soutenus notamment par l'Iran, ces derniers n'ont pas hésité à qualifier l'opération de « crime de guerre », et leur chef Mohammad Ali al-Houthi, ainsi que son allié l'ex-président yéménite Ali Abdallah Saleh, ont enjoint aux rebelles de se venger et de combattre « l'ennemi saoudien ».
(Lire aussi : Saleh appelle à la mobilisation à la frontière saoudienne)
Le raid de Sanaa n'est pas non plus sans conséquences sur l'allié américain, qui s'est dit « profondément troublé » par le massacre, avant d'annoncer le réexamen de son soutien à la coalition arabe menée par l'Arabie saoudite, déjà réduit ces derniers mois. « La coopération sécuritaire des États-Unis avec l'Arabie saoudite n'est pas un chèque en blanc », a ainsi affirmé Ned Price, porte-parole du Conseil de sécurité nationale à la Maison-Blanche. Ce bain de sang survient alors que Washington et la communauté internationale critiquent Moscou avec virulence pour ses opérations en Syrie, surtout à Alep où de nombreuses victimes civiles sont à déplorer, et les négociations de paix sont plus que jamais au point mort.
Ce n'est certes pas la première fois que Washington est pris de court par les initiatives saoudiennes. Le début des opérations de la coalition arabe au Yémen en est un exemple. Bien que le combat contre el-Qaëda, l'État islamique et autres groupes terroristes soit une priorité pour Washington, avec pour conséquence voulue plus de stabilité dans la région, contrer l'influence iranienne reste le souci primordial de Riyad. Les proxy wars (guerres par procuration) entre le royaume et la République islamique prolifèrent en Syrie, en Irak, au Yémen... La même guerre d'influence règne au Liban.
(Lire aussi : Yémen : la coalition arabe veut un règlement d'ensemble, pas une simple trêve)
Critères moraux
La signature, le 14 juillet 2015, d'un accord historique sur le programme nucléaire iranien a accéléré la détérioration des relations entre l'administration du président américain Barack Obama et le royaume wahhabite, qui depuis s'estime lâché par son allié de toujours. La levée des sanctions à l'encontre de l'Iran, redevenu en quelque sorte « fréquentable », n'a certainement pas contribué à apaiser les craintes de Riyad, qui s'estime encerclé par ses ennemis.
Dans ce contexte, les déclarations américaines concernant une réévaluation du soutien militaire au royaume, suite aux frappes de samedi à Sanaa, ne sont pas vraiment anodines. Mais la puissance de feu de Riyad en ressentira-t-elle les conséquences ? Rien n'est moins sûr. Il y a un mois exactement, un contrat de 1,15 milliard de dollars a été signé par les deux pays lors d'une vente d'équipements de défense à Riyad. La vente portait, entre autres, sur des chars, des armes automatiques lourdes capables de traiter des objectifs terrestres, des lance-grenades, des véhicules blindés... Comme quoi le refroidissement des relations entre les deux alliés n'empêche pas les bonnes affaires. « Les États-Unis sont les premiers à se rendre coupables de bavures, donc je doute que les critères moraux pèsent dans leur réaction à ce triste événement. On est loin de schémas comparables à celui de l'Allemagne par exemple, qui veut revoir ses livraisons d'armes à l'Arabie saoudite du fait de leur apparente utilisation par cette dernière au Yémen », juge Barah Mikaïl, directeur de Stractegia Consulting et professeur à l'Université de Saint-Louis à Madrid.
(Lire aussi : Plus de 400 victimes de bombes à sous-munitions en 2015, notamment en Syrie et au Yémen)
Ces développements surviennent, en outre, à un mois de la présidentielle américaine, et donc en fin de mandat de Barack Obama. Si l'homme d'affaires qu'est Donald Trump pourrait plus ou moins être un choix satisfaisant pour le royaume, ce dernier pourrait toutefois mieux s'entendre avec Hillary Clinton, bien connue de Riyad depuis l'époque à laquelle elle était secrétaire d'État. Sur le plan diplomatique, les opérations saoudiennes devraient avoir peu de conséquences sur les relations entre Riyad et Washington, en tout cas à court terme. Certes, il est peu probable qu'une relation américano-saoudienne solide se maintienne au cours des prochaines décennies, « et ce malgré le fait que les pays soient officiellement engagés par les termes du pacte de Quincy jusqu'en 2065 », rappelle Barah Mikaïl. « Mais je ne crois pas que cela va dépendre de ce qui vient d'arriver au Yémen, et donc un tel malaise ne sera pas pour tout de suite. »
Lire aussi
Manœuvres navales saoudiennes dans le détroit d'Ormuz
Les houthis, une menace pour le trafic maritime dans la mer Rouge ?
Pour mémoire
Carnage à Aden : au moins 71 morts dans un attentat suicide revendiqué par l'EI
Mais que fait donc l'Arabie saoudite ? Englué depuis un an et demi dans une opération militaire désastreuse au Yémen, le royaume s'est une fois de plus attiré les foudres de plusieurs grandes puissances, après le raid samedi à Sanaa. D'après l'Onu, 140 personnes ont été tuées et 525 autres blessées dans des frappes aériennes qui ont touché une cérémonie funèbre dans la capitale...
commentaires (4)
A SANAA UN RAID DE TROP CONDAMNABLE... CERTES ! MAIS LES MILLIERS DE RAIDS SUR LES ECOLES ET LES HOPITAUX DONT AUCUN N,EST PLUS DEBOUT... ET LES MILLIERS DE CIVILS TUES... C,EST PAS ENCORE TROP POUR LES BOITES VIDES DE MATIERE !!!
LA LIBRE EXPRESSION
12 h 16, le 11 octobre 2016