Municipales serrées au Mont-Liban

La deuxième étape des élections municipales et des moukhtars s'est déroulée dimanche dans une ambiance fiévreuse dans certains points chauds du Mont-Liban, où la bataille a fait rage entre les partis politiques chrétiens traditionnels et les notables locaux.

Le taux de participation a progressé en fin de journée, passant de 30 à 50% dans plusieurs régions, peu avant la fermeture des bureaux de vote. Selon les derniers chiffres fournis par le ministère de l'Intérieur, le taux de participation a atteint, à 18h, les 55% dans le caza de Jbeil, 43,8% dans le Metn et 46% dans le Chouf. Il est de 55,14% dans le Kesrouan, 45% dans le caza de Aley et 39,5% dans le caza de Baabda.

Achat de voix à Jounieh ?
A Jounieh, dans le Kesrouan, où la bataille a été extrêmement serrée, les accusations d'achat de voix fusent entre les tenants des deux listes en compétition. A Afqa, dans le jurd du caza de Jbeil, de violents échauffourées entre factions chiites ont contraint les forces de sécurité à intervenir.

L'envoyée spéciale de la chaîne locale al-Jadeed à Jounieh, Layal Bou Moussa, a affirmé dans la journée à notre correspondante sur place Suzanne Baaklini avoir été abordée par un homme affirmant travailler pour la liste baptisée "Dignité de Jounieh", conduite par l'ancien président du conseil municipal Juan Hobeiche et appuyée par le Courant patriotique libre et les Kataëb, qui lui aurait payé 600 dollars pour trois voix.
Interrogé par L'Orient-Le Jour, un membre de la liste "Dignité de Jounieh", Joseph Bassil, a indiqué que cette personne n'avait rien à voir avec les membres de cette liste. L'homme en question a été arrêté, selon l'Agence nationale d'information (ANI, officielle) après la diffusion d'une vidéo filmée de l'incident sur Facebook.

(Voir aussi : Le scrutin au Mont-Liban, en images)

La liste de M. Hobeiche est opposée à la "Liste du renouveau", dirigée par l'actuel vice-président du conseil municipal, Fouad Boueiri, et appuyée par Nehmat Frem, président de la Fondation maronite dans le monde, et deux anciens députés, Farid Heykal el-Khazen et Mansour el-Bone ainsi que par les Forces libanaises.

De son côté, le ministre de l'Intérieur, Nohad Machnouk, qui a effectué une tournée dans le Mont-Liban, a annoncé que quatre personnes, accusées d'avoir acheté des voix, ont été interpelés dans les localités de Yahchouche et Raachine, dans le Kesrouan.

Après Jounieh, Beiteddine et Baabda, le ministre s'est rendu en soirée à Ghobeiry, dans la banlieue-sud de Beyrouth, affirmant que le scrutin se déroule dans le calme "en dépit de quelques incidents de nature individuelle et non pas politique". M. Machnouk a également souligné l'urgence pour le Liban d'élire un nouveau président de la République. "Il faut élire un président avant de penser aux législatives", a insisté le ministre de l'Intérieur.

Plus au nord, à Afqa, de violents échauffourées qui ont opposé des partisans des deux listes en lice ont contraint l'armée libanaise et les agents des Forces de sécurité intérieure (FSI) déployés sur place à faire usage de la force pour mettre fin aux affrontements et disperser la foule. Les opérations de vote ont dû être suspendues pendant plusieurs minutes.
Lors de ces échauffourées, une équipe de la chaîne locale LBCI a été agressée par des partisans des deux camps, leur demandant de cesser de filmer les affrontements.

(Lire aussi : À Jounieh, une très rude bataille en perspective)

Points chauds
Dans d'autres municipalités où les enjeux politiques sont importants, le scrutin se déroule sans incident majeur, mais dans une atmosphère de bataille rangée.

A Sin el-Fil, dans le caza du Metn, les électeurs se sont mobilisés en force pour déterminer le vainqueur de la bataille électorale opposant la liste conduite par le président sortant du conseil municipal, Nabil Kahalé, et soutenue par les Kataëb et l'ancien ministre Michel Murr, à celle de Joseph Chaoul, soutenue par le CPL, les FL et le parti Tachnag.

A Hadath, dans le caza de Baabda, les opérations de vote se déroulent dans le calme avec une forte affluence des électeurs. C'est une bataille serrée qui s'annonce opposant la liste présidée par Georges Aoun, soutenue par le CPL, à la liste présidée par Antoine Karam, soutenue, elle, par les FL et les Kataëb et dans laquelle se trouvent également des partisans du CPL.

Dans le Chouf, les regards seront tournés vers Deir el-Kamar et Damour.
A Deir el-Kamar, une liste soutenue par le CPL et les FL affronte une liste parrainée par le député Dory Chamoun, l'ancien ministre Naji Boustany et les Kataëb. A Damour, la bataille électorale s'est éloignée des enjeux partisans, le CPL et les FL ayant laissé à leurs sympathisants la liberté de choix.

Dimanche soir, après la fermeture des bureaux de vote, le chef des FL, Samir Geagea, a défendu l'alliance de son parti avec le CPL dans le cadre des municipales. "Il est faux de penser que cette alliance vise à éradiquer les autres partis, a dit le chef des FL. Nous n'avons jamais dit que notre alliance représentait 86% des chrétiens libanais. Nous avons collaboré ensemble dans plusieurs régions, mais pas dans toutes les localités, a-t-il ajouté. Cela ne veut pas dire que notre alliance a échoué, au contraire."

Plus tôt dans la journée, M Aoun avait exhorté ses partisans de se rendre aux urnes pour "voter en masse". "J'appelle tous les Libanais du Mont-Liban, et surtout nos partisans, à aller voter parce que c'est un devoir national. Les élections représentent un moyen pour déterminer la majorité", a-t-il dit à la chaîne de télévision OTV. "Il n'y a pas de division au sein du CPL, a-t-il ajouté. Cela paraîtra évident dans les résultats du scrutin".

Lire aussi
Dans le Metn, les limites de l’entente CPL-FL

Pour la première fois, le Hezbollah s’implique directement dans les municipales...