"Ennemie du peuple, accro à l'argent et au whisky, de connivence avec Assad". En couverture de sa dernière livraison publiée lundi au Liban, l’hebdomadaire al-Chiraa n'a pas fait dans la dentelle pour marquer les 80 ans de l'emblème de la chanson libanaise, Feyrouz.
"Elle a amassé beaucoup d'argent, sans avoir rien fait de bien de sa vie", écrit Hassan Sabra, rédacteur en chef d'al-Chiraa, dans un article de six pages consacré à la diva libanaise. Et de poursuivre en affirmant que la célèbre chanteuse "vit recluse chez elle, en buvant du whisky, Chivas Regal, sa marque préférée". Hassan Sabra critique également les "sautes d'humeur" de Feyrouz dont il assure qu'elle est "en de bons termes avec le régime Assad en Syrie".
Contacté par al-Arabiya, Hassan Sabra a expliqué avoir été approché par la rédactrice en chef de la revue égyptienne al-Kawakeb, lui demandant de contribuer à l'écriture d'un dossier sur Feyrouz. L'article en question devait être publié dans al-Kawakeb, mais est paru plus tôt dans al-Chiraa, tiré à 10.000 exemplaires. Le rédacteur en chef de la revue généraliste explique que ses informations sont "le fruit d'une connaissance personnelle" de Feyrouz. Affirmant admirer l’œuvre de la chanteuse, il souligne qu'en tant que journaliste, il est normal qu'il publie les "informations" qu'il détient.
Des excuses exigées
Au Liban, les réactions indignées n'ont pas tardé à fuser. La fille de Feyrouz, Rima Rahbani, a réagi en publiant un communiqué : "Toute grande personnalité (...) suscite la jalousie autour d'elle, poussant certains à inventer des mensonges en croyant que cela amoindrira l'admiration du public pour cette personnalité", a-t-elle écrit, assurant que "les tentatives de +politiser+ Feyrouz ont échoué". Et de lancer : "(Les membres de) Daech (acronyme arabe du groupe Etat islamique, ndlr) s'habillent aussi en costume cravate et ont des bureaux et des tribunes mises au service de la destruction des civilisations et de toute figure ayant un véritable rayonnement".
Le ministre de l'Information, Ramzi Jreige, a, pour sa part, dénoncé une "insulte" qui ne vise pas seulement Feyrouz, "mais le Liban tout entier". "La meilleure réponse à ces calomnies serait d'exprimer notre soutien à Feyrouz", a-t-il poursuivi. Le ministre de la Culture, Rony Araijy a, de son côté, estimé "inacceptable de s'en prendre" à la diva libanaise. Le président de l'ordre de la presse, Aouni Kaaki, est lui aussi monté au créneau, souhaitant que M. Sabra, dont il a qualifié les écrits d'"inacceptables", adresse des excuses à Feyrouz.
Sur la toile, de nombreux internautes ne décolèrent pas. Ils réclament le retrait d'al-Chiraa des kiosques et demandent des poursuites à l'encontre de Hassan Sabra. Une page Facebook a même été créée : intitulée "Avec Feyrouz contre le magazine al-Chiraa", elle exprime son soutien à la chanteuse libanaise.
Mais Hassan Sabra, dont l'heure de gloire fut un article dévoilant la vente secrète d'armes par les Etats-Unis à l'Iran en 1986, dit ne pas regretter son papier et assure qu'il ne présentera pas d'excuses. Le journaliste, qui réside au Caire, affirme également avoir reçu des menaces de mort. En 1987, Hassan Sabra, qui avait alors 38 ans, avait échappé à une tentative d'assassinat à Beyrouth.
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20 h 19, le 30 juillet 2018