Rechercher
Rechercher

Cinema- - Rencontre

« Le film animé est tellement célèbre qu’il est méconnu »

Abi Feijo et Régina Pessoa sont au Liban, à l'invitation de l'Alba*, pour s'entretenir avec les étudiants de la passion qui les anime : le cinéma d'animation.

Régina Pessoa et Abi Feijo : une même passion les anime et les unit.

Ils parlent à deux voix mais, au cours de cette rencontre informelle, il semble qu'ils parlent d'une seule voix. Qu'est-ce que le cinéma d'animation ? Quelle est son importance ? Son rôle réel ? Autant de questions qui demeurent vagues pour certains qui croient que le seul cinéma d'animation qui existe est le descendant des studios Disney. Les deux animateurs, par leur parcours, leur modestie et leur travail passionné, témoignent du contraire. Abi Feijo est animateur, réalisateur, producteur, créateur et directeur du musée d'animation à Porto.
Régina Pessoa a passé beaucoup de temps à lire, à écouter des histoires et à colorier avec du charbon de bois les portes et les murs de la maison de sa grand-mère, encouragée par son oncle, avant de passer sa maîtrise en peinture à l'Université de Porto, en 1998, de devenir animatrice au sein du studio portugais Filmógrafo – Estúdio de Cinema de Animação do Porto, dès 1992, et de participer à la création de plusieurs films d'Abi Feijo (The Brigands, Fado Lusitanio, Clandestine). À présent lauréate de 50 prix internationaux, son film Histoire tragique avec fin heureuse (Cristal du court métrage d'Annecy en 2006) reste le court métrage d'animation portugais le plus récompensé dans le monde.

Des routes qui se croisent
Abi Feijo : Lorsque j'ai démarré mes études de beaux-arts, j'étais surtout intéressé par les bandes dessinées. Mais dès que j'ai assisté au premier festival d'animation, et en particulier à trois films canadiens, qui sont restés d'ailleurs dans ma mémoire, j'ai réalisé que j'avais trouvé ma voie.
Régina Pessoa : Je suis issue d'une famille modeste. J'ai grandi dans un petit village où il n'y avait pas de télévision à la maison. Cela ne faisait donc même pas partie de mon éducation. L'idée que j'avais de l'animation était les cartoons pour enfants. À 17 ans, j'ai déménagé en ville dans le but de m'inscrire à la faculté des beaux-arts et de dessiner. Pour pouvoir m'acheter les instruments de dessin, je faisais des heures supplémentaires dans un studio d'animation. Le chef d'animation était Abi Feijo qui m'a par la suite transmis cette passion.

L'animation, un art jeune mais sans statut
Feijo : L'animation est tellement célèbre qu'elle est méconnue. C'est paradoxal. Les gens connaissent tellement bien les films de Disney et tout ce que les studios commerciaux ont engendré, qu'ils n'arrivent plus à voir qu'il existe un cinéma d'auteur dans l'animation. Des films qui ont gardé une certaine poésie alors que le film long (d'animation) s'articule sur la narrative. Par ailleurs, peu de gens écrivent des critiques sur l'animation. C'est comme si elle n'avait pas de statut et n'existait pas.
Pessoa : L'animation indépendante reste un format alternatif. Très peu de personnes connaissent les films animés. La télévision, par son format standardisé, ne peut soutenir ce genre de films. Seul le public spécialisé s'intéresse aux films animés à travers les festivals. Et c'est dommage.

Court métrage, d'auteur, et non destiné aux enfants
Feijo : Le film d'animation est, selon notre définition, un film artistique, court et un film d'auteur. Il est le travail personnel d'un seul artiste. J'y recherche mes racines culturelles. Nous n'essayons pas de faire comme les Américains. Ils font très bien leur travail. Par contre, ils ne savent pas faire le nôtre. Nous attachons beaucoup d'importance au soin donné à un film. À la qualité. J'avais un professeur belge qui disait : Un beau dessin mal animé, c'est mauvais, mais un mauvais dessin bien animé peut être très beau. Il est essentiel de comprendre que ce n'est pas un cinéma pour enfants mais réellement pour adultes.
Pessoa : C'est toute mon enfance qui est là-dedans. Je suis passionnée par Alice au pays des merveilles. Du coup, j'ai un lapin qui traverse souvent mes œuvres. Comme un porte- bonheur ou encore pour évoquer l'enchantement.

L'image, le texte ? Ou les deux ?
Feijo : Quand on me demande aujourd'hui : quelle est votre technique. Je réponds illico : c'est changer de technique. Je n'aime pas me cantonner à une seule. Mon premier film était un échantillon de ma vie car il comprenait sept techniques. Chaque nouveau film est un défi pour moi.
Pessoa : J'ai créé mon propre parcours, mais jusqu'à présent je ne peux séparer le dessin de l'image en mouvement. Abi nous a donné les moyens et la liberté de travailler. De penser à des choses simples qui peuvent engendrer un beau visuel. La littérature n'est pas mon fort. Il m'a appris donc à m'inspirer de mon vécu pour en ressortir des images. Lorsque j'ai une petite histoire qui m'intéresse, je dois trouver le visuel qui va avec. Le parfait alliage.

*Les deux animateurs sont à l'Alba et Régina Pessoa donnera un master class, ce soir, à 19 heures, qui portera sur le processus de création et de réalisation de ses films. Ouvert au public.

 

 

Pour mémoire
S'émerveiller, avait dit Gibran...

Jean-Claude Kalache, l'étoile montante de Pixar de passage à Beyrouth

Ni Disney ni Pixar, mais « simply » Bill : Bill Plympton

 

Ils parlent à deux voix mais, au cours de cette rencontre informelle, il semble qu'ils parlent d'une seule voix. Qu'est-ce que le cinéma d'animation ? Quelle est son importance ? Son rôle réel ? Autant de questions qui demeurent vagues pour certains qui croient que le seul cinéma d'animation qui existe est le descendant des studios Disney. Les deux animateurs, par leur parcours,...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut