C'est sur une sérieuse menace d'escalade du parti Kataëb que s'est achevé hier le Conseil des ministres. Il s'était ouvert sur la polémique au sujet du barrage de Janné, mais celle-ci s'est rapidement essoufflée. Nabil de Freige avait cru y trouver une solution en proposant que le dossier soit confié à la Banque mondiale, qui finance habituellement les plus grands barrages du monde. « D'ores et déjà, avait-il promis, nous nous engageons à respecter ses conclusions, quelles qu'elles soient. »
La proposition a été immédiatement rejetée par Gebran Bassil, ministre des Affaires étrangères et chef du CPL. « L'évaluation de la Banque mondiale retarderait l'exécution du barrage de deux ans », s'est-il exclamé. Sur cette réflexion, le Premier ministre devait clore le débat et le reporter à la prochaine séance. De report en report, il est fort probable que la construction du barrage de Janné sera achevée avant que ses plans ne soient homologués.
C'est l'examen de la question des déchets ménagers qui, en fait, a pris la plus grande partie de la réunion. Elle s'est ouverte sur une série de quatre questions posées par Alain Hakim, au nom du parti Kataëb, auxquelles aucune réponse n'a été apportée. Considérant qu'il y a là manquement grave de la part du gouvernement, MM. Hakim et Sejaan Azzi ont quitté la réunion, en signe de protestation. Toutefois, sur demande du Premier ministre, Ramzi Joreige (troisième ministre Kataëb) ne leur a pas emboîté le pas, tout en précisant que le geste des ministres ne doit pas être compris comme une décision de démission.
Malgré ces protestations, et comme si de rien n'était, le gouvernement a approuvé le plan de gestion proposé aux ministres, malgré les réserves de Gebran Bassil et Élias Bou Saab (CPL).
(Lire aussi : Les ministres Kataëb contestent fermement le plan de gestion des déchets et son impact sur le Metn)
Contestation dans la rue
Le chef du parti Kataëb devait expliciter, par la suite, la position de son parti, affirmant que la contestation du plan gouvernemental se poursuivra à l'intérieur du Conseil des ministres et, au besoin, dans la rue. Le parti Kataëb entend en effet empêcher, notamment par la perturbation du mouvement des camions, que le Conseil pour le développement et la reconstruction (CDR) ne poursuive son plan aveugle de remblayage de la côte avec des déchets non triés, dans le seul souci de gagner du sol ferme pour de lucratifs projets d'aménagement de la côte, au prix de la création d'une seconde Naamé.
Pour le moment, et en attendant la construction de la digue maritime qui doit dessiner l'espace de la décharge future, les déchets sont entreposés en ballots, précise-t-on.
Les Kataëb, pour leur part, exigent une étude d'impact sur l'environnement de la nouvelle décharge et, surtout, la construction d'usines de triage et de compostage capables d'absorber l'énorme tonnage quotidien de déchets que doit recevoir ce nouvel espace. Un tonnage évalué à 3 000 tonnes par jour, soit dix fois la capacité de traitement des usines de triage et de compostage aménagées dans la zone de La Quarantaine. Affaire donc à suivre.
Par ailleurs, le gouvernement n'a pas abordé le dossier de l'Internet illégal, en raison de l'absence du ministre des Télécoms, Boutros Harb, pas plus qu'il n'a pu interroger Nouhad Machnouk, absent, sur la raison cachée de ses déclarations incendiaires de la semaine dernière sur l'Arabie saoudite.
Relancé au sujet des mesures prises par la Banque du Liban contre les comptes appartenant à des membres du Hezbollah, Ali Hassan Khalil s'est contenté de démentir qu'il y ait une annexe à la liste de noms communiquée au Liban par le gouvernement américain.
(Lire aussi : S. Gemayel : On veut remblayer la côte de déchets non triés)
La cité sportive
Le gouvernement a en outre approuvé une proposition du ministère de la Jeunesse et des Sports de réhabilitation et d'entretien de la Cité sportive, laissée à l'abandon. Ces travaux ont été confiés au CDR...
Deux autres interventions significatives ont marqué le Conseil des ministres. Celle de Gebran Bassil, d'abord, qui a protesté contre la vacance, depuis trois ans, de trois postes de directeur général au ministère des Travaux publics.
Par ailleurs, M. Waël Bou Faour a défendu une décision d'interdiction de l'importation de produits laitiers de Syrie prise par son collègue de l'Agriculture, Akram Chehayeb, qui se trouve à Moscou en ce moment. Quatre mille caisses de fromage blanc sont importées de Syrie quotidiennement, a-t-il dit, et le marché libanais est noyé de produits laitiers (labné et fromages), en provenance de Syrie. Il n'était pas possible de continuer ainsi, au risque d'acculer les producteurs libanais au chômage, ainsi d'ailleurs que les producteurs de fruits et légumes.
Hariri et Kassem
La journée politique a été par ailleurs marquée par les deux déclarations, d'inégale importance, de Saad Hariri et de Naïm Kassem.
Le premier a affirmé qu'il est prêt à faire son autocritique après les scores réalisés aux municipales, un mot que l'on n'entend pas souvent sur les lèvres de nos politiciens.
Par contre, les observateurs se sont arrêtés hier sur une déclaration du numéro deux du Hezbollah dans laquelle il affirme que « des concessions » doivent être consenties de la part de tous. De la bouche d'un homme qui, il y a peu, affirmait presque le contraire, notamment au sujet de la présidentielle, ce revirement laisse penser que l'on s'approche d'un compromis en la matière, sans qu'il soit encore possible d'en définir les contours précis.
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commentaires (6)
Nous ne sommes plus un Etat digne de ce nom...mais une arrière-cour nauséabonde où se combattent ou trafiquent nos IRRESPONSABLES-NUISIBLES pour leurs histoires de gros sous...sans jamais savoir prendre les décisions urgentes et responsables! Peuple libanais, jusqu'à quand cette mascarade honteuse va-t-elle continuer, et pourquoi vous taisez-vous ? De quoi avez-vous peur ? Irène Saïd
Irene Said
14 h 54, le 10 juin 2016