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À La Une - analyse

La crise avec Téhéran n'est pas délibérée, mais Riyad ne regrette rien

"Une guerre entre l'Arabie saoudite et l'Iran serait le point de départ d'une catastrophe majeure dans la région et aurait de graves répercussions dans le reste du monde", estime le prince Mohamed ben Salmane.

Déjà tendues, les relations entre l'Iran chiite et l'Arabie saoudite sunnite ont dégénéré en crise ouverte début janvier après l'exécution d'un important chef religieux chiite saoudien, défenseur de cette minorité et critique du régime. REUTERS/Khaled Abdullah

La crise diplomatique entre l’Iran et l'Arabie saoudite semble être davantage le résultat indirect d'une décision que Riyad a prise pour des raisons intérieures que le fruit d'un calcul délibéré, mais la famille régnante n'a exprimé aucun regret depuis.

Dans la nuit qui a suivi l'exécution, samedi, du cheikh Nimr el-Nimr, figure de la contestation saoudienne, des manifestants iraniens ont saccagé l'ambassade saoudienne de Téhéran et le consulat de Mashhad. En représailles, l'Arabie a annoncé dimanche la rupture des relations bilatérales.

Le prince Mohamed ben Salmane, ministre de la Défense et deuxième dans l'ordre de succession au trône, a balayé jeudi les craintes de conflit armé. "Une guerre entre l'Arabie saoudite et l’Iran serait le point de départ d'une catastrophe majeure dans la région et aurait de graves répercussions dans le reste du monde. Nous ne permettrons assurément pas qu'une telle chose se produise", dit-il dans un entretien accordé à The Economist.

Dans les jours qui ont suivi l'exécution, Riyad n'a toutefois rien fait pour désamorcer les tensions. Dans la confrontation, les nouveaux dirigeants se sont même montrés d'une aisance qui tranche avec la prudence dont Riyad faisait preuve jusqu'à la mort du roi Abdallah, il y a un an.

"Je ne pense pas que cela serait arrivé sous le règne du roi Abdallah", dit un politologue saoudien qui a requis l'anonymat, évoquant à la fois l'exécution du cheikh Nimr et la rupture des relations diplomatiques. "J'aurais personnellement préféré qu'il rappelle l'ambassadeur. C'est moins difficile de changer d'attitude ensuite", ajoute-t-il.

(Lire aussi : Iran vs Arabie : où s’arrête la religion)

 

"Ingérences iraniennes"
A son arrivée au pouvoir, le nouveau souverain a remanié l'ordre de succession - ce qu'aucun de ces cinq frères passés sur le trône depuis 1953 n'avait fait - pour élever son neveu Mohamed ben Nayef et son fils Mohamed ben Salmane aux premier et deuxième rangs. Pour les Saoudiens, la crise diplomatique avec l’Iran a confirmé qu'il est moins hésitant que ses prédécesseurs.

De sources proches des autorités, on assure que la mise à sac de l'ambassade de Téhéran a été une surprise pour le palais, mais on ajoute qu'il n'aurait pas été question de renoncer à l'exécution du cheikh Nimr, jugée tout à fait justifiée, même si des représailles avaient été anticipées.

"Le gouvernement est décidé à contrer les ingérences iraniennes. Si l’Iran essaie d'intervenir dans une affaire intérieure, c'est le conflit assuré", commente l'un des politologues déjà cités. Des menaces de représailles iraniennes auraient même, selon lui, renforcé la détermination de Riyad concernant l'exécution du cheikh Nimr. "C'est un citoyen saoudien condamné pour des crimes commis en Arabie saoudite. Ils se disent qu'il n'est pas question de tenir compte des considérations internationales et encore moins de l'opinion iranienne", ajoute-t-il.

Le roi Salmane et ses deux héritiers affichent depuis un an une fermeté inédite face à l'influence de l’Iran dans la région, qu'il juge de plus en plus importante.

L'Arabie saoudite, aux commandes d'une coalition sunnite, intervient militairement au Yémen pour combattre les rebelles chiites houthis qu'elle considère comme des pions iraniens. Elle fournit par ailleurs un soutien logistique de plus en plus important aux adversaires du président syrien Bachar el-Assad, qui est lui-même fermement soutenu par Téhéran.

 

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