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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Avec la reprise de Moukalla, les relations entre l’Arabie et les États-Unis pourraient s’améliorer

Par ce succès contre Aqpa, le royaume veut s'imposer comme puissance musulmane capable de combattre le sunnisme radical.

Des habitants de Moukalla inspectaient hier les dégâts occasionnés par les frappes aériennes de la coalition arabe menée par l’Arabie saoudite. Photo Reuters

Implanté au Yémen depuis le début des années 1990, le réseau el-Qaëda dans la péninsule Arabique (Aqpa) a profité d'années d'instabilité pour viser les intérêts yéménites et occidentaux dans le pays, notamment américains. Lorsque les rebelles houthis prennent le pouvoir début 2015 après plusieurs années d'insurrection, Aqpa a déjà gagné du terrain, en s'installant solidement dans les provinces d'Abyane et de Chabwa. Le réseau profite également du vide occasionné par la fuite du gouvernement à Aden, dans le Sud, puis à Riyad en Arabie saoudite, pour avancer. Pendant que la coalition menée par le royaume wahhabite mène l'opération « Tempête décisive », lancée le 26 mars 2015, contre les houthis, Aqpa grignote de plus en plus de territoires. Le réseau prend ainsi la ville de Moukalla, chef-lieu de la province du Hadramout, début avril 2015.


C'est cette même ville, entre autres, que les forces gouvernementales yéménites, aidées de la coalition menée par l'Arabie saoudite, ont affirmé hier avoir repris aux jihadistes d'Aqpa, dans le cadre d'une offensive ayant fait plus de 800 morts parmi les combattants du groupe. Farea el-Muslimi, un écrivain et chercheur yéménite associé au Carnegie Middle East Center de Beyrouth, établit un parallèle entre la reprise de Moukalla et celle d'Abyane. De 2011 à 2012, la ville d'Abyane, dans la province éponyme, était sous le contrôle d'Aqpa, malgré les tentatives des forces gouvernementales de reprendre les territoires perdus. Le groupe avait néanmois fini par reculer jusque dans les montagnes après plusieurs semaines de combats qui avaient fait de nombreuses victimes. « Certains ont même rasé leur barbe pour se fondre dans la population », précise le chercheur, ce qui n'est pas sans rappeler la tactique de certains membres de l'État islamique (EI) désirant passer inaperçu. Il est tout à fait impossible qu'il y ait eu plus de 800 morts parmi les combattants d'el-Qaëda, affirme-t-il toutefois, estimant qu'il est bien plus logique que le groupe se soit retiré, qu'il ait fui vers les montagnes.

 

Abandon du Hadramout
Le timing d'une telle offensive de la part des forces gouvernementales et de la coalition n'est pas fortuit, pour M. Muslimi, peu surpris de l'opération qui survient en pleins pourparlers de paix interyéménites au Koweït. « Il faut dire que le gouvernement yéménite a pratiquement abandonné la province du Hadramout pendant près d'un an aux mains d'el-Qaëda, et n'a rien fait pour la récupérer. Il était grand temps. Il y a en outre des pressions internationales très intenses sur le gouvernement de Sanaa et la coalition menée par l'Arabie saoudite pour se concentrer sur la lutte contre l'EI et el-Qaëda », souligne le chercheur. De fait, le président américain Barack Obama était à Riyad la semaine dernière où il a assisté à un sommet du Conseil de coopération du Golfe (CCG) centré sur la lutte contre le terrorisme.

 

(Pour mémoire : Le Yémen, cette guerre oubliée)


Si ce succès enregistré à Moukalla et ailleurs par les forces gouvernementales et la coalition panarabe ne devrait pas affecter les pourparlers – qui concernent les rebelles houthis et non Aqpa–, il devrait toutefois renforcer la position du gouvernement. Plus encore, la reprise de Moukalla devrait servir à améliorer les relations plutôt tendues entre l'Arabie saoudite et les États-Unis, dont le rapprochement avec l'Iran (protecteur avéré des houthis) lors de l'accord sur son programme nucléaire a suscité la fureur du royaume. « Avec la reprise de Moukalla, l'Arabie saoudite veut prouver aux États-Unis qu'elle est la seule puissance régionale à pouvoir combattre le terrorisme – et surtout toute autre forme d'islam sunnite radical – dans la région, et que personne ne peut la remplacer », déclare Farea el-Muslimi.


Quelle serait la prochaine étape, d'après le chercheur ? « Ce qui représenterait un engagement réel pour la paix, et pour combattre el-Qaëda au Yémen de manière effective, serait d'aboutir à une solution politique. Si une telle solution n'aboutit pas, ce sera la meilleure chose qui puisse arriver à el-Qaëda, même après la perte de Moukalla », estime le chercheur, pour qui la situation au Yémen n'est pas aussi compliquée qu'en Syrie. D'après lui, les deux camps pourraient, par exemple, s'engager publiquement à suivre la feuille de route établie par l'Onu lors du vote de la résolution 2201, en février 2015. Pour rappel, cette feuille de route stipule entre autres que les houthis doivent retirer leurs forces des institutions publiques et qu'une transition politique doit avoir lieu. Rien n'est cependant acquis, et les négociations de paix, interrompues à plusieurs reprises au cours des derniers mois, ne semblent pas avancer. La poussée d'Aqpa et de l'EI au Yémen prouve que le vide institutionnel accompagné de violences favorise l'implantation de ces groupes. Pour Farea el-Muslimi, il faut espérer que les pressions de la communauté internationale suffisent ; mais rien n'est moins sûr avec ce qui se passe en Syrie ou encore en Libye.

 

 

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Implanté au Yémen depuis le début des années 1990, le réseau el-Qaëda dans la péninsule Arabique (Aqpa) a profité d'années d'instabilité pour viser les intérêts yéménites et occidentaux dans le pays, notamment américains. Lorsque les rebelles houthis prennent le pouvoir début 2015 après plusieurs années d'insurrection, Aqpa a déjà gagné du terrain, en s'installant solidement...

commentaires (2)

C'est du prêté pour un rendu . Et les Bensaoud sont de bons exécutants quand il s'agit de leur frère de sang idéologique.

FRIK-A-FRAK

12 h 21, le 26 avril 2016

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Commentaires (2)

  • C'est du prêté pour un rendu . Et les Bensaoud sont de bons exécutants quand il s'agit de leur frère de sang idéologique.

    FRIK-A-FRAK

    12 h 21, le 26 avril 2016

  • UN COUP DE MAITRE DE LA SAOUDITE QUI DEMONTRE LA COOPERATION DE LA QAEDA AVEC L,IRAN ET SES ACCESSOIRES... COMME LES AUTRES ORGANISATIONS TERRORISTES AUSSI...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 02, le 26 avril 2016

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