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Moyen Orient et Monde - Décryptage

Entre EI et PKK, Erdogan au pied du mur

Cinq attentats en moins de trois mois, huit en moins d'un an. La Turquie connaît actuellement « l'une des plus grandes vagues de terrorisme de son histoire », selon les termes du président Recep Tayyip Erdogan. Dans un discours à Istanbul, M. Erdogan a décrété hier la mobilisation générale contre le « terrorisme », en a appelé à la « grandeur de l'Empire ottoman » et l'esprit des vainqueurs de la bataille de Gallipoli, « et assuré que la Turquie » vaincrait rapidement ». L'ennemi est double : d'une part, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) contre qui la Turquie est en guerre depuis plus de 30 ans ; de l'autre, l'État islamique (EI) avec qui la Turquie a été longtemps accusée d'entretenir des relations troubles. Deux ennemis qui sont, eux-mêmes, ennemis entre eux puisqu'ils s'affrontent aujourd'hui quotidiennement en Syrie.

La version syrienne du PKK, le PYD (Parti de l'union démocratique), et sa branche armée, le YPG (Unité de peuplement), profitent en effet de leurs combats contre l'EI en Syrie pour mettre la main sur un territoire autonome dans le Nord syrien et pour rallier la communauté internationale à leurs causes.
Les victoires militaires du PYD sur le front syrien permettent au PKK de développer sa stratégie dans trois pays, la Turquie, la Syrie et l'Irak, où ses responsables sont exilés dans les monts Kandil. « Jusqu'à récemment, la guerre avec l'armée turque avait seulement lieu dans les montagnes. Puis elle s'est déplacée dans les villes. Maintenant, il y aura des combats partout », assurait Cemil Bayik, l'un des responsables du PKK, dans une interview au Time le 15 mars 2016. Cette stratégie pourrait toutefois être contre-productive pour le PKK. En s'en prenant à des civils, avec des méthodes similaires à l'EI, ils risquent de se mettre la population à dos et de renforcer le pouvoir du président turc. Ce dernier justifie déjà sa politique autoritaire par la menace terroriste, et la demande de sécurité pourrait prévaloir, aux yeux de la majorité de la population, sur la demande de liberté.

 

(Témoignage : Attentat d'Istanbul : "A qui sera le tour de mourir demain?")

 

Plus grande menace
Même si la Turquie a multiplié les opérations de police visant à démanteler les cellules de l'EI et qu'elle a bombardé les positions de l'organisation jihadiste en Syrie, il n'empêche qu'elle considère tout de même le PKK comme une plus grande menace. L'organisation kurde et son avatar syrien sont en effet la principale cible des bombardements turcs en Syrie depuis l'été 2015 alors que M. Erdogan avait fait auparavant la démarche d'entamer des négociations de paix avec le PKK. Le fait de voir son ennemi de toujours mettre la main sur un territoire autonome dans le Nord syrien – qui constituerait une base arrière pour le PKK – le hante bien davantage que la menace jihadiste, puisque ce projet remet en question la stabilité et l'intégrité territoriale de l'État.

L'avenir de la Turquie passe aujourd'hui plus que jamais par la Syrie. Ankara dénonce « l'hypocrisie » de ses alliés européens, et américains, qui considèrent tous deux le PKK comme un groupe terroriste, mais qui soutiennent et arment son avatar syrien. L'alliance entre les Américains et les Kurdes devrait toutefois rester circonstancielle puisque Washington privilégiera sans doute, à terme, ses bonnes relations avec Ankara. Les Européens, qui ont besoin des Turcs pour endiguer la crise des réfugiés, pourraient également faire davantage de concessions à ce niveau-là. Mais les effets de la crise syrienne sur la Turquie ne devraient pas pour autant s'estomper.
La crise des réfugiés, la relance de la guerre contre les Kurdes, la multiplication des cellules jihadistes, l'isolement international de la Turquie fragilisent l'État turc dans ses fondamentaux. Ils sont pourtant, en partie, le résultat de la politique du gouvernement, et plus particulièrement de son président.
Celui qui se rêvait comme le nouveau Mustapha Kemal, mais dans une version plus conservatrice et plus ottomane, a, en une seule année, largement assombri son bilan politique pourtant présenté comme un modèle de réussite pendant plus de dix ans. Et mis en péril sa nation.

 

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Cinq attentats en moins de trois mois, huit en moins d'un an. La Turquie connaît actuellement « l'une des plus grandes vagues de terrorisme de son histoire », selon les termes du président Recep Tayyip Erdogan. Dans un discours à Istanbul, M. Erdogan a décrété hier la mobilisation générale contre le « terrorisme », en a appelé à la « grandeur de l'Empire ottoman »...

commentaires (2)

ADIEU LES REVES SULTANIQUES !

LA LIBRE EXPRESSION

13 h 33, le 22 mars 2016

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Commentaires (2)

  • ADIEU LES REVES SULTANIQUES !

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 33, le 22 mars 2016

  • JE ME SOUVIENS , C'ETAIT ENCORE HIER , BASHAR LE HEROS DISAIT AUX OCCICONS VOTRE POLITIQUE DE SOUTIEN AUX BACTERIES FERA SE DEVERSER CHEZ VOUS DES HORDES DE TERRORISTES . ILS N'AVAIENT RIEN COMPRIS , ET LES TURCS AUSSI .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 19, le 22 mars 2016

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