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Culture - Festival d’Avignon

Taym, ou cette Syrie plongée dans un profond coma...

Avec « Alors que j'attendais » des Syriens Omar Abou Saada
(mise en scène) et Mohammad el-Attar (texte et dramaturgie), le Festival In d'Avignon inaugure, au gymnase Paul Giéra, son focus Moyen-Orient.

Une scène divisée en deux espaces, avec, comme suspendu dans les airs, le ciel des comateux. Photo Christophe Raynaud de Lage

L'histoire se déroule à Damas, entre 2015 et 2016. Taym, un jeune pris dans la violence des événements, se retrouve sur un lit d'hôpital, dans le coma. Autour de lui, sa mère, en foulard, la mine sinistre, qui éructe de colère et de rancœur ; sa sœur, revenue d'exil, qui cherche à découvrir et à comprendre les derniers jours de la vie de son frère, dans une tentative de rattraper le temps perdu ; l'ami, qui cache sous ses airs blasés de poète maudit son désarroi et sa peur, et enfin, la petite amie déboussolée, qui porte un lourd secret écrasant de culpabilité...
Alors que tous ces personnages dévident la bobine de leurs récits et de leurs frustrations, dévoilant tensions et secrets, dits et non-dits, Taym, depuis le ciel des comateux – sur scène il occupe une cage en verre comme suspendue dans les airs –, livre sa version. Il partage son « ciel » avec un autre comateux: le DJ, jeune musicien/combattant ayant rejoint les rebelles de Daech.
Taym, c'est la figure d'une Syrie plongée dans un profond coma... Un coma dont il n'est envisageable de se libérer qu'en libérant la parole. La parole qui dit les secrets, les dépouillant de tout pouvoir vénéneux ; la parole qui dit la confiance et l'amour, les réinvestissant de leur pouvoir guérisseur.
Pour cette nouvelle création, Omar Abou Saada et Mohammad el-Attar, vieux compagnons de route, sont partis d'un fait réel pour élaborer une fiction. « Celle-ci est inspirée de nos vies quotidiennes », expliquent les comédiens. L'histoire a deux axes: la réalité (la guerre) et la fiction (ces personnalités coincées dans cet entre-deux, entre la mort et la vie). « Les deux axes parlent de nous, de notre capacité et de notre impuissance à cerner ce qui nous entoure », développe Mohammad el-Attar, le dramaturge. « Aussi inimaginable que soit le degré de violence que nous vivons, nous n'avons pas voulu travailler directement sur la question de la violence. Notre propos est de déconstruire la violence que le pouvoir exerce sur la société et qui est sensible à tous les niveaux : social, religieux... », renchérit Omar Abou Saada, le metteur en scène.
Et malgré la dureté et les difficultés de la vie au pays, malgré le regard de mépris et d'exclusion de la vie à l'étranger, en exil, il reste l'espoir. « Nous n'avons pas d'autre choix », affirment-ils. Pas d'autre choix que de résister.

Trois questions à...
Olivier Py à « L'OLJ »: Depuis longtemps, je voulais qu'Avignon investisse le Moyen-Orient
Olivier Py explique le focus Moyen-Orient de l'édition 2016 du Festival In d'Avignon, dont il a pris la direction il y a trois ans.
Ce focus présente 6 créations différentes (théâtre, danse et musique), venant de Syrie, du Liban, d'Iran et d'Israël.

Pourquoi un focus Moyen-Orient ?
Chaque année, nous faisons un focus sur une région du monde : nous avons déjà eu la Grèce (en 2014) et l'Argentine (en 2015). Depuis longtemps, je voulais qu'Avignon investisse le Moyen-Orient. On tient toujours à ce qu'il y ait dans la sélection des pièces qui viennent de cette partie du monde. Il est important que le festival soit une image du monde, et pas que du monde qui va bien.

Comment le choix a été fait, avez-vous suivi une ligne directrice ?
On avait quelques connaissances communes. C'est le cas de Omar Abou Saada, par exemple. J'ai fait plusieurs voyages au Liban, où l'Institut français avait organisé une plateforme présentant des artistes du Moyen-Orient. À cette occasion, nous avons découvert Ali Chahrour.
C'est pratiquement chaque année qu'on a programmé des spectacles en langue arabe. Je pense que c'est important que les langues résonnent à Avignon. Il n'y a pas toujours la fierté du bilinguisme, et c'est tout à fait dommage.

Avec Ali Chahrour, était-il important de parler de l'islam différemment ?
Ali parle du Liban d'une manière très personnelle, de la guerre et de la mort d'une façon très personnelle aussi, et très délicate. Il parle aussi des femmes, qu'est-ce que être une femme dans ce pays... Être une femme, être une mère. J'ai beaucoup aimé sa façon d'aborder des questions importantes, sans violence, sans culpabilisation, avec une élégance formelle qui lui appartient en propre.

L'histoire se déroule à Damas, entre 2015 et 2016. Taym, un jeune pris dans la violence des événements, se retrouve sur un lit d'hôpital, dans le coma. Autour de lui, sa mère, en foulard, la mine sinistre, qui éructe de colère et de rancœur ; sa sœur, revenue d'exil, qui cherche à découvrir et à comprendre les derniers jours de la vie de son frère, dans une tentative de...

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