Si après plusieurs années mornes, le secteur touristique peut à nouveau compter sur une hausse du nombre de visiteurs au premier semestre – de 7,7 % à environ 671 000 –, leurs achats ne sont, eux, pas encore au rendez-vous : sur la même période, les dépenses détaxées des touristes ont encore reculé de 14 % par rapport à l'année précédente. Une tendance qui impacte directement l'activité des plages privées. « Le chiffre d'affaires des plages privées – qui emploient 25 000 personnes, saisonniers inclus – a baissé de 30 % cette année », avance, sans toutefois donner son montant, le secrétaire général de la Fédération des syndicats touristiques, Jean Beyrouthi.
Cette saison serait même « la plus décevante depuis l'été 2006 », selon Alice Eddé, épouse et assistante du propriétaire d'Eddé Sands (Jbeil), Roger Eddé. La station balnéaire, qui comporte un hôtel et une plage privée à 28 dollars l'entrée le week-end, accuse une forte baisse de la fréquentation. « Sur les trois dernières années, nous sommes passés de 5 000 clients par jour le week-end à 450, et de 5 000 plats servis à 1 000 environ, mariages et soirées inclus », note Alice Eddé. Elle songe d'ailleurs à limiter l'ouverture d'Eddé Sands à la saison d'été afin de limiter les pertes.
Selon de nombreux professionnels, la baisse de la fréquentation des plages résulte notamment du fait que le ramadan a coïncidé avec la saison estivale. Mais ils ont surtout pâti de l'absence des touristes du Golfe, dont le budget « est au minimum dix fois supérieur au budget d'un Libanais », observe Alice Eddé. Pour rappel, cinq pays du Conseil de coopération du Golfe – l'Arabie saoudite, Bahreïn, les Émirats arabes unis, le Koweït et le Qatar – ont appelé en février dernier leurs ressortissants à ne pas se rendre au Liban ou à quitter le pays.
Et la détérioration des conditions sécuritaires au Liban aurait dissuadé une partie des autres types de clientèle. « L'incident de la Békaa (le 27 juin, le village de Qaa a été le théâtre de plusieurs attentats-suicide et d'attaques-kamikaze qui ont fait 5 morts, NDLR) et les rumeurs qui ont suivi ont beaucoup affecté le tourisme dans la région de la capitale », confie Michel Abchee, propriétaire de Damour Beach, où l'entrée coûte 23 dollars le week-end. Pour Alice Eddé, ce « climat de peur » a également été entretenu, y compris chez les Libanais, par la multiplication des attaques terroristes ailleurs dans le monde, et notamment en France, en Allemagne et en Turquie.
Les chalets mieux lotis
Les stations balnéaires qui disent tirer le mieux leur épingle du jeu sont celles qui affirment moins dépendre des touristes du Golfe. C'est le cas de Lazy B à Jiyeh, explique son propriétaire Georges Boustany, où le ticket d'entrée est de 30 dollars le week-end. « J'ai remarqué une petite baisse des touristes occidentaux, mais, pour moi, la saison 2016 est à peu près équivalente à celle de l'année dernière. » Seul point noir au tableau, selon lui, « la (mauvaise) réputation faite à la mer » suite à la polémique concernant le dernier plan gouvernemental pour une sortie de crise des déchets annoncée en mars. Ce plan inclut la construction de deux décharges côtières à Bourj Hammoud et Costa Brava, qui ont alimenté les peurs concernant le niveau de pollution de la mer. Pour rassurer ses clients, il a effectué des tests à l'Université américaine de Beyrouth, indique-t-il.
Les stations balnéaires qui proposent la location de chalets affirment également être peu touchées par la crise. « Notre clientèle est locale ou bien provient de la diaspora, et celle-ci continue à venir malgré la situation sécuritaire ou économique », confie Walid Moussa, directeur de la station Miramar (Tripoli), qui loue 130 chalets. Même si louer un chalet pendant un été entier peut coûter aux alentours de 10 000 dollars, des stations comme Miramar ou Las Salinas (Enfeh) se targuent d'un taux d'occupation de près de 100 % pendant la saison. Les clients sont toutefois devenus plus inquiets et exigeants concernant la sécurité. « Cette année, nous avons doublé le nombre de nos agents de sécurité, pour arriver à 40 », rapporte un des gérants de Las Salinas, Maher Deiri, qui loue environ 70 chalets. Les deux professionnels concèdent néanmoins que le manque de concurrence sur ce type de produits sur la côte nord explique en partie ces taux d'occupation. « Du côté de Jounieh, le taux d'occupation n'a sûrement pas dépassé 60 % », estime pour sa part Jean Beyrouthi.
Pour mémoire
commentaires (6)
Article complément biaisé... les véritables raisons ne sont mentionnées qu'à voix basse: mer polluée, prix d'entrée ridicule - majorés chaque année en plus, comme si ces stations se pensent immunisées contre la dégradation économique du pays. Les ressortissants des pays du golf boudent le Liban depuis bien longtemps déjà... rien à voir donc.
Khalil S.
10 h 34, le 16 août 2016