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Moyen Orient et Monde - Iran

L’accord nucléaire est une chose, les tirs de missiles balistiques une autre

Si les pasdaran sont frappés de sanctions, celles-ci n'auront rien à voir avec celles levées après l'accord du 14 juillet.

Un missile Qadr tiré depuis une base souterraine dans la chaîne montagneuse des Alborz dans le nord de l’Iran, mercredi 9 mars. Photo Reuters

La semaine dernière, plusieurs missiles balistiques à courte, moyenne et longue portée (de 300 à 2 000 km) ont été tirés depuis des bases souterraines iraniennes, d'après le site des gardiens de la révolution, la troupe d'élite iranienne qui les a menés, et l'agence de presse officielle Irna. Effectués dans le cadre de manœuvres militaires qui ont duré plusieurs jours, ces tirs devaient prouver que les missiles de précision Qadr H et Qadr F de longue portée, qui portaient comme inscription « Israël doit être effacé de la surface de la terre », peuvent frapper des « ennemis lointains », en particulier « le régime sioniste ». Très vite, les réactions de la communauté internationale ne se sont pas fait attendre, et les États-Unis ont demandé une réunion du Conseil de sécurité de l'Onu prévue aujourd'hui.

Dès l'annonce de ces tirs, une question s'est imposée concernant leur timing. Les manœuvres étaient certes probablement prévues depuis longtemps, mais interviennent également quelques jours après une double élection (Parlement et Assemblée des experts) qui a conforté la politique d'ouverture du président modéré Hassan Rohani – notamment après l'accord sur le nucléaire iranien signé le 14 juillet 2015, et mis en application il y a deux mois – sans pour autant lui conférer une majorité absolue. S'agit-il donc, pour les détracteurs de l'accord du 14 juillet, de saboter la politique du président Rohani ? Pas si vite, estime David Rigoulet-Roze, chercheur à l'Institut français d'analyse stratégique (IFAS), rédacteur en chef de la revue Orients stratégiques et spécialiste de l'Iran. Pour lui, il s'agirait plutôt de montrer qu'il y a une autonomie stratégique de la part des pasdaran. Ils adressent un message en matière de politique externe, prouvant clairement à l'Occident que l'accord sur le nucléaire iranien ne concerne pas le programme balistique. En effet, explique le chercheur, le volet balistique n'est pas explicitement concerné par l'accord nucléaire du 14 juillet.

Le recentrage « ne change rien »

David Rigoulet-Roze rappelle ainsi que des sanctions ont déjà été appliquées à la mi-janvier contre six personnalités iraniennes, et deux compagnies des Émirats arabes unis, entre autres, après un tir de missile balistique effectué en décembre 2015. « L'accord du 14 juillet sur le nucléaire prévoit des mesures très strictes pour le contrôle de matériaux nucléaires, mais le programme balistique, angle mort de l'accord, a été laissé un peu à la marge, entre autres parce que cela risquait d'hypothéquer la finalité de l'accord », rappelle-t-il. En matière de politique interne, ils ont voulu montrer au président Rohani qu'il n'a pas la main sur certains volets stratégiques du régime. « Le but est de montrer que le recentrage politique postélections, même s'il a abouti à une marginalisation relative des ultraconservateurs, ne change rien », explique le chercheur.

Même son de cloche pour Thierry Coville, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), professeur à l'école de commerce Novancia à Paris, et expert de l'Iran. « Ce serait une manière de parer à une normalisation des relations avec l'Occident, surtout les États-Unis », estime-t-il, alors que de très nombreuses sanctions de l'Onu, des États-Unis et de l'Union européenne sont censées être progressivement levées. Ces progrès devraient notamment permettre à la République islamique de respirer plus librement sur le plan économique.

Les pasdaran qui marquent leur territoire

Alors qu'une réunion du Conseil de sécurité est prévue aujourd'hui pour étudier de possibles sanctions contre l'Iran après ces exercices militaires, rien n'est moins certain toutefois que celles-ci soient appliquées. Pour M. Coville, il sera difficile au Conseil de sécurité d'avoir une majorité de votes en faveur de sanctions, ce que la Russie et la Chine n'accepteront jamais. « Il faudrait prouver ce que certains experts disent, c'est-à-dire que les missiles lancés ne peuvent pas porter de charge nucléaire. Donc je ne crois pas que cela remette en cause l'accord du 14 juillet », avance l'expert.

Il n'est donc pas certain que ces tirs aient des conséquences profondes. « En matière de politique intérieure, il me semble que Rohani doit composer avec les pasdaran ; il est quand même en position de force après les élections parlementaires, mais les forces ultras sont toujours là, soutenues par le guide suprême. Donc, comme toujours, la politique étrangère iranienne résultera d'un consensus », juge Thierry Coville.

Pour David Rigoulet-Roze, ces essais de missiles, qui permettent aux pasdaran de marquer d'une certaine manière leur territoire, auraient tendance à avoir un effet contraire à celui escompté. Les gardiens de la révolution faisaient et font toujours partie des détracteurs de l'accord sur le nucléaire iranien. De telles manœuvres militaires sont du pain bénit pour les autres opposants à l'accord, notamment Israël, le plus virulent. Toutefois, estime le chercheur, elles seraient plutôt la manifestation de l'échec de ces mêmes détracteurs : l'accord du 14 juillet fonctionne, et il est entré en vigueur malgré les tirs de missiles en décembre, et ceux de la semaine dernière. Indépendamment de ces fanfaronnades, rien n'est moins certain qu'une remise en cause d'un accord durement acquis, ou même de son arrêt.


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La semaine dernière, plusieurs missiles balistiques à courte, moyenne et longue portée (de 300 à 2 000 km) ont été tirés depuis des bases souterraines iraniennes, d'après le site des gardiens de la révolution, la troupe d'élite iranienne qui les a menés, et l'agence de presse officielle Irna. Effectués dans le cadre de manœuvres militaires qui ont duré plusieurs jours, ces tirs...

commentaires (2)

LA TECHNOLOGIE NORD CORÉENNE DE JANG... JUNG... JONG... VA COÛTER TRÈS CHER AUX AYATOLLAHS FANG... FUNG ET FONG...

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 23, le 14 mars 2016

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • LA TECHNOLOGIE NORD CORÉENNE DE JANG... JUNG... JONG... VA COÛTER TRÈS CHER AUX AYATOLLAHS FANG... FUNG ET FONG...

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 23, le 14 mars 2016

  • Dans ce monde de gangster , le plus gangster des 2 se fera respecter . C'est la loi du milieu , on y fait pas partie , on la comprend mal mais elle régit les rapports entre eux . Quand on dit que l'Iran ( INDO-EUROPEENNE ) est la NOUVELLE PUISSANCE REGIONALE très peu comprennent ce que cela veut dire . Ils se perdent en chiite/sunnite etc...perse /ottoman/semite ..et bla bla bla .. La vérité est que les iraniens se sont réveillés plus tôt que les autres qui continuent à sommeiller en comptant sur des alliances étrangères qui ne vont pas tarder à les balancer . LES IRANIENS SONT LIBRES ET INDEPENDANTS DE LEURS DECISIONS , LA EST TOUTE LA NUANCE , QUI FAIT LEVER LE PAIN ! RIEN A VOIR AVEC DES MEDAILLES .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 36, le 14 mars 2016

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