Les obsèques, hier, à Moscou, du lieutenant-colonel Oleg Pechkov, pilote du bombardier Sukhoï-24 russe abattu en Syrie. Russian Defence Ministry/Vadim Savitsky/AFP
La Russie est passée, hier, aux attaques personnelles dans la crise qui l'oppose à la Turquie, en accusant directement le président Recep Tayyip Erdogan et sa famille de profiter de la contrebande de pétrole à laquelle se livre l'organisation État islamique (EI) en Syrie.
« Le principal consommateur de ce pétrole volé à ses propriétaires légitimes, la Syrie et l'Irak, s'avère être la Turquie », a accusé hier devant plusieurs centaines de journalistes le vice-ministre russe de la Défense, Anatoli Antonov. « La classe dirigeante politique, dont le président Erdogan et sa famille, est impliquée dans ce commerce illégal », a poursuivi M. Antonov, ajoutant que « le cynisme du gouvernement turc est sans limite ». Le responsable russe a notamment mis en cause le beau-fils de M. Erdogan, Berat Albayrak, 37 ans, récemment nommé ministre de l'Énergie et qui a longtemps dirigé le groupe énergétique Calik Holding, ainsi que l'un des fils du président turc, Bilal, qui possède le groupe BMZ, spécialisé dans les travaux publics et le transport maritime. Lors d'un point de presse à Moscou, des responsables du ministère de la Défense ont présenté des images satellites montrant, selon eux, des colonnes de camions-citernes prenant en charge du pétrole dans des installations contrôlées par l'EI en Syrie et en Irak, et franchissant ensuite la frontière turque.
De Dubaï, le président turc a fermement rejeté les accusations russes, martelant que personne n'avait le droit de calomnier la Turquie en l'accusant d'acheter du pétrole à l'EI, et menaçant Moscou de mesures de représailles s'il continuait à « propager des calomnies ». Il a répété qu'il démissionnerait immédiatement si les accusations russes étaient prouvées.
Vladimir Poutine avait déjà accusé Ankara lundi de « protéger » les combattants de l'EI et de couvrir ce trafic qui représente l'une des principales sources de financement du groupe jihadiste. Allant encore plus loin, M. Poutine avait estimé que la décision de l'aviation turque d'abattre un avion Su-24 russe avait été dictée par « la volonté de protéger ces chemins d'acheminement de pétrole vers le territoire turc ». Il avait assuré que l'or noir de l'EI était « acheminé massivement, de manière industrielle, vers la Turquie », générant des « millions et des milliards de dollars » de profit.
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Excuses exigées
Cette guerre des mots avait pourtant semblé se calmer, hier, lorsque le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a annoncé une rencontre avec son homologue turc Mevlüt Cavusoglu, premier entretien entre hauts responsables des deux pays depuis le début de la crise. « Nous n'allons pas nous dérober et nous écouterons ce que Mevlüt Cavusoglu a à dire. Peut-être qu'il y aura quelque chose de nouveau qui n'a pas déjà été dit publiquement », a déclaré M. Lavrov lors d'une conférence de presse à Nicosie.
Cette rencontre devrait se tenir en marge du Conseil des ministres de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui se déroule à Belgrade aujourd'hui et demain. Jusqu'à présent, les hauts responsables russes ont refusé tout contact avec leurs homologues turcs. Vladimir Poutine, après avoir refusé de prendre les appels du président turc, l'avait soigneusement évité lors de la COP21 à Paris.
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Les autorités russes exigent sans succès des excuses officielles d'Ankara. M. Erdogan a réaffirmé hier que la Turquie adoptera une « approche mesurée » face aux réactions « émotionnelles » de Moscou. Par ailleurs, la Turquie s'apprêterait à réduire d'un quart ses importations de gaz de pétrole liquéfié (GPL), ont déclaré hier à Reuters deux sources informées qui expliquent cette décision par les tensions diplomatiques entre Ankara et Moscou.
Loin de l'activité diplomatique, le lieutenant-colonel Oleg Pechkov, le pilote du Su-24 abattu, a été enterré hier en présence de près de 10 000 personnes à Lipetsk, dans l'ouest de la Russie. Le militaire de 45 ans avait été tué alors qu'il retombait en parachute après s'être éjecté.
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M. Erdogan a réaffirmé hier que la Turquie adoptera une "approche mesurée" face aux réactions "émotionnellesdu Nain" de Moscou. Wâllâh yâ äâmméh Grande Classe, ce Grand Kardesh Turc, Bey, Pacha et Effendéh ! Un grand Merhaba(h) à toi, yâ Sultan éntéh ! Comparé à l'autre Mongolo-Nabot genre KGB !
12 h 35, le 03 décembre 2015