Cela ressemblait au départ à une blague de mauvais goût ou à une nouvelle émission de téléréalité. Ni les journalistes, ni les analystes, ni les hommes politiques, ni même ses adversaires ne voulaient y croire. De l'avis de tous, Donald Trump n'avait tout simplement aucune chance de remporter les primaires républicaines. Son inexpérience politique, ses provocations outrancières, ses mensonges absurdes et éhontés étaient autant de raisons de ne pas le considérer comme un candidat crédible. La « trumpmania » allait forcément exploser en vol, suite à une parole ou à un geste éliminatoire de cet habitué des scandales.
Plus de six mois plus tard, « le Donald », comme le surnomme les Américains, est pourtant encore là. Toutes ses faiblesses, tout ce qui aurait dû éliminer n'importe quel autre candidat, n'ont fait que renforcer sa posture. Plus il provoque, plus il énonce des énormités comme des vérités générales, plus il tient des propos racistes, populistes, misogynes et grossiers, et plus sa cote de popularité augmente.
Son programme politique ? Il pourrait se résumer en deux mots : Donald Trump. Le milliardaire américain a compris qu'il était plus rentable politiquement de promouvoir une personnalité, un caractère, plutôt qu'un programme politique. Qu'importe qu'il soit toujours imprécis et simpliste dans ses réponses, qu'importe si sa vision de la politique étrangère est enfantine et caricaturale, qu'importe s'il peut dire une chose et son contraire au cours de la même soirée, le Donald fait rire le public, il capte son attention, crée le buzz, les réseaux sociaux aidant, et embarrasse tous ses concurrents.
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Après les six premiers débats du Grand Old Party (GOP), le milliardaire extravagant fait encore la course en tête. Un sondage, réalisé par la Monmouth University du 15 au 18 janvier 2016, le crédite de 36 % des intentions de vote au niveau national, loin devant son principal adversaire, Ted Cruz, qui serait, lui, à 17 %. Pour ses concurrents, il est désormais l'homme à abattre. Au cours des derniers débats, ils s'en sont tous pris à lui, essayant de le déstabiliser, pointant du doigt ses nombreuses lacunes. Mais comment décrédibiliser un homme qui se nourrit de la polémique ? Comment affaiblir un candidat qui a fait de l'anti-politiquement correct son principal argument de séduction ?
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Anti-Obama
Le Donald n'a aucune limite. Il veut interdire aux musulmans d'entrer sur le territoire américain, il qualifie les Mexicains de violeurs et de voleurs, promettant de construire un mur à la frontière sud des États-Unis et d'obliger le Mexique à le financer, il accuse le président Barack Obama d'avoir un faux certificat de naissance et s'attaque même à John McCain, figure du Parti républicain et ancien candidat à la présidentielle, déclarant qu'« il aime les gens qui ne se font pas capturer ». Tout en lui évoque la caricature : son style, ses propos, sa coupe de cheveux et même son prénom. Il est l'anti-Obama. Alors que le premier président noir de l'histoire des États-Unis est un animal de sang-froid, dont le pragmatisme a pu parfois être compris comme de l'indifférence, M. Trump est un pur baratineur qui réagit avec démesure à la moindre nuance ou critique.
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Climato-sceptique, adepte des théories du complot, défenseur de l'homme blanc, ultralibéral, macho, bling-bling, antisystème, M. Trump dit aux Américains ce qu'une partie d'entre eux veulent entendre. Il parle à cette Amérique qui se sent trahie par ses représentants, à cette Amérique qui se sent minoritaire, à cette Amérique angoissée par la mondialisation et persuadée que les États-Unis sont en plein déclin. Et il lui promet d'inverser la courbe, de lui rendre son prestige et sa fierté, idée matraquée par son slogan de campagne « Make America Great Again ». Sa fortune personnelle devient son meilleur argument de vente, la preuve tangible qu'il est capable de tout. La gestion de l'État est ainsi comparée, sans aucune nuance, à celle d'une entreprise. Self-made-man, le milliardaire de 69 ans incarne tous les clichés du rêve américain. Pur produit de la société spectacle, il transforme la primaire en un show permanent. Les médias s'en délectent et l'Américain moyen jubile. Prenant conscience de la nécessité de séduire l'électorat de droite le plus conservateur, M. Trump s'est récemment découvert une passion pour Dieu, se rapprochant même de Sarah Palin, figure du Tea Party et symbole de la lutte contre l'avortement. Une nouvelle preuve qu'il est prêt à tout pour être investi candidat du GOP.
Qu'il soit élu ou non, l'ancien présentateur de l'émission de téléréalité The Apprentice a changé les règles du jeu de cette primaire. Il n'est plus question de politique, il n'est question que de lui. Il a obligé les autres candidats à surenchérir sur ses thèmes de prédilection et à adopter ses méthodes. Parce que l'investiture de M. Trump comme candidat des républicains garantirait probablement une victoire pour Hillary Clinton au moment du scrutin final, soit un troisième mandat consécutif pour les démocrates, les électeurs et les cadres du GOP opteront peut-être pour un candidat plus traditionnel.
Mais les raisons de son succès, dans cette Amérique plus paradoxale que jamais, n'ont pas fini d'être analysées. En attendant, il est encore au centre de la seule question qui donne un peu d'intérêt à cette présidentielle américaine, assez médiocre au niveau politique : qui pourra arrêter Donald Trump ? Première réponse le 1er février dans le caucus de l'Iowa.
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Neron à brûlé Rome. Cet homme est entrain de brûler l'Amérique à la dérive avant même d'avoir pris le pouvoir. Et comme ça on publie ou pas encore ?
10 h 21, le 27 janvier 2016